Jean-Yves Cozan, figure flamboyante du courant centriste et régionaliste de la droite finstérienne et bretonne, n'est plus.
On pouvait pourtant le croiser, la semaine dernière, amaigri, mais le propos encore vif, attablé au Ceili, célèbre pub quimpérois près duquel il habitait. Il pouvait voir tous les jours la plaque de rue apposée par ses amis en 1995 indiquant "Place de la Cozanie centrale", en référence à un dessin de Nono.
Central, il l'était à plusieurs titres : longtemps député de la bande centrale finistérienne, vedette d'un groupe centriste qui appuyait le RPR au conseil général, dont il fut l'influent vice-président.
C'est en promoteur déterminé de ce qui pouvait être une bretonnité sans complexes, qu'il a gagné le surnom de "député Diwan". Il n'est pas douteux qu'en faisant apporter une aide financière importante au réseau des écoles bilingues, il a aidé à consolider l'enseignement en breton qui était dans une phase critique. Sans la politique du Conseil général, le collège Diwan du Relecq-Kerhuon n'aurait pu se développer et essaimer et, sans l'appui comme conseiller régional Jean-Yves Cozan, il n'y aurait pas eu de lycée Diwan à Carhaix. Les filières bilingues publiques et privées ont reçu des aides appropriées.
Ferme dans ses convictions conservatrices (il n'hésita pas à appuyer le discours sécuritaire de Charles Pasqua en 1993), il n'était pas sectaire et se vantait "de mettre de l'argent sur tout ce qui bouge" (en matière culturelle). Il détonnait sur ses frileux collègues en politique en proclamant ses idées régionalistes, qu'il n'hésitait pas à rapprocher de l'autonomisme.
Il a été aussi le promoteur de liens avec la Chine et a aidé à la création d'une école de managers tournés vers l'Asie (l'Isuga, à Quimper).
D'une stature imposante visible dans les manifestations pour la culture bretonne, il était célèbre pour son écharpe blanche et pour sa manière personnelle d'établir le contact : tutoiement facile, invitation à rentrer dans un bistrot où, parfois, se faisaient les décisions d'aide financière. Il a sauvé l'existence du Parc naturel régional d'Armorique et favorisé la création des 5 domaines culturels du Département, en particulier, l'Abbaye de Daoulas, lieu d'expositions de qualité internationale.
Né au Conquet en 1939, il commence comme journaliste, puis dirige un hebdomadaire d'informations locales (Le Courrier du Léon-Le Progrès du Finistère). Il devient le dauphin d'André Colin, figure centrale de la démocratie chrétienne des années 50 et 60 et hérite de son siège de conseiller général de Ouessant. En 1997, il est battu par Kofi Yamgnane aux élections législatives. Il est inquiété pour des détournements mineurs d'indemnités au Conseil général et perdra dans la tourmente ses prérogatives importantes. Il est cependant vice-président de la Région Bretagne en 1998 et y mène une politique sur "l'identité bretonne". Aux élections sénatoriales de 1998, il emmène une liste de droite dissidente, une sorte de rétorsion vis-à-vis du RPR qui l'a laissé tomber. Une fois que le Parti socialiste aura conquis l'assemblée départementale, il deviendra un vieux sage, laissant les rênes du groupe centriste à Michel Canévet, récemment élu sénateur Union des démocrates et indépendants (UDI), maire de Plonéour-Lanvern.
Sa fille, Isabelle Le Bal, est une figure très connue de la politique quimpéroise, première adjointe au maire, qui a les mêmes convictions que son père, tant au niveau général qu'en ce qui concerne la Bretagne et la culture betonne.
Jean-Yves Cozan avait donné une interview filmée à l'Agence Bretagne Presse en mai dernier ( voir notre article )
Christian Rogel
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