Suite aux révolutions en Tunisie, en Égypte et en Libye et redoutant que le vent de la révolte qui souffle depuis le début de l'année sur l'ensemble des pays arabes et amazighs se propage jusqu'à son pays, le roi du Maroc, Mohamed VI, tente d'apaiser ses sujets en proposant une réforme de la Constitution du royaume. Ainsi, vendredi dernier, le 17 juin, Mohamed VI a annoncé la modification de la Constitution qui sera soumise à référendum le 1 juillet.
Bien que la Fédération Régions et Peuples Solidaires (R&PS) reconnaisse dans le projet de nouvelle Constitution du Maroc un certain nombre d'avancées, elle ne considère toutefois pas la réforme comme un achèvement mais plutôt comme un élément de transition démocratique.
R&PS, attaché à la laïcité, regrette que la séparation du Politique et du religieux ne soit pas prévue par la nouvelle Constitution. Le Maroc qui n'est certes plus vraiment une monarchie théocratique mais dans laquelle le roi est chef de l’État et aussi le guide religieux et où « l'Islam est la religion de l’État » (article 3) n'est donc pas encore une monarchie constitutionnelle moderne.
La liberté d'expression reste contrôlée dans la mesure où – bien que la « liberté d'opinion, d'expression et de réunion » soit reconnue dans le projet constitutionnel (article 10)– ce dernier prévoit quand même la condamnation d'un membre du Parlement qui « met(trait) en cause la forme monarchique de l’État, la religion musulmane, ou constitue(rait) une atteinte au respect dû au Roi ».
Par ailleurs, la Constitution marocaine, contrairement à toutes les démocraties modernes, n'accorderait aucun droit à une organisation d' « être fondée sur une base religieuse, linguistique, ethnique ou régionale (article 64) » .
Ainsi les Amazighs, qui composent la majorité de la population du Maroc, ne pourraient toujours pas se présenter aux élections sous le drapeau d'organisations politiques qui les représenteraient. C'est pourtant le principe de base du Droit des Peuples à disposer d'eux mêmes reconnu par l'ONU, organisation dont est membre le Maroc depuis 1956. Le Maroc reste une Monarchie centralisée sur le modèle de la France dont le pouvoir des collectivités locales notamment celui de la Région est limité par le contrôle des services déconcentrés de l'Etat, les Walis et Gouverneurs.
Parmi les avancées que R&PS tient à saluer il y en a une et dont la France mériterait bien de s'inspirer c'est la prise en compte de la diversité linguistique du pays. L'Etat marocain deviendrait en effet un État bilingue dans lequel la langue amazighe (berbère) serait « langue officielle de l’État » au côté de l'arabe (article 5). Quand la République française s'entête à ne toujours pas accorder de droits aux langues dites régionales de son territoire (le Conseil Constitutionnel dans un rapport daté du 20 mai 2011 a annoncé que l'article 75-1 de la Constitution « n'institue(instituait) pas un droit ou une liberté » en faveur des langues régionales), la monarchie marocaine s'est montrée particulièrement éclairée en matière culturelle.
Au moment où M. Sarkozy s'est félicité, samedi dernier dans un communiqué, de l'annonce du projet de réforme constitutionnelle au Maroc dans lequel il a pris la peine de saluer la prise en compte de la diversité culturelle du pays, R&PS préférerait que le Chef de l’État français s'emploie à donner un cadre juridique favorable aux langues régionales de l'Hexagone plutôt que de commenter l'actualité internationale. À la place de distribuer des bons points à l'étranger, la France ferait mieux de s'atteler à la modernisation de sa démocratie et de ses institutions.