Dehors une cinquantaine de militants cégétistes, trotskystes de la LCR (Ligue Communiste Révolutionnaire) et du groupe indépendantiste breton Emgann étaient tenus à l'écart par un cordon de police, mais à l'intérieur la ministre de la Culture, Christine Albanel, en prenait plein les oreilles. Les attaques, toutes aussi vocales, furent plus feutrées, voire inattendues. Les socialistes qui gèrent la ville et le département avaient décidé de ne pas ignorer la campagne électorale des municipales qui bat son plein.
Edmond Hervé, au milieu de son allocution se demanda : "Comment" (le président Sarkozy) " peut-on affirmer que les racines de la France sont essentiellement chrétiennes ? ". " Elles sont au moins judéo-chrétiennes " dit-il. "Les Juifs ont payé assez cher pour qu'on ne les oublie pas. Ne faisons pas preuve d'intolérance à l'égard des millions de musulmans qui vivent en Europe. " ajouta t-il.
Quant à Didier Le Bougeant, le vice-président du conseil général d'Ile-et-Vilaine, il rappela que " De Gaulle décréta une journée de deuil national à la mort de Paul Valéry" et que " Pompidou citait Éluard, et Jacques Chirac, de la poésie japonaise". Il fit remarquer qu' "Aujourd'hui, le président de la République ne salue pas la disparition de Julien Gracq et semble abandonner toute ambition pour l'art en France. "
Jean-Yves Le Drian, président de la région a tenu a rapeller que "la culture bretonne n'est pas la cerise sur le gâteau" mais est bien "constitutive de la culture EN Bretagne". Le TNB "c' est la Bretagne qui se fait" a t'il affirmé en terminant par la fameuse proclamation de Xavier Grall : "Nous te ferons Bretagne !".
Aucun des intervenants de la soirée, y compris le directeur du TNB, François Le Pillouër, ne rappela l'importance du théâtre en Bretagne et sa longue tradition. Au XVe siècle, après avoir découvert et adopté le drame religieux, la Bretagne s'y plait tellement qu'il y est encore en pleine prospérité au XVIIe, alors que le théâtre avait disparu peu à peu en France, interdit par le parlement de Paris. Ce n'est que grâce à Émile Souvestre que l'on redécouvrira l'existence de ce théâtre, un des plus riches en Europe, très tard au XIXe. Le théâtre breton est même une part essentielle de la littérature bretonne en breton.
La ministre de la Culture, venue spécialement pour cet événement, s'est contentée de saluer la créativité culturelle de Rennes. Elle a salué la qualité et l'excellence du TNB, "une des plus grandes institutions culturelles". Elle a reconnu que cette richesse était aussi dû au fait que "en Bretagne, la culture est consubstantielle à la région" et que ce TNB avait une vocation européenne. Elle a aussi confirmé et garanti que le niveau des subventions et des aides de l'État serait maintenu. "Je suis personnellement engagée pour le théâtre" a affirmé avec force la ministre. L'État finance le fonctionnement du TNB au niveau de 50 %.
Philippe Argouarch