Disparition de Jean Laugier
Poète et dramaturge, Jean Laugier est mort à Paris le 20 août dernier à l'âge de 82 ans. Membre de l'Association des écrivains bretons et très attaché à la Bretagne, il en avait encore témoigné à maintes reprises ces dernières années par des conférences vibrantes de passion sur la littérature de Bretagne. Né à Saïgon le 11 juin 1924, Jean Laugier était en effet provençal par son père et breton par sa mère, Marie-Louise Auffret, et, ayant perdu très tôt ses deux parents, c'est en Bretagne, à Lorient, qu'il fut élevé par sa grand-mère maternelle. Il devait rester durant toute sa vie profondément marqué par la Bretagne. Ayant ressenti de bonne heure une vocation pour le théâtre, il suivit, après des études classiques, les cours dramatiques de Julien Berthaud et fit une carrière de comédien au théâtre et à la télévision. En même temps, il développa une ½uvre poétique qui lui valut dès 1949 le prix Saint-Pol Roux, puis en 1959 le prix René-Guy Cadou, en 1961 le prix Fénéon, en 1979 le prix Apollinaire, puis le prix Charles Vildrac de l'Académie française et bien d'autres encore.
Après avoir donné plusieurs poèmes à Pierre Séghers pour sa revue Poésie 40 et fait paraître Le Désossé en 1949, il avait fait paraître un premier recueil en 1952 : La Huitième couleurs, suivi de nombreux autres recueils : L'Espace muet (Séghers, 1956), Les Bogues (Gallimard, 1964), L'Autre versant (Caractères, 1970), Margelles de l'aube (Caractères, 1973), Le Retable des quatre saisons (Saint-Germain-des-Prés, 1976), Rituel pour une ode (Caractères, 1978), Itinéraire d'un poète (id., 1980), Le Verbe et la semence (id., 1982), Théâtre 1, 2 et 3 (id., 1981, 1984 et 1986) ? Mon théâtre et ses miroirs (id., 1985),Visages d'une écoute (id., 1987), Les Navires du temps (id., 1989), Fenêtres, vos regards (id., 1992), etc.
Jean Laugier avait bien connu Théophile Briant qui l'avait encouragé à ses débuts en poésie, et il était un grand ami de Charles Le Quintrec qui en parlait ainsi dans sa belle anthologie Littératures de Bretagne (Ouest-France, 1992) : "Fils de Hugo et de Vigny, plus encore que de Claudel, fils de Verlaine à maints égards, il y a en lui un penseur formaliste et un clown amusé. Le rythme et la rime sont bellement sollicités. La prosodie est à son affaire. Les images sonores peuvent alterner avec les métaphores promothéennes. Mais il arrive que la grave voix prenne - non sans ironie - la manière de ce poète qui disait : "Je ris en pleurs."
ABP/BLN
Philippe Argouarch