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L'invasion Militaire Française de 1488 : lettre à La Trémoille, Lieutenant général de l'armée d'invasion
Au moment où les armées françaises entrent en Bretagne, au mois de mai 1488, l'annexion du Duché Souverain, pays étranger à la France, est préméditée de longue date. Louis XI ayant détruit les États bourguignons, en 1477, donne ordre à son fils, le dauphin Charles, d'attendre que les choses soient
Louis Melennec Par Histoire et Identité le 28/04/07 10:04

Au moment où les armées françaises entrent en Bretagne, au mois de mai 1488, l'annexion du Duché Souverain, pays étranger à la France, est préméditée de longue date.

Louis XI ayant détruit les États bourguignons, en 1477, donne ordre à son fils, le Dauphin Charles, d'attendre que les choses soient plus "mûres" pour faire "tomber" la Bretagne, pays détesté, mais bardé de forteresses sur toutes ses frontières, et allié à toutes les puissances voisines. A cette époque, contrairement à ce que l'on pense, les grands principes du Droit international sont déjà en place. On n'envahit pas un pays souverain n'importe comment, certainement pas parce qu'on possède comme seul argument d'avoir une armée plus puissante. Il faut se donner une raison plausible, au regard de la communauté internationale, pour déclencher la guerre, et mettre ses armées en action.

En 1487 et en 1488, le prétexte tant attendu se présente. Plusieurs grands seigneurs français, en délicatesse avec Anne Beaujeu, fille de Louis XI et soeur du jeune roi Charles VIII, qui gouverne la France d'une main de fer, se réfugient en Bretagne. Parmi eux: Louis d'Orléans, cousin du Roi et héritier de la couronne; Jean de Chalon, prince d'Orange ; Odet d'Aydie, comte de Comminges ; le comte de Dunois...

Officiellement, il s'agit, pour la France, de s'emparer de ces seigneurs, et de les punir. François II, duc de Bretagne, est sommé de remettre les "malveillants" du royaume aux officiers du roi, ou de les chasser de ses États. Le caractère chevaleresque du Duc a été décrit par les chroniqueurs: il refuse. On n'espérait pas tant: Anne de Beaujeu et Charles VIII ont enfin trouvé une raison suffisante pour faire marcher les armées françaises contre la Bretagne. Par Traité, le roi s'engage à retirer ses troupes dès que le duc d'Orléans, le comte de Dunois, le prince d'Orange, le comte de Comminges et leurs gens auront quitté le pays.

Mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Le prétexte est trop beau; il risque de ne pas se renouveler avant longtemps: on va donc faire marcher les troupes, tout détruire, et, si possible, tout conquérir. C'est une nouvelle félonie à l'égard de la Bretagne. Mais celle-ci va être fatale au Pays. Le processus étant enclenché, ne se terminera qu'en 1532, par une annexion fallacieusement déguisée en Traité.

La preuve péremptoire des intentions françaises résulte de la lettre du roi Charles VIII, en date du 11 mars, nommant Louis de La Trémoille Lieutenant Général de l'Armée du Roi en Bretagne. Cette lettre est terrible. Dans le processus actuel de réappropriation par les Bretons de leur véritable Histoire, elle est d'un poids considérable. Les faits sont aggravés par les considérations suivantes:

- La Bretagne est un pays pacifique; son seul désir est d'être en paix avec ses voisins; - En accordant le droit d'asile à quelques seigneurs français, le Duc ne fait que son devoir. Ce droit d'asile est traditionnel, et d'ailleurs bilatéral . On en trouve les premières traces dans Grégoire de Tours (au VIe siècle !). La France, de son côté, agit de même, en accueillant sur son sol les seigneurs mécontents fuyant leur pays. Au cours des décennies qui ont précédé, elle a, notamment, accueilli nombre de Bretons, en particulier l'ennemi le plus virulent du Duc : son propre beau-frère le Vicomte Jean II de Rohan. Il s'agit donc bien d'un prétexte, en aucun cas d'une raison légitime. La Bretagne, au demeurant, ne dispose pas d'une armée suffisamment puissante pour agresser la France, et n'a aucune intention de le faire. Le Duc, selon les chroniqueurs, est "bon homme", et n'a nulle intention de se lancer dans une aventure pareille. Le mensonge des Français est patent. Or, le droit de l'époque interdit les guerres sans objet légitime, destinées à nuire, à plus forte raison de s'emparer des États et des territoires d'autrui. Ces guerres sont considérées comme des "voleries" (= des vols, en français moderne). Le Duc de Bretagne est souffrant, depuis des années. Ses filles sont mineures. Le devoir impératif du roi de France est de protéger ses deux jeunes parentes. Au contraire, la France met à profit l'état de vulnérabilité de la Bretagne pour l'envahir.

En termes moraux, l'entreprise est ignoble, à tous égards. En termes juridiques, la guerre faite à la Bretagne, est une guerre injuste : elle n'a aucun objet légitime ; elle n'est pas destinée à corriger une injustice ; elle n'a pas pour objectif de ramener la paix, mais de faire la guerre ; elle poursuit le but, non dissimulé, de faire le mal, et de s'emparer du bien d'autrui.


Sources :

– Alain Bouchart, Les Grandes Croniques de Bretaigne, composées en l'an 1514. Réédition de Nantes, 1886, par la Société des bibliophiles bretons ;

– Dom Morice, Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, Paris, 1756 ;

– Arthur Le Moyne de La Borderie. Réédition Coop Breizh, 1998 ;

– Paul Pélicier, Essai sur le gouvernement de la Dame de Beaujeu (1483-1491). Chartres 1882 ; réédition de Genève, 1970 ;

– Marc Chombart de Lauwe, Anne de Beaujeu. Paris, 1980 ;

– Yvonne Labande-Mailfert, Charles VIII. Paris, 1986.

– La lettre de Charles VIII à Louis de la Trémoille se trouve (pièce 201) dans le précieux ouvrage : Correspondances de Charles VIII et de ses conseillers avec Louis II de La Trémoille pendant la guerre de Bretagne. Paris, 1875 ; Genève, 1978.


Dr Louis Melennec

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Histoire et Identité est un groupe d'historiens bretons dont le but est de restaurer la vérité sur l'Histoire de Bretagne. Le fondateur du groupe est le Dr Louis Melenec, docteur en droit et en médecine, diplômé d'études approfondies d'histoire, diplômé d'études supérieures de droit public, de droit privé, de droit pénal, ancien chargé de cours des facultés de droit et de médecine, ex-consultant prés le médiateur de la République française, ancien éléve de la Sorbonne et de l'École des Chartes de Paris.
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