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- Communiqué de presse -
Censure de la loi sur les langues régionales : De la souveraineté du peuple à l’Etat souverain
62 députés ont saisi le Conseil Constitutionnel d’un recours « concocté » par le cabinet du Ministre vexé et non habilité pour cela, après une pêche aux signatures dont la presse a révélé que plusieurs pouvaient être écartées rendant la saisine irrecevable.
Par Jacky Flippot pour Institut Culturel de Bretagne le 26/05/21 13:26

Après de multiples tentatives de propositions de loi qui n’ont jamais été programmées pour être soumises à la discussion parlementaire, la proposition de loi portée par le député Paul MOLAC et son groupe Libertés et Territoires intitulée Loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion a pu être débattue non dans difficulté devant les deux chambres du Parlement. En première lecture à l’Assemblée Nationale, elle est votée après rabotage des dispositions majeures qu’elle contenait. Seule la faculté de faire enregistrer les prénoms dans les actes de naissance dans l’orthographe d’une langue régionale était retenue.

Le Sénat va rétablir une grande partie des propositions écartées par l’Assemblée nationale en séance le 10 décembre 2020. Elle sera votée par 253 voix contre 59. Elle revient en 2ème lecture à l’Assemblée les 7 & 8 avril 2021. Pendant les débats, les opposants et le Ministre de l’Education nationale vont multiplier les amendements pour modifier le texte du Sénat. S’ils étaient adoptés, le texte repartait pour une nouvelle « navette » et la loi, comme d’autres avant elle finirait à la poubelle sans avoir été définitivement adoptée. Echec de la manœuvre, elle est finalement adoptée dans les termes du texte du Sénat par 253 voix émanant de la plupart des groupes (dont 100 LREM). Fin de partie : La représentation nationale a tranché étant rappelé que selon la Constitution, La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants (art.3). Il ne restait plus au Président qu’à la promulguer dans les 15 jours. Que nenni !

À la veille de l’expiration du délai, 62 députés ont saisi le Conseil Constitutionnel d’un recours « concocté » par le cabinet du Ministre vexé et non habilité pour cela, après une pêche aux signatures dont la presse a révélé que plusieurs pouvaient être écartées rendant la saisine irrecevable. Le recours ne visait qu’une seule disposition mineure de loi. Sur avis du gouvernement, cette mesure sera déclarée conforme et le moyen rejeté. Un leurre, le Ministre savait que le Conseil Constitutionnel pouvait d’office contrôler l’ensemble de la loi. Ecartant les irrégularités de signatures (en modifiant sa position antérieure), il va censurer plusieurs articles sur l’enseignement en langue régionale, mais aussi les accents des prénoms en langue régionale sur les actes d‘État-civil, quand cette règle ne résulte que d’une circulaire ministérielle sans valeur normative, et que ce point faisait consensus pendant les débats parlementaires.

Entre deux principes constitutionnels, l’article 2 qui énonce La langue de la République est le français et l’article 75-1 qui énonce les langues régionales appartiennent patrimoine de la France , s’en tenant au seul article 2, inséré dans la constitution de 1958 en Juin 1992, le Conseil Constitutionnel nous renvoie au Décret du II Thermidor An II, voté à la fin la période de « la Terreur » , une semaine avant la chute de Robespierre, décret suspendu quelques semaines plus tard et jamais rétabli… ce qui n’empêche par l’exécutif de considérer qu’il est toujours en vigueur. Il est vrai que le principe de l’article 2 a généré des lois d’application dont la loi Toubon. C’est ce qu’aurait été la loi Molac …

Ainsi va aujourd’hui la démocratie en France aujourd’hui, avec un ministre qui instrumentalise les représentants du Peuple pour lui servir de paravent, et un Etat qui dispose d’un Conseil pour s’opposer à la volonté de ces représentants du Peuple Souverain, dont la légitimité ne résulte au demeurant que de leur nomination à la discrétion de 3 personnes, le Président de la République, celui du Sénat et celui de l’Assemblée nationale. Un parlement sous tutelle.

Dans le cas présent, siégeaient 8 membres sur 9 dont 4 énarques parmi lesquels 2 anciens premiers ministres. Ainsi la loi est-elle à la main, pour ne pas dire plus, d’une caste de hauts fonctionnaires concentrés dans la capitale qui régulent l’expression du Peuple Souverain.

Elle n’est que l’expression du repli identitaire d’un Etat empreint de parisianisme et d’uniformité qui, échouant à contenir l’envahissement de l’anglo-américain, prend sa revanche sur ses langues classées comme en péril, les enfermant au musée du patrimoine, tel un coq dressé sur ses ergots pour exhiber sa crête et affirmer sa suprématie. Chacun sait que cet animal de basse-cour est le fétiche de la France.

Nous vivons sous la tutelle et la protection d’un Etat cornaquant les citoyens depuis ses hôtels de fonction, hérités de l’Ancien Régime, considérant qu’il régissent des territoires et gèrent des populations grâce aux forces de l‘Ordre qui s’appelaient auparavant des Gardiens de la Paix. Une société répartie entre protecteurs n’est pas une société démocratique, c’est une société féodale. Dans une démocratie, il n’y a pas de « maître des horloges » ni de chef de l’État (1), ni de pouvoir régalien, seulement un Peuple Souverain.

Une anecdote historique pour terminer : Charles DE GAULLE fondateur de la Vème République a prononcé son dernier grand discours de Président de la République à Quimper le 2 février 1969 dans lequel il s’est adressé à ses auditeurs en breton.

Paul Molac et ceux qui ont voté la loi très majoritairement ont exercé le mandat reçu du peuple souverain.

NOUS LES SOUTIENDRONS !

Finissons dans l’humour. Définition du mot macron : n.m. Signe diacritique placé au-dessus d'une voyelle pour indiquer un son long ; il prend la forme d'une barre horizontale (-) placée généralement au-dessus d'une voyelle , il s'oppose à la brève. Hélas, il ne figure pas dans la circulaire ministérielle, mais il est en bonne place dans la signalisation publique de la Place de Kyõto en bord de Seine au cœur de Paris.

(1) Ce titre n’a existé en France qu’entre 1940 et 1944 sous le régime de l’État français. son usage courant dans certains médias pour désigner le Président de la République ne montre que la limite de leur vocabulaire.

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