Put your name here

connexionS'accréditer | S'abonner | Se connecter | Faire un don
> Logo ABP
ABP e brezhoneg | ABP in English |
Technopole Brest Iroise
Technopole Brest Iroise
- Chronique -
50 ans d'innovations industrielles en Bretagne
Le mouvement des bonnets rouges et certains plans sociaux récents sont venus renforcer l’image d’une Bretagne sur le déclin, rurale et désindustrialisée. Or, si l’agroalimentaire bat de l’aile en Bretagne,
Yann Petit Par Yann Petit le 15/04/14 22:11

Le mouvement des bonnets rouges et certains plans sociaux récents sont venus renforcer l'image d'une Bretagne sur le déclin, rurale et désindustrialisée. Or, si l'agroalimentaire bat de l'aile en Bretagne, ce n'est pas le cas des secteurs de haute technologie. Où en est la Bretagne de sa reconversion inespérée dans le high-tech ?

Il y a des entreprises que les Bretons considèrent un peu comme un patrimoine régional. Le fabricant de cosmétiques Yves Rocher n'a jamais renié ses origines bretonnes et le c½ur et l'esprit de l'entreprise sont toujours implantés à la Gacilly, dans le Morbihan. La marque de vêtements de sports bretonne Kana Beach a connu son heure de gloire dans les années 1990 et 2000. Après sa mise en liquidation judiciaire, nombre de Bretons se sont réjouis de la voir reprise par une autre entreprise régionale. Même l'Euro, utilisé d'un bout à l'autre de l'Europe, est un peu breton : l'imprimeur Oberthur, lui aussi breton, conçoit et produit des billets de banque, dont la coupure de 5 euros. Mais Oberthur Fiduciaire, dont les usines sont implantées à Rennes, illustre aussi une tendance inéluctable de la Bretagne depuis cinq décennies : le recours massif aux technologies dans les objets du quotidien, dont une partie non négligeable est « Made in Breizh ». Comme l'explique (1) Thomas Savare, directeur général d'Oberthur Fiduciaire : « l'impression fiduciaire et de sécurité est une activité industrielle à très fort contenu technologique. […] Ce sont de véritables condensés de technologie et le fruit d'une innovation permanente. »

Appartenant au trio de tête mondial de l'impression fiduciaire, 30 ans après sa reprise par la famille Savare alors que l'entreprise était au bord du gouffre, Oberthur Fiduciaire pourrait illustrer à elle seule cette renaissance de la Bretagne sur la base des nouvelles technologies. Plus aucun breton n'est surpris de voir la plus à l'Ouest des régions françaises cultiver les technologies comme les choux autrefois. De technopoles en pépinières de start-up innovantes, la Bretagne poursuit sa reconversion vers les nouvelles technologies, entamées il y a déjà longtemps.

Une tendance historique, publique et volontariste

Il fallait oser associer la Bretagne aux nouvelles technologies il y a 50 ans, alors qu'elle encore une terre fortement rurale, et presque arriérée dans certains coins de campagne reculés. Mais c'est pourtant le pari qu'a tenté le général de Gaulle, quand, à la fin des années 1950, il lance une grande initiative de désenclavement de la Bretagne. Cela commença par un désenclavement physique, avec la construction des quatre voies bretonnes gratuites, dont le statut spécifique est au c½ur du débat, pour l'instant gelé, sur l'écotaxe. Puis cela se poursuivit avec le désenclavement économique, via des pôles technologiques, centrés au début sur l'électronique et les télécommunications. Prenant appui sur les entreprises publiques, l'Etat français délocalise une partie des départements de recherche et développement des grandes entreprises, dans un mouvement national naissant de décentralisation.

Bien des années plus tard, Yves Guillemot, PDG d'Ubisoft, entreprise bretonne et accessoirement troisième concepteur mondial de jeux vidéo, note (2) que « c'est la nationalité de son équipe dirigeante, son éducation et sa culture qui déterminent celle d'une entreprise ». Nul doute que la culture bretonne, faite de légendes, de rêves et d'imaginaire peut inspirer un créateur de produits de divertissements. Mais l'environnement n'explique pas tout naturellement, et il a fallu très pragmatiquement installé en Bretagne des compétences et des infrastructures qui n'appartenaient pas aux paysages bretons granitiques.

Des télécommunications vers le numérique

Cela commença par le Centre National d'Études et Recherche en Télécommunications en 1959, à Lannion, qui devint en 2000 France Télécom R&D. Puis suivit en 1966 le Centre de météorologie spatiale et la R&D d'ATM dans les années 1980. Dans le même temps, Thomson CSF (futur Thalès), Sagem et d'autres s'installent en Bretagne. Ils sont accompagnés dans toute la région de prestataires de services et de fournisseurs en électronique. La Bretagne marque le pas dans les années 1990 avec l'essor d'internet au détriment du Minitel, inventé à Rennes au sein du pôle technologique Rennes-Atalante. Mais les années 2000 signent le retour des entreprises bretonnes dans la course technologique. Selon Manpower (3), « le numérique breton a progressé de manière spectaculaire : entre 2005 et 2010, le secteur a connu une croissance de plus de 25% ! Moins impactées par la crise, les PME ont créé plus de la moitié (52%) des emplois du bassin en 2012. »

Sur la base de compétences acquises en électronique et dans les télécoms, la région se tourne désormais vers le numérique. « C'est en Bretagne qu'ont vu le jour des technologies et des normes telles que Mpeg et MP3… A noter le rôle du Rennais Yves-Francois Dehery, un des 4 inventeurs du mp3 (voir le site) et son rôle dans le développement du mpeg pour la vidéo (voir le site) C'est elle aussi qui a mis au point la fibre optique spécialisée qui a permis la création de la télé-chirurgie », rappelle (4)Mathilde Daougabel, analyste Fusion-Acquisition chez SORFI – Fiteco. Il est vrai qu'il est beaucoup question d'optique en Bretagne avec notamment le cluster Photonics (5), qui « a permis de structurer et fédérer une communauté constituée à ce jour d'une cinquantaine d'acteurs industriels, académiques (formation et recherche) et institutionnels, dont une large moitié de TPE / PME très innovantes dans le domaine des technologies photoniques », selon les mots de son Président David Pureur. TNT et imagerie 3D ont la part belle dans les créations d'entreprises en Bretagne, d'Enensys Technologies et Teamcast, toutes deux conceptrices de produits technologiques pour la TNT, à Artefacto, spécialiste 3D des réalités virtuelles et augmentées. La Bretagne attire parce qu'elle est aussi une région à forte identité et à la qualité de vie avérée.

Un choix gagnant

Le taux de chômage de la Bretagne a continué d'augmenter en 2013 malgré les incantations politiques, mais il se situe toujours en dessous de la moyenne nationale, avec 9,4 % (6) de la population active contre 10.5 % à l'échelle du pays. La Bretagne continue malgré cela d'innover et d'investir, comme en témoigne la création en 2012 de l'Institut de recherche technologique B-Com : « Spécialisé dans les technologies de l'image, il doit générer la création de 2 000 emplois directs », explique (7) Vincent Marcatté, président d'Images et Réseaux, le pôle de compétitivité qui accompagne la filière. Le développement des nouvelles technologies en Bretagne s'appuie non seulement sur quelques mastodontes de la R&D comme Canon, Orange ou encore Alcatel-Lucent, mais aussi sur un réseau très dense de PME innovantes.

Fort de ce constat, l'INSEE ira jusqu'à titrer une partie son analyse Octant (8) d'octobre 2012 « Les PME bretonnes innovent plus qu'ailleurs, surtout dans les secteurs technologiques ». Nouvelle patrie des réseaux à très haut débit et des télécoms nouvelles générations (TNT et 3D notamment), la Bretagne offre un environnement et des infrastructures propices à l'émergence d'une filière d'excellence de niveau international. Les clichés oscillant entre élevages porcins à perte de vue et algues vertes aux nitrates sont loin.

Notes:

(1) (voir le site)

(2) (voir le site)

(3) (voir le site)

(4) (voir le site)

(5) (voir le site)

(6) (voir le site)

(7) (voir le site)

(8) (voir le site)

Voir aussi :
Breton exilé à Paris, je fais partie de la fonction publique dans la branche des collectivités territoriales, plus spécifiquement chargé des questions d'aménagement du territoire.
Voir tous les articles de Yann Petit
Vos 0 commentaires
Commenter :
Votre email est optionnel et restera confidentiel. Il ne sera utilisé que si vous voulez une réponse d'un lecteur via email. Par exemple si vous cherchez un co-voiturage pour cet évènement ou autre chose.
ANTI-SPAM : Combien font 4 multiplié par 6 ?

ABP

Publier

Nous suivre

2003-2024 © Agence Bretagne Presse, sauf Creative Commons