La Bretagne est une terre de légendes, on aurait pu justement concrétiser l'un de nos songes, ce samedi 31 mars 2007. En attendant, on peut en faire un remarquable poisson d'avril. Imaginez le tableau, les journaux auraient titré "une mobilisation historique pour la langue bretonne !" Après plusieurs mois de concertation avec les principales associations et organisations que compte la Bretagne, puis s'étant assurés de soutiens internationaux, les tenants des écoles Diwan ont pu réunir plusieurs milliers de manifestants en plein centre-ville de Lorient. Les défenseurs du breton ont défilé devant les principales administrations de la ville et permanences de partis politiques en lice pour les élections présidentielles. L'apogée de la journée fut la fusion du cortège avec celui des supporters des Merlus, victorieux contre le légendaire OM, à la sortie du stade du Moustoir. Dans une ambiance digne des meilleurs crus du Festival Interceltique de Lorient, jusque tard dans la nuit, la Bretagne a fêté une victoire, celle de la relève. Une véritable démonstration de force dans les rues de la ville du président de la Région Bretagne qui poussera les élus à s'engager pleinement pour la Bretagne, pour nos enfants et contre les nombreux barrages et embûches mis en travers de notre route, contre l'Etat immuable. Hélas, tout ceci n'est que fiction !
En vérité, nous avons eu droit à une enième manifestation traîne-savate et nous avons excellé à dévoiler une machine à perdre. Les dirigeants de Diwan Breizh avaient accepté de plier face aux demandes de quelque élu ou représentant préfectoral : le parcours emprunté a évité le centre-ville pour s'enfoncer dans des quartiers résidentiels et des zones commerciales périphériques. L'art de la tartufferie poussé à son comble, on entend remercier les élus et dénoncer d'autres, fondamentalement anti-breton mais bien moins hypocrites. A toute cette mascarade s'ajoutait un ordre de mobilisation flou, crédule, et sans consistance. Comment peut-on brosser des élus dans le sens du poil alors que nous n'avons droit qu'à du bricolage. Comment peut-on accorder le moindre crédit à une structure qui croit encore de l'Etat français la modification de la Constitution, la ratification de la Charte Européenne des langues minoritaires, et l'obtention d'un statut public pour Diwan ? Allons-nous aussi demander tout cela en cadeau au Père Noël ? Doit-on continuer à tromper les gens, les rassurer alors que nous avons la possibilité d'agir directement sur les institutions locales pour faire intégrer le breton ou à défaut de tourner le dos à la machine France.
Pour mémoire, nous avions dressé, début mai 2006, le bilan du Conseil Régional qui reste toujours inchangé :
- Le CRL (Centre Régional du Livre) est en liquidation. Il avait remplacé une des fonctions principales de l'Institut Culturel de Bretagne, retirée par M. Josselin de Rohan dans sa croisade anti-bretonne.
- Un autre coup dur porté à l'édition bretonne est la disparition des éditions An Here, principal fournisseur de livres en breton pour les écoles et unique éditeur de dictionnaires monolingues en breton. L'arrêt définitif de l'activité de cette maison d'édition entraîne par le même biais la dispersion du conseil scientifique pour la langue bretonne, véritable académie qui réunissaient les principaux experts en linguistique bretonne.
- Le gel des subventions aux structures constituant les clefs de voûte de l'avenir de la culture bretonne : Institut Culturel de Bretagne, Office de la langue bretonne… (subvention revue finalement à la hausse pour ce dernier).
- La diminution du temps des émissions créées en Bretagne et du breton dans l'audiovisuel. Malgré cela, aucun projet n'est porté par les élus dans ce domaine.
- Aucune avancée dans la réunification administrative demandée par les Bretons. Les très coûteux et artificiels Pays-de-la-Loire nous envahissent toujours de leur propagande.
- Une onéreuse revue régionale, dénoncée par les acteurs culturels bretons, qui expose strictement le contraire des engagements pris par cette majorité au Conseil de Région.
- Autre promesse sans effet, atteindre 20 000 enfants bilingues en une poignée d'années alors que la Région n'a demandé aucun pouvoir ni rien reproché à l'État en matière d'éducation. La rentrée 2006 s'annonçait très mal : 3 nouveaux postes pour les écoles Diwan, 2 postes de suppléant pour Div Yezh dans les écoles publiques et, dans le feu de l'actualité à cette époque, la filière Dihun dont le sort reposait sur les épaules de Yannig Baron et les nombreuses marques de soutiens quotidiens à son égard.
Nous concluions donc : La politique culturelle de la nouvelle majorité régionale et de ses alliés se solde donc par un bilan catastrophique. Le passé a indiqué aux Bretonnes et aux Bretons l'impasse dans laquelle les centrales politiques parisiennes nous ont mené à plusieurs reprises.
Paradoxalement, l'unique avancée significative de ces dernières années concerne la décision de mettre en place une signalisation bilingue prise par la majorité UMP du Conseil Général du Morbihan et de son président, M. Joseph Kerguéris… mais à quel prix et au bout de combien de décennies de retard sur d'autres départements ! (Bemdez, 4 mai 2006).
Certes, des subventions ont été allouées depuis M. Jean-Yves Cozan, vice-président de Région, puis reconduites, voire légérement augmentées par la nouvelle majorité de gauche. Cela vaut-il la peine de se prosterner devant ces élus quels qu'ils soient pour nous avoir administré leur morphine ? L'argent ne manque pas, celui de nos impôts est gaspillé en Ile-de-France. Nous gagnerons que lorsque nous serons à même de prendre le problème à sa base.
Pour Bemdez,
Herve Bossard.
(membre de l'association Bemdez, condamné par ailleurs à payer un lourd tribut pour avoir participé aux actions de Stourm Ar Brezhoneg).
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