Vite : ne faisons rien…
Il y a quelques semaines le premier ministre évoquait la faillite de la France sans pour autant créer d'émotion. Très vite, le service de la communication reprenait la main et il n'était alors question que de difficultés conjoncturelles surmontables.
C'est un crime de lèse-majesté de douter de l'immuabilité de la France, de sa grandeur pérenne à la face du monde, de son universalité enviée de tous.
Il est urgent de ne rien faire, monsieur Fillon et vous auriez dû suivre à la lettre les propos d'un Henri Queuille, qui a été président du Conseil dans la IV° République et qui disait « qu'il n'y a pas de problème qu'une absence de solution ne finisse par résoudre » .
La dernière enquête PISA (Programme for International Student Assessment- Programme international d'évaluation des scolaires) menée par l'OCDE en 2006, vient d'être rendue publique. La France se distingue par la médiocrité de ses résultats qui s'aggravent depuis les précédentes études de 2000 et de 2003. En tête du classement on trouve la Finlande, la France se situant en dessous de la moyenne des 57 pays étudiés.
La France n'est pas un modèle : ses enseignants n'obtiennent pas la moyenne. Difficile de se pavaner comme le parangon d'une humanité cultivée avec des résultats aussi médiocres.
La Suisse, l'Allemagne et le Japon, après avoir obtenu, en2003, des bilans insatisfaisants dans certaines matières, ont réagi et mis en place des réformes.
En France, la réaction est différente. Les résultats ne traduisent que l'absence de sérieux de l'enquête. Il ne peut en être différemment.
Après tout, qui sont ces manants internationaux qui s'autorisent à évaluer l'école de la très grande et remarquable République Française ?
On comprend mieux pourquoi aux yeux du monde l'arrogance française, après avoir été un sujet de discussion amicale et de raillerie, devient la cause d'une dissension alarmante.
Ignorons ce que modèle veut dire, et parlons du pays qui obtient les meilleures performances. Il s'agit de la Finlande.
La particularité du système éducatif finlandais est qu'il s'agit d'un système fortement décentralisé, où l'autonomie des établissements et des élèves est affichée et le développement des compétences préféré à celui des connaissances.
L'enseignant finlandais délègue le plus possible du travail et de la responsabilité aux élèves : les enfants sont au cœur de l'activité scolaire. C'est le contraire en France : le travail semble être centré sur l'enseignant, tout passe par lui, il contrôle tout. Les maîtres mots sont : autonomie, responsabilité, confiance, échanges. L'apprentissage classique (recopiage, « par cœur » ) est prohibé. La collaboration entre les élèves est encouragée, plutôt que leur mise en compétition. Entre les Finlandais, pas de rivalité, pas de compétition, moins de pressions : « Les progrès sont mis en valeur, les échecs n'étant pas soulignés. » (L'école en Finlande : Cahiers pédagogiques, n°432, avril 2005)
Ce modèle avec régulation étatique et autonomie des acteurs est largement défendu par les experts de l'OCDE et inspire particulièrement les réformes italienne et allemande.
Ce qui fait dire à certains chercheurs, tenants de l'Etat-providence, comme Georges Soleaux, chercheur à l'Iredu (université de Bourgogne), que ce modèle témoigne de l'infiltration de l' idéologie libérale qui fait de sa valeur essentielle « l'efficacité au détriment peut-être de l'équité du système éducatif »
L'efficacité du système finlandais trouve son origine dans ce qui constitue le fondement de la pensée du fédéralisme intégral : autonomie, responsabilité, confiance, échanges.
Le monstre de l'éducation nationale que défend G. Soleaux, et avec lui la plupart des enseignants, car cette hydre maximise leurs intérêts, est une bête infernale, budgétivore, conservatrice, réactionnaire, soviétiforme, qui produit et entretient des incompétences institutionnalisées.
Dans une Bretagne état fédéré d'une France fédérale, il n'existerait plus d'éducation « nationale » .
Un pays est parvenu à la maturité quand un questionnement sur la qualité de son système éducatif est possible. En France, l'exclusion d'un possible débat tient à la fiction de la nation française qui interdit tout questionnement sur son architecture : il en ruinerait les fondations.
La Bretagne aurait alors à définir non seulement les contenus de ses programmes, mais la philosophie éducative qu'elle engagerait, qui, plus qu'une méthode ou un système, davantage que des pratiques, donnerait du sens aux libertés de chaque Breton qu'elle garantirait.
Terminons par une réalité que nous livre le rapport PISA.
Les élèves francophones de la Belgique sont en deçà de la moyenne, alors que les élèves de la communauté flamande obtiennent un score supérieur.
Doit-on en déduire qu'il nous faille définitivement abandonner la langue française et que l'avenir de la Bretagne passe par le Breton et ne passera que par lui ?
La question est posée…..
Le 7 décembre 2007
Jean-Yves QUIGUER
Président du Mouvement Fédéraliste de Bretagne