On comprend qu'une monnaie forte par rapport aux autres renchérit les exportations, et en revanche facilite les importations qui deviennent moins coûteuses.Une monnaie forte attire par ailleurs des capitaux du monde entier qui viennent trouver une rémunération et une sécurité attrayantes. C'est précisément ce qui arrive à l'euro. Mais en rester là serait trop simpliste.L'euro et la Banque Centrale Européenne sont des boucs émissaires faciles pour un monde politique qui ne comprend pas le monde du travail. C'est vrai que l'Europe, surtout depuis le « Non » français au référendum, est sans tête politique et que d'autres pays peuvent avoir une stratégie monétaire plus volontariste. Mais la B.C.E. qui décide des taux est, comme la plupart des banques centrales (en théorie), indépendante du pouvoir politique. Sa mission est d'abord d'empêcher le retour de l'inflation. Dès que des craintes de surchauffe apparaissent, la B.C.E. augmente les taux de prise en pension, ce qui contribue à valoriser l'euro, surtout dans un monde où de grands pays laissent filer leur monnaie ; c'est le cas du yuan chinois, ce qui accroit encore la compétitivité de la Chine.
Mais l'euro fort n'a pas le rôle dévastateur que les politiques français lui prêtent.D'abord parce que le commerce extérieur de la France, comme celui des autres pays européens, est dirigé à 70 % vers la zône euro. Ensuite parce que l'euro minimise le prix de certaines importations indispensables, comme le pétrole. La hausse récente du pétrole a été considérablement adoucie par la hausse de l'euro.
Enfin parce que l'euro mutualise les fautes et les fait payer par tout le continent, adoucissant ainsi la facture du pays qui les commet, encourageant au demeurant, par l'impunité qu'il procure, les fautifs à persévérer dans l'erreur. Par exemple l'euro est entré en vigueur en France en même temps que les 35 heures. Normalement, le franc aurait dû être attaqué, mais c'est l'Europe, collectivement, qui a payé l'erreur de la France par le biais de l'euro.
Les raisonnements que l'on entend au Parti Socialiste, ou à l'UMP, datent de 20 ans. Aujourd'hui, le monde s'est ouvert et une dévaluation de l'euro n'aurait pas d'impact. Ainsi, les bulles que l'on voit dans l'immobilier et à la Bourse, où les fusions et acquisitions se multiplient comme jamais, viennent de la facilité que l'on a à acheter du yen ; le taux de prise de pension de la Banque du Japon est de 0, 50 % ; il n'est donc pas difficile de trouver des investissements dont on attend un retour supérieur. Mais, dira-t-on, il y a quand même 30 % des exportations qui se font hors de la zône euro. Et nous, les Bretons, comme nation maritime, nous y sommes particulièrement sensibles. On ne peut pas nier qu'au-delà d'un certain seuil d'appréciation de l'euro le commerce extérieur de la Bretagne serait pénalisé. Mais qu'est-ce qui gêne le plus les entreprises aujourd'hui, l'euro ou l'Etat ? On vient de voir Nicolas Sarkozy à Toulouse rechercher, dans l'affaire du pilotage d'Airbus, des compromis soit disant « gagnants-gagnants » , avec la chancelière allemande Angéla Merkel qui, elle, s'est déclarée défavorable aux « interventions inappropriées » . Seules comptent, en effet, les compétences et non les arrangements politiques. On a, hélas, vu récemment les résultats du choix dû à l'amitié qu'avait fait Jacques Chirac en plaçant Noël Forgeard aux commandes d'Airbus. Les Français pensent qu'il est important qu'un français préside l'EADS. Nous, Bretons, qui avons quand même sur notre sol, les usines de Nantes et de Saint-Nazaire, et de nombreux sous-traitants, pensons que le patron d'Eads doit d'abord être très bon, créer des richesses et des emplois, quelle que soit sa nationalité : espagnole, belge, argentine ou polonaise....
C'est une différence notable entre nos deux peuples. Rappelons que l'Allemagne, qui a maintenant digéré l'ex-RDA, n'est absolument pas gênée par l'euro fort. C'est donc bien dans les politiques de la France, qu'il faut chercher la cause de la non-compétitivité mondiale de nos entreprises.
En outre, la profitabilité des entreprises françaises n'est réinjectée, ni dans leur productivité, ni dans la recherche, mais dans l'Etat le plus fiscalisé d' Europe, dans ses privilèges et son incompétence. Les analyses malthusiennes de Monsieur Sarkozy ont des décennies de retard, quand un pays pouvait encore abriter sa médiocrité derrière des frontières. Aujourd'hui le monde est ouvert et les Français découvrent douloureusement la France telle qu'ils ont refusé de la voir pendant des années.
Nous, au Parti Breton, sommes partisans de l'indépendance de la Banque Européenne. La compétitivité de la Bretagne n'est pas à chercher du côté de l'euro, mais bien des charges insupportables imposées par et pour l'Etat français.
Pour le Parti Breton, le président, Gérard Olliéric