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- Compte rendu -
Locarn contre la désindustrialisation de la Bretagne
Au cours de son Université d'été qui s'est tenue jeudi et vendredi dernier, l'Institut de Locarn a proposé de rompre les amarres avec le système « France ». Citant le très
Par Philippe Argouarch pour ABP le 3/09/12 17:31

Après avoir rendu un vibrant hommage au Docteur Jean-Paul Moisan, le généticien nantais décédé accidentellement le 17 août dernier, l'Institut de Locarn a entamé vendredi sa 5e Université d'été. Citant le très sérieux hebdomadaire Der Spiegel "La France a raté sa globalisation", Joseph Le Bihan a encore une fois tiré la sonnette d'alarme à propos de deux menaces qui pèsent sur la Bretagne : le naufrage avec le paquebot France caractérisé par une désindustrialisation croissante et la désintégration possible de la région Bretagne selon une fracture entre une Haute Bretagne qui devient de plus en plus une extension de la région parisienne et une Basse Bretagne océanique qui se raccrocherait au mieux à l'Europe du Nord et qui, au pire, serait marginalisée.

Le président de l'Institut, Alain Glon, notant l'échec des échanges avec l'ancien président Sarkozy après plusieurs invitations à l'Élysée de représentants de la revendication bretonne, propose de "larguer les amarres", de prendre des distances. La France perdrait 1% de compétitivité par an. Les chefs d'entreprises bretons n'ont même pas besoin de se mettre en grève car "ils le sont déjà par manque de commandes et les pertes de marchés" a déclaré Alain Glon à ABP. Pour lui, l'agro-business breton n'a pas de futur avec la France : "Nous voulons être une Hollande, pas une Beauce".

Ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain

Claude Champaud, ancien membre du CELIB, a bien différencié le financialisme "un autre veau d'or", le dirigisme ou colbertisme, qu'il fait remonter au Thomisme, et le capitalisme entrepreneurial, source de prospérité. Pour Champaud, il ne faut ni suivre la voie du Royaume-Uni, qui a liquidé son industrie et embrassé le financialisme, ni suivre la voie française restée dans l'esprit dirigiste et qui "subventionne sa protection sociale en empruntant l'argent de ses petits-enfants" (la France emprunte 700 millions d'euros par jour pour fonctionner, avait révélé Alain Glon lors d'une précédente session de l'Institut). Garder l'entreprise au centre de l'ordre sociétal mais "en réindroduisant l'Humanisme dans l'économique", c'est ce que propose Claude Champaud.

Peut-on sauver l'euro ?

C'est le sujet abordé par Jean-Luc Baslé, vice-président de l'institut de Locarn. La banque centrale européenne (BCE) veut sauver l'euro. Elle achète de la dette (200 millards déjà) mais faire marcher la planche à billets a ses limites ou alors c'est l'inflation --ce qui terrifie les Allemands. L'euro ne peut être sauvé sans un fédéralisme européen et la France jacobine s'y oppose, tout d'abord parce que le concept de fédéralisme est complètement étranger à sa culture et ensuite parce que l'État-nation veut garder à tout prix ses privilèges régaliens. La France est aux prises avec une contradiction majeure qui risque de lui être fatale et qui se résume dans cette phrase de Chirac : "il faut faire l'Europe sans défaire la France". En gros, les jacobins veulent avoir le beurre et l'argent du beurre et tout le monde, sauf eux, sait que c'est impossible. Pour Jean-Luc Baslé, c'est un autre trilemme de Rodrik car on ne peut avoir l'Europe, l'État-nation et la démocratie, tout à la fois. Sans fédéralisme, une politique monétaire commune est impossible.

A noter la remarque pertinente du professeur d'économie Jean-Claude Malaguti présent à cette Université d'été. Une politique monétaire commune doit être définie par la BCE, mais "il faut une BCE indépendante et fédéralisée comme aux USA. La BCE et les BCE de chaque pays doivent être indépendantes des institutions politiques. Les politiques fiscales sont sous le controle des institutions politiques mais pas les politiques monétaires." Plusieurs états américains ont une succursale de la banque centrale appelée federale reserve avec des spécificités comme des taux d'intérêts propres. "Etant donné la grande surface de la zone euro, il devrait y avoir une BCE centrale à Bruxelles, appuyée par des BCE par pays ; par exemple, la BCE de la France, la BCE de l'Allemagne, la BCE de l'Italie", précise Jean-Claude Malaguti.

Peut-on sauver l'économie bretonne ?

Pour Alain Glon et Henri Lagarde, il faudrait que les PME bretonnes aient la même fiscalité que les entreprises allemandes pour pouvoir être sur un pied d'égalité. Jean-Luc Basle propose d'aller plus loin, et de suivre l'exemple danois. Il faudrait transférer toutes les charges sociales sur la TVA. La faire passer à 25 % et alléger le coût du travail et donc de nos produits. Bien sûr, seul l'État français peut opérer une telle réforme... sauf si l'Europe se dote d'un pouvoir politique suffisamment fort pour unifier les fiscalités des entreprises sur tout le territoire européen.

La Bretagne doit continuer de développer ses PME. C'est sa force. 90% des entreprises bretonnes ont moins de 20 salariés mais il faudra instaurer un small business act breton pour encourager la croissance de nos PME et éviter qu'elles disparaissent ou soient bouffées par des grands groupes francais basés à Paris ou par des multinationales.

Le territoire est la capitalisation du passé

Jean Ollivro, qui prépare un ouvrage sur le foncier en Bretagne, a rappelé que les atouts de la Bretagne étaient non seulement sa cohésion sociale (la région où il y a 3 fois plus de bénévoles qu'en France, le moins de vols et le plus de propriétaires) mais aussi son territoire ancré dans des villes moyennes à taille humaine et non loin de cette façade maritime qui, dans le passé, fut toujours source de prospérité. "La Bretagne a toujours été prospère lorsqu'elle était maritime", a réaffirmé avec pertinence le géographe.

Philippe Argouarch

Voir aussi sur le même sujet : locarn,institut de locarn
Cet article a fait l'objet de 1729 lectures.
logo Philippe Argouarch est un reporter multi-média ABP pour la Cornouaille. Il a lancé ABP en octobre 2003. Auparavant, il a été le webmaster de l'International Herald Tribune à Paris et avant ça, un des trois webmasters de la Wells Fargo Bank à San Francisco. Il a aussi travaillé dans des start-up et dans un laboratoire de recherche de l'université de Stanford.
Vos 13 commentaires
bernard guyader Le Lundi 3 septembre 2012 19:56
Bon dia .... Merci pour ce compte rendu ... Un Flamand a écrit .. Quand un chef d'entreprise bascule dans le camp des "indépendantistes" le combat est gagnant pour la Flandre ...J'ai bien peur qu'il en faudra plus ( pour la Bretagne ?) pour ne pas sombrer avec la galère FrAnCe..B.Guyader
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HUBERT CHEMEREAU Le Lundi 3 septembre 2012 20:55
La Bretagne est en voie de désintégration depuis la partition de 1972 et qui a pris sa vitesse de croisière avec la régionalisation jacobine de 1986 et s’accélère depuis les années 2000. Le chantier urgent est la réunification !
On voit bien avec une région b4 à Rennes une extension comme il est écrit vers Paris et une marginalisation de notre vocation maritime avec la coupure avec l\'axe maritime Nantes-St-Nazaire ( lui même marginalisé par les très terriens PDL )
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Pierre CAMARET Le Lundi 3 septembre 2012 22:28
Je suis a 150% d'accord avec Hubert CHEMEREAU.
Dans l'immediate : Priorite a la Reunification .
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SPERED DIEUB Le Mardi 4 septembre 2012 08:25
Très bonnes interventions de Joseph Le Bihan de Claude Champaud et de Jean Ollivro
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eugène Le Tollec Le Mardi 4 septembre 2012 11:43
Arrêt sur info
Nous devons stopper les pleurnicheries et ,une fois pour toute nous prendre en main.... mais pour cela,il faut une unité de pensée bretonne qui doit devenir une véritable pensée d\'état( donc non partisane) Pour l\'actualité présente Un objectif dans le (Q -F - Q - O - Q -C),La Réunification!.
Il faut aussi penser à :
Qu\'est-ce qu\'on fait après ,
Soit quelle Bretagne?
Mais pour cela ,il faut que le pouvoir économique se secoue un peu!
Rien ne sert d\'avoir de grandes théories,s\'il n\'y a pas le carburant pour avancer!
Rien ne sert de palabrer ,à droite comme à gauche (en Bretagne).
Rien ne sert de se morfondre.
Quelqu\'un a dit un jour\" Bretons prenez vous en main\".
Je dis et le répète(même à Locarn),seule la puissance économique sortira la Bretagne de son marasme.
Un détail(pour J.Ollivro)
La Bretagne est terrienne,à plus de 5 Km du trait de côtes, La frange côtière est devenue ,au cours des siècles ,maritime ,par nécessité et atavisme ( ces gens n\'avaient comme ouverture que l\'espace de mer( p^che ,marine de guerre et commerciale), les mieux\"lotis\"avaient quelques champs,quelques vaches,quelques prés(on avait des micro fermes tenues par des \"pêcheurs/paysans\")
Un des problèmes actuels,dans les mains du pouvoir économique est un renouveau d\'une politique maritime de la Bretagne,de vastes choses peuvent et doivent s\'enclancher (le pôle brestois - la révalorisation de la couche secondaire ( Roscoff,Lorient,Douarnenez ,autres).
Mais je me pose toujours la question,jusqu\'où et jusqu\'à quand ,la puissance économique bretonne sera \"à la solde \" des partis politiques jacobins?
Je vois le \"si peu\" de résultat obtenu,(je pense à de nouvelles filières).
Messieurs les penseurs d\'économie bretonne,nous attendons des résultats et non des compte rendus!
Rappelez vous que le politique n\'est là que pour vous leurrer.
La Bretagne ne sera Bretagne que par une volonté politique d\'état,mais si sa puissance économique est dispersée( voir certaines chambres de commerce et d\'industrie),l\'écoute d\'état sera toujours en défiance/méfiance.
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Bruno Le Goff Le Mardi 4 septembre 2012 14:40
Qui a construit l'excellent réseau routier breton ? Qui a fait le TGV qui profite à l'économie de la région ? Qui fourni la majorité de l'électricité ?
C'est en grande partie grâce à l'Etat français que ses infrastructures existent mais c'est peut être trop dur de le reconnaître.
Quand à l'agro-business, on sait à quel point il détruit l'environnement de la région au point d'avoir été obligé de boire de l'eau en bouteille toute mon enfance, alors oui ça profite...à quelques uns au détriment de tous les autres. C'est déprimant de voir ma région natale transformé en usine à viande, la Hollande a d'autres atouts et la Bretagne ferait bien de s'en inspirer et de miser sur d'autres secteurs moins nocifs et plus porteurs de progrès plutôt que ce productivisme forcené d'abattage animal.
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eugène Le Tollec Le Mardi 4 septembre 2012 16:02
Bruno Le Goff
Soit
Mais, le devenir breton est dans une réappropriation de notre management, l'état n'étant là que pour les grandes options et ses fonctions régaliennes, le reste est du ressort de la Bretagne en termes d'industrialisation (nouvelles filières - adéquation des existantes - des politiques -des rapports avec l'état).
La pression de l'état doit suivre un autre portage.
Il faut arriver à décloisonner ce pays ,débloquer ses structures,ouvrir cette société.
Il nous faut se gérer nous mêmes!
Nous sommes assez bretons pour ne pas chercher des modèles économiques ailleurs!nous avons tellement d'atouts!
Mais le problème est que nous sommes tués par nos politiciens de terroir (voir la dernière couvée!)
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Yann Krouer Le Mardi 4 septembre 2012 16:27
- La SNCF a conçu le TGV, Thomson l\'a ensuite construit. Le TGV était conçu pour être exporté. Aussi il aurait peut-être coûté moins cher aux Bretons s\'ils l\'avaient acheté en tant qu\'acheteurs étrangers (c\'est à dire après avoir mis en concurrence d\'autres constructeurs comme SIEMENS notamment). En outre le TGV ne profite pas tant que ça à l\'économie de la région. Il a surtout profité à la démographie de certaines localités et à l\'envolée des prix de l\'immobilier, notamment sur le littoral. Concernant le tourisme, les 35 heures ont eu certainement plus d\'impact que le TGV.
A la rigueur on aurait du construire ND des Landes dans les années 60 et on n\'aurait pas eu besoin du TGV.
Pareil pour l\'excellent réseau routier Breton dont vous parlez. L\'Allemagne a aussi un bon réseau routier malgré le relief. Construire des routes et des viaducs n\'est pas plus difficile en Bretagne qu\'ailleurs. Si l\'état français avait laissé à la Bretagne ses capacités de décision politique, certains projets auraient été achevés bien plus tôt (par exemple l\'axe central Ouest-Est).
Ce n\'est pas grâce à un Etat central que les infrastructures régionales existent, mais grâce à des évolutions technologiques qui rendent possible la mise en oeuvre de décisions politiques, relayées par la volonté d\'élus locaux. Ceux-ci prennent d\'ailleurs parfois des décisions insensées, comme le CG29 à Plogoff.
Par exemple, ça m\'étonnerait que le TGV ait pesé lourd dans les élections présidentielles ou législatives de 1969.
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Yann LeBleiz Le Mardi 4 septembre 2012 17:24
@ Monsieur le Goff
Réseau routier :
Payé par les bretons!
TVG :
Electrification payé par les bretons + actuellement 1,1 milliards d'argent breton détourné au profit des entreprises françaises pour un projet inutile de LVG et au dépend du réseau routier et des trains TER breton.
Electricité :
D'origine Française, car tous projets bretons sont stoppé pour l'unique profit d'AREVA et d'EDF! (La Bretagne ne peut développer la méthanisation car le gaz est un monopole d'Etat, ni les hydroliennes malgrè l'avance bretonne dans ce domaine).
L'AGRO :
Développé en suivant à la lettre les directives parisiennes, les bretons étant interdit de disposer de leur propre Ministère de l'Agriculture à la différence des autres régions européennes!
Alors Monsieur, arrêtez de taper sur votre pays (la Bretagne) et de valoriser un Etat archaïque qui vous rend dépendant (pour ne pas dire colonisé, pour reprendre le terme de Mr Michel Roccard, qui avait l'honneté de le reconnaître et qui visiblement connait mieux la Bretagne que vous!)
Pour votre information :
Au 17ème siècle, la Bretagne frappait 1/3 de la monnaie OR utilisée en Bretagne ET en France!
Réféchisez sur ce qui s'est produit en Bretagne, pour passer d'une propérité aussi grande à la pauvreté obsolue du début de 20ème siècle!
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Paul Chérel Le Mardi 4 septembre 2012 17:41
S'il n'y avait pas l'ABP, il n'y aurait pas de compte rendu de la réunion de Locarn et plus généralement de l'activité de cet institut. Vive donc l'ABP ! Quant au "merci la France!" de Bruno, il oublie tout ce que la Bretagne a perdu à cause de son annexion par la France ; les fonderies et un minerai peut-être rare mais plus riche, ses relations maritimes, ses industries textiles,etc. Quant au TGV, il est uniquement fait pour que les Bretons soient reliés vite fait à Paris, mais pour aller en train de Nantes à Vannes il faut plus de trois heures (expérience vécue par un de mes petits-fils ces jours-ci. Paul Chérel
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Ar Vran Le Mardi 4 septembre 2012 17:56
Pour éclairer la lanterne de M. Le Goff, qui remercie l'état français, je l'invite à lire la critique des allemands. Il verra que tout n'est si rose en France et que le gros problème de la France est son interventionnisme d'état.(http://www.directmatin.fr/economie/2012-09-04/lindustrie-allemande-critique-la-politique-economique-de-la-france-99892)
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eugène Le Tollec Le Mardi 4 septembre 2012 18:02
J'adore les propos des gens qui ont les yeux ouverts
Bravo ABP.
Parfois notre vieille hire peut s'exprimer (je cite au passage Pierre camaret - Yann Le Bleiz -Paul Chérel,ici présent et bien d'autres).
Il y a ecore une bonne race ,en Bretagne!
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Kevin Le Samedi 15 septembre 2012 18:35
Oui, justement, l'anecdote sluiogne l'ampleur des changements et leur rapidite9. Du moins c'est comme e7a que je l'entendais. Affirmer comme il le faisait que l'exotisme est dangereux, c'est pour sugge9rer l'humilite9 et e9largir son champ de vision. Car le proble8me est mondial , comme dirait Depardieu dans le Sucre.Ce que je veux dire c'est que d'un cf4te9 nous assistons e0 la mort de la ge9ographie par la promotion de la vitesse en tant que valeur supreame. De l'autre nous pouvons de9plorer une diffusion globale de mode8les, lie9e e0 cette vitesse, qui tendent e0 uniformiser le paysage, e0 le sectoriser partout de la meame manie8re, e0 le privatiser. Sapporo en est la bre8ve illustration mais qui se retrouve ailleurs, qui ne s'est jamais produit qu'en quelques de9cennies, et ne se limite donc pas au Japon. Mais au fond, je pense que je ne vous apprends rien.
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