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Lettre ouverte au président Sarkozy
Lettre ouverte au Président Sarkozy Monsieur le Président, Je viens vers vous après avoir abîmé plusieurs lettres restées sans réponse, en espérant que celle-ci reçoive un traitement favorable. Vous vous êtes transporté, Monsieur le Président, à Hanovre pour inaugurer le Cebit, le plus grand salon mondial des nouvelles technologies. A l'adresse
Par Jean Yves Quiguer pour Mouvement fédéraliste de Bretagne le 6/03/08 10:01

Monsieur le Président,

Je viens vers vous après avoir abîmé plusieurs lettres restées sans réponse, en espérant que celle-ci reçoive un traitement favorable.

Vous vous êtes transporté, Monsieur le Président, à Hanovre pour inaugurer le Cebit, le plus grand salon mondial des nouvelles technologies.

A l'adresse d'Angela Merkel, vous avez déclaré : "Si nous réformons l'économie française, c'est bon pour l'Allemagne. Vous êtes un modèle, on va tout faire comme vous". "Il n'y a pas l'ombre d'une feuille de papier à cigarette entre nous".

La campagne électorale des présidentielles a été une opportunité exceptionnelle pour que vous puissiez exprimer publiquement vos valeurs et nous conservons tous en mémoire cette affirmation maintes fois réitérée que vous êtes un homme qui tient ses promesses, qui n'a qu'une parole.

Dans la capitale de Basse-Saxe, vous venez de vous engager à tout faire comme l'Allemagne.

Monsieur le Président, je vous prends au mot.

Vous prenez un pays fédéral pour modèle de réussite et je vous en sais gré.

S'agit-il de la rupture annoncée qui tarde à se manifester ?

Dès la fin de la Révolution française, on a assisté à la lente construction d'une strate sociale singularisée par l'emploi à vie, par l'occupation de fonctions politiques de responsabilités et la confiscation des fonctions dirigeantes dans les grandes entreprises privées et publiques. Le stato-centrisme qui entretient à grands frais cette couche sociale ne trouve appui que sur la dépense publique qui est devenue une préférence française.

Cette couche sociale vit à Paris, pense par Paris et n'imagine qu'elle. Elle a certes des ramifications dans le pays avec une administration pléthorique qui ne remplit pas d'autre fonction que de justifier les prérogatives des plus grands. L'avantage du plus petit sert de justification au privilège du plus grand.

La suffisance de cette classe sociale est un danger pour la France et pour l'Europe.

Un risque pour la France d'être condamnée aux déficits abyssaux et à un gonflement inexorable de la dette jusqu'à la mettre sous tutelle du Fonds Monétaire International.

Un péril pour l'Europe car la projection de la France dans l'espace européen se heurte aux volontés de nos partenaires qui ont, de cette Europe, une autre conception.

Il faut se faire une raison : les idées françaises ne sont pas majoritaires dans l'Union.

La conception moniste de la souveraineté, la passion pour l'indivisibilité, le refus du partage du pouvoir, ne sont plus seulement une spécificité française. Ils sont un vice et une infirmité.

L'Etat allemand repose sur une architecture fédérale dans laquelle les Etats fédérés (Länder) sont des acteurs administrativement autonomes. La souveraineté et les compétences des Länder ne sont pas déduites du pouvoir de la Fédération : elles sont, au contraire, originaires et attribuées par la Loi fondamentale. Cette conception pluraliste de la souveraineté se traduit par une pratique du compromis et de la coopération.

Le salon des nouvelles technologies auquel vous vous êtes rendu se déroule à Hanovre, en Basse-Saxe, et non à Berlin. L'aéroport de Francfort est le premier aéroport d'Europe desservant le plus grand nombre de destinations internationales. Sa fréquentation est de plus de 52 millions de passagers par an alors que le projet du BBI (Berlin Brandenburg International) dont la construction vient de commencer table sur 30 millions de passagers annuels en 2023.

Le citoyen allemand est peu confronté aux autorités fédérales alors qu'il a presque exclusivement affaire aux autorités du Land ou aux administrations communales qui agissent en leur nom.

Quand la nécessité d'une réforme est appréhendée au niveau local ou régional, son évidence ne fait plus question. Quand une volonté de réforme tente de s'imposer verticalement, de façon uniforme, elle se heurte aux résistances les plus farouches.

Le citoyen y voit la main de fer du Léviathan et il le ressent avec d'autant plus d'hostilité qu'il constate amèrement que les agents de l'Etat se trouvent toujours exonérés du moindre effort.

Le fédéralisme est un puissant levier de développement économique. Les PME allemandes, dont on reconnaît tous la supériorité, bénéficient directement du système fédéral. Non seulement l'innovation n'est pas enserrée sous des contraintes nationales, mais elle bénéficie du concours du Land que ce soit par le financement d'une banque régionale ou par une réglementation favorable, émise au plus proche des attentes.

En France, le contribuable et le consommateur sont toujours absents de toute considération. L'Etat omniprésent étouffe la société civile et le marché.

Nous n'avons pas la culture économique des Allemands.

La France ne s'est pas guérie du traumatisme de 1940. Hier on frappait les juifs, aujourd'hui on s'attaque aux pauvres et aux étrangers, à l'origine de nos maux. La méthode est identique : l'Etat salvateur et la figure de son chef providentiel.

Ce n'est pas l'Etat ni l'armée française qui ont libéré la France mais les alliés et les résistants d'avant 1944. Ce n'est pas l'Etat qui sauvera le pays de la ruine et du déclin, mais la société civile libérée.

Déjà en 1944, les alliés avaient compris que, de la Normandie, il leur fallait rejoindre le Rhin et ignorer Paris qui n'était ni le centre du monde ni même une préoccupation secondaire. Que serait Paris si toutes les voies ferrées n'y convergeaient pas obligeant tout voyageur ?

La société civile française n'est pas homogène. Elle présente des visages différents en fonction de son origine territoriale et culturelle. Quand les Bretons peuvent exceller dans un domaine, les Occitans peuvent se montrer plus ingénieux dans un autre.

Cette richesse qui devrait être notre force est en partie détruite par les monopoles étatiques comme celui de l'éducation nationale qui affiche pourtant des résultats calamiteux. C'est aussi vrai pour l'ANPE, pour nos hôpitaux, pour le transport ferroviaire….

Ce n'est pas la présence d'un Préfet, à la ville ou aux champs, qui préside à la naissance d'une entreprise. Quand c'est le cas, il s'agit alors souvent d'une forme de corruption. C'est l'esprit d'entreprise, l'initiative individuelle et le sens de l'association qui créent des richesses et des emplois.

« Vous êtes un modèle, on va tout faire comme vous » : non, Monsieur le Président.

Il n'y a pas une, mais plusieurs formes d'Etat fédéral sans qu'aucune puisse être considérée comme la forme type exclusive.

La seule véritable rupture consiste à inventer une forme qui convienne à nos histoires, à nos différences et à nos singularités et à nos géographies.

Le principe d'autonomie est à la racine de l'idée démocratique car le véritable fondement de ce système politique se trouve dans la liberté et non dans l'égalité. L'idée d'égalité signifie seulement que tous doivent être également libres.

La pensée est comme les belles plantes : elle ne se déploie que dans un milieu propice. Les Etats centralisés n'ont jamais réussi à favoriser durablement l'essor des sciences, des techniques et des idées en général. L'histoire montre que le progrès naît du polycentrisme. Il en est ainsi de la monnaie issue d'un accord entre certaines cités ioniennes, dont Milet et Ephèse et le royaume de Lydie.

Nous ne pourrons nous en sortir que si la France devient un archipel de lieux de vie et de savoir et non plus ce bloc monolithique froid et austère qui aujourd'hui vacille.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de ma très haute considération,

Le 5 mars 2008

Jean-Yves QUIGUER

Président du Mouvement Fédéraliste de Bretagne

Voir aussi sur le même sujet :
Le Mouvement Fédéraliste de Bretagne plaide et milite pour l'adoption d'une architecture fédérale en Bretagne, en France et en Europe. Membre de l'Union des Mouvements Fédéralistes (UMF), il défend le concept de fédéralisme contractuel dans le cadre des institutions et celui du fédéralisme intégral dans le cadre de la société. LE MFB n'adhère pas à l'idée d'une fédération d'états-nations qui n'est qu'une forme de confédération conduisant aux mêmes échecs que l'actuel état-nation dont nous allons prochainement porter le deuil. C'est ce qui justifie un fédéralisme inspiré de la doctrine contractualiste en opposition avec la doctrine étatiste. Ce qui est bon pour le tout, l'est aussi pour les parties. Il ne saurait exister de fédéralisme européen sans un fédéralisme local, d
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