"Dans le silence des campagnes - FRANCE3"
Samedi 23 février à 15h20, le film "Dans le silence des campagnes" dévoile le mal-être que rencontrent les agriculteurs. Aujourd'hui, le taux de suicide dans ce secteur, est le plus élevé de toutes les catégories socioprofessionnelles.
Par pudeur ou par honte, le silence des campagnes masque bien souvent des drames dont personne n'a conscience. Le métier d'agriculteur est un choix de vie, d'où le désespoir quand l'échec arrive.
Les raisons du suicide sont généralement multiples : revenus insuffisants, angoisse liée à l'avenir, difficultés à garder le patrimoine familial, solitude et parfois célibat, réputation de pollueur...
Pour comprendre les raisons du malaise qui peut conduire au drame, Jean-Louis Saporito donne la parole à des agriculteurs qui, tous, ont pensé au suicide et à différents intervenants de terrain qui les accompagnent et les soutiennent.
Un film de Jean-Louis Saporito
Une co-production TGA production / France Télévisions
Durée : 52 minutes
(possibilité de revoir le documentaire sur pluzz.fr sur internet une semaine à compter du lendemain de sa diffusion.
Explication de ce documentaire (Par Christophe Turgis)
Le suicide chez les agriculteurs, l'ouest particulièrement touché
Plus de 400 agriculteurs mettent fin à leurs jours chaque année en France, un tabou dans le monde agricole et surtout un fléau social inacceptable.
Le suicide chez les agriculteurs revient régulièrement dans les faits divers de la presse régionale. Une recherche sur la planète du web agricole ne dit rien du phénomène. Taper suicide dans le moteur de recherche interne des sites ne donne aucun résultat. Interrogée sur cette question, la Mutualité Sociale Agricole (MSA), la sécu des agriculteurs ne communique pas de chiffres sur le sujet et prend des précautions infinies avant de l'évoquer. Le suicide chez les agriculteurs est un tabou.
Dans l'ouest, c'est aussi un fléau social. Les départements normands, bretons, ligériens ou poitevins affichent un taux de suicide particulièrement élevé. Preuve d'un mal être plus important qu'ailleurs. De difficultés de vie professionnelles et personnelles plus importantes. Un indice ? L'ouest concentre le plus grand nombre d'éleveurs. Un constat, cette profession cumule les plus grandes difficultés.
Les éleveurs en première ligne
François-Régis Lenoir, agriculteur lui même et pyscho-sociologue alerte sur la situation de ces éleveurs. "ils sont en première ligne sur la surcharge de travail, les horaires décalés, à rallonge, les crises successives, le prix du lait instable. La personne qui a aujourd'hui 100 hectares de céréales n'a pas la même vie que celle qui exploite 100 hectares, 50 vaches, de l'ensilage de maïs à produire..." Niveau de stress élevé et baisse des revenus conduisent les éleveurs dans une impasse suicidaire.
L'isolement aggrave la situation
Autrefois, les éleveurs vivaient à plusieurs dans les villages. Aujourd'hui, ils sont isolés. Géographiquement, personnellement, professionnellement. "Ce phénomène démographique isole et rend la situation difficile quand il s'agit de s'associer avec des agriculteurs d'autres villages par exemple, parce qu'on ne sait pas faire avec l'autre", précise François-Régis Lenoir. Même difficulté "à faire avec l'autre" pour des agriculteurs qui se retrouvent à la tête de plusieurs salariés, sans formation en management.
La mise en place d'un plan de prévention du suicide
"Le suicide dans le monde agricole ne doit pas être un sujet tabou". C'est Bruno Lemaire, alors ministre de l'agriculture qui décide en mars 2011 qui s'empare du sujet. Il estime à 400 le nombre des agriculteurs qui mettent fin à leurs jours chaque année en France.
C'est la Mutualité Sociale Agricole qui sera chargée de mettre en ½uvre un plan de prévention. Il faut d'abord établir des données fiables, puis mettre au point des dispositifs d'écoute et de repérage des agriculteurs en difficulté. Pour prendre contact et prévenir quand c'est possible toute tentative de suicide ou de récidive.
Le ministre ajoutait aussi que la lutte contre le suicide passait aussi par des réponses économiques. "Il faut aider les agriculteurs, sécuriser leurs revenus, établir un rapport de force dans les filières qui leur soit plus favorable".
Une réalité difficile à cerner
Mais en deux ans, difficile de savoir si les choses ont évolué. La mise en place des actions d'écoute et de prévention ont sans doute évité des drames. Mais dans le même temps la situation économique des éleveurs n'a fait que se dégrader un peu plus.
Difficile de connaître les chiffres précis. La MSA est divisée en caisses départementales qui travaillent rarement avec leurs voisines. Même si des rapprochements sont réalisés comme pour la Loire-Atlantique et la Vendée. Si le suicide chez les agriculteurs reste encore tabou, la communication sur la réalité des chiffres en serait un autre."