Pierre Weill est ingénieur agronome, président de Valorex et coprésident de Bleu-Blanc-Cœur, entreprise installée à Combourtillé en Ille-et-Vilaine. Après son premier livre "Tous gros demain ?" (Plon, 2007), il vient de faire paraître "Mon assiette, ma santé, ma planète" (Plon) qu'il présente cette semaine à Rennes au Space.
Que présentez-vous dans ce nouveau livre ?
Nous n'allons pas bien. Obésité, diabète, cancer et infarctus explosent et sont freinés à grand renfort de médicaments, au prix d'un immense coût social. Je me demande si ces maladies dites « de civilisation » ne sont pas en fait des maladies environnementales ? Chaque jour, nous pouvons mesurer le lien entre les outrances infligées à notre planète et les maladies imposées à nos corps. Il est temps de réfléchir à un autre ordre alimentaire mondial, réaliste, capable de nourrir « bien » les dix milliards de terriens de demain ; un monde où pesticides et médicaments seront l'exception et où les équilibres naturels redeviendront la règle.
Plus concrètement ?
Je développe l'action que nous menons depuis 20 ans en Bretagne avec Valorex et depuis 10 ans avec Bleu-Blanc-Coeur. J'explique pourquoi les systèmes agricoles sont devenus des appauvrissements, je montre que ça ne va pas bien dans les sols et que l'on compense toujours les déficiences à coups de pesticides. Je montre que ça ne va pas bien chez les animaux et que l'on compense toujours à coups d'additifs. Je montre enfin que ça ne va pas bien chez l'homme et que l'on compense à coups de médicaments. Il y a des problèmes qu'il est urgent de traiter à la racine en reprenant les assolements, l'alimentation des animaux. Mais cela reste un bouquin d'agronome... pas de médecin !
En quoi diffère-t-il de votre premier ouvrage, Tous gros demain ?
En trente ans de vie professionnelle, j'ai enrichi mes convictions de tout un tas de données solides. J'ai eu envie de raconter des histoires pour que les gens sachent. C'est en fait la suite de mon premier ouvrage avec en plus tout le plaisir des belles rencontres que j'ai pu faire.
Parmi ces histoires, il y a celle – très symbolique – de l'amarante (nommée kiwicha en Amérique latine) qui résiste à Monsanto !
L'amarante est cultivée depuis des milliers d'années et ses graines nourrissantes faisaient partie du patrimoine culinaire des civilisations précolombiennes. Mais, interdite par les conquérants espagnols, sa culture avait quasiment disparu. Oubliée depuis des lustres, les fermiers américains l'ont baptisée « pigweed » , c'est-à-dire « mauvaise herbe à cochons » . On remarque dès 2005, que cette plante sacrée des Incas résiste au glyphosate, herbicide vedette de Monsanto. Une année plus tard, des techniciens agricoles identifient des variétés d'amarantes résistant également au redoutable ALS, l'herbicide phare de l'autre grande firme agrochimique : DuPont de Nemours. Depuis, les amarantes résistant aux herbicides se multiplient beaucoup plus vite que les cultures OGM, rendant celles-ci inutiles et obsolètes, malgré leurs gènes élaborés. On a donné à l'amarante un nouveau nom : « superweed » (super mauvaise herbe) ! La symbolique de cette plante nourricière qui se rebelle contre l'agrochimie avait tous les ingrédients d'un vrai conte moderne...
Propos recueillis par Tugdual Ruellan.
Informations pratiques
"Mon assiette, ma santé, ma planète", Pierre Weill (prix : 18,90 €).
Informations sur le livre : (voir le site)