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Machecoul, capitale bretonne de la production de bicyclettes
Il y a une longue histoire d'amour entre la Bretagne et la "petite reine" et il n'existe sans doute pas beaucoup d'autres régions à avoir produit autant de prodigieux
Par Bernard Le Nail pour ABP le 28/04/09 14:50

Il y a une longue histoire d'amour entre la Bretagne et la "petite reine" et il n'existe sans doute pas beaucoup d'autres régions à avoir produit autant de prodigieux coureurs cyclistes. Que l'on pense à Lucien Mazan dit "Petit Breton" (1882-1917), à Jean Robic (1921-1980), à Louison Bobet (1925-1983), à Cyrille Guimard (né à Bouguenais en 1947), à Bernard Hinault (né à Yffignac en 1954) et à bien d'autres ! Au moment où se déroule le Tour de Bretagne, il n'est pas mauvais de s'en souvenir.

Le cyclisme breton a aussi la chance de bénéficier de deux chroniqueurs de talent qui lui ont consacré divers livres, Jean-Paul Ollivier (né en 1944) :

• "L'histoire du cyclisme breton" (Paris, Jean Picollec, 1981, 372 p.)

• "La légende de Louison Bobet" (Paris, Flammarion, 1984, 274 p., rééd. L'Aurore, 1992, 273 p.)

• "Le Tour de France, la Bretagne et les Bretons" (Paris, Layeur, 2002, 142 p.)

• "L'Aventure du cyclisme en Bretagne" (Plomelin, Palantines, 2007, 223 p.)

et Georges Cadiou (né en 1951) :

• "Les grandes heures du cyclisme breton" (Rennes, Ouest-France, 1981, 221 p.)

• "Les Grands du cyclisme breton" (Spézet, Keltia Graphic, 1990, 345 p.)

• "Les grands cyclistes bretons" (Alan Sutton, 2005, 319 p.)

Mais ce que trop de Bretons ignorent, c'est que la Bretagne a aussi une importante production industrielle de bicyclettes. Il se vend en France autour de 3,4 millions de vélos, soit 5,4 vélos pour 100 habitants, ce qui est moins qu'au Japon, aux Pays-Bas et aux États-Unis, mais plus qu'en Allemagne, en Chine et en Inde. Les Français ne sont pourtant que 7% à utiliser leur vélo tous les jours, notamment pour se rendre à leur travail alors qu'il y a 24% des habitants des Pays-Bas à le faire. Un vélo vendu n'est pas un vélo utilisé. Beaucoup doivent rester dans les caves et garages, ou comme beaucoup de VTT, ne servir que quelques dimanches par an... Sur ce total, une usine située à Machecoul, au cœur du Pays de Retz, réalise entre 10 et 15% de la production de vélos de l'hexagone. Elle a connu une histoire assez mouvementée.

Né en 1893, Marcel Brunelière s'installa à Machecoul (Loire-Inférieure) en 1923 comme forgeron et mécanicien agricole. En 1926, il monta une première bicyclette. En 1929, il avait 10 ouvriers et l'année suivante, il créa la marque “Gitane”. C'est surtout après la guerre que l'affaire allait se développer. En 1958, elle employait 50 personnes. Une équipe de course fut créée en 1959 et en 1960 l'entreprise devint société anonyme. En 1966, Marcel Brunelière prit sa retraite et cèda son affaire à Serge Paulange qui en poursuivit le développement, puis la revendit en 1970 à Claude Hautier, qui la revendit plus tard à la Régie Renault. La société MICMO (Manufacture industrielle de cycles et motocycles) passa de 170 salariés et 67 000 bicyclettes fabriquées par an en 1968 à 600 salariés et 350 000 bicyclettes en 1974. Elle remporta de beaux succès à l'exportation, en particulier aux Etats-Unis, et en 1975, les effectifs atteignirent 720 salariés. Le ralentissement de l'économie française et la chute du dollar amenèrent une baisse des ventes et contraignirent l'entreprise à des licenciements. La société qui créa ensuite une nouvelle usine à Saint-Père-en-Retz, resta un des premiers fabricants français de bicyclettes, mais changea encore plusieurs fois d'actionnaires. Depuis 1998, l'entreprise appartient à la société Cycleurope AB, qui compte plusieurs usines en Europe (Italie, Danemark, Suède...) et fait partie du groupe suédois Monark Stiga.

Depuis janvier 2005, l'usine Cycleurope de Machecoul importe désormais d'Asie, de Chine surtout, la totalité des cadres de vélos manufacturés dont elle a besoin pour sa production. L'usine de Machecoul emploie au total 360 salariés permanents et en moyenne 140 personnes en contrat à durée déterminée. L'unité de Machecoul continue à peindre et assembler les vélos, qu'elle vend à des hypermarchés, à des grandes surfaces spécialisées dans le sport ou à des sociétés de vente par correspondance, en France et à l'étranger. En 2004, l'usine a produit 433 000 vélos , contre 402 000 l'année précédente et le site de Machecoul a sous-traité en 2004 la production de 60 000 vélos à une autre usine du groupe, à Romilly-sur-Seine, dans l'Aube.

Aujourd'hui, l'usine de Machecoul fabrique 1 500 références de vélos qui sont vendus en France et en Europe. Le principal débouché de ses ateliers, c'est la grande distribution. Les supermarchés ont progressivement supplanté les magasins spécialisés. Aujourd'hui, on trouve des vélos « Made in Machecoul » dans les allées des grandes surfaces et à Décathlon ou Go Sport. Mais l'usine produit toujours deux marques propres : Micmo et depuis peu Raleigh. Les vélos Raleigh existent dans 27 modèles différents. Ils sont fabriqués avec des composants haut de gamme et sont garantis dix ans. Une véritable course contre la montre s'engage désormais pour développer cette marque dans les grands points de vente français et européens. Grâce à son sens de l'innovation et son savoir-faire, Cycleurope devrait conforter durablement sa place de plus grosse unité de production de cycles en Europe, sur le site de Machecoul. La société espagnole Bestegui Hermanos a cédé 99 % de Cycleurope SA au groupe suédois Monark. Déjà connu pour les articles de jardin Stiga, Monark est devenu ainsi propriétaire de Cycleurope International (ex-Peugeot Cycles) basée à Romilly-sur-Seine dans l'Aube et de Micmo à Machecoul près de Nantes. Avec Monark en Suède qui fabrique la marque Crescent, DBS en Norvège et Kildemoes au Danemark, la production annuelle de ces cinq entités regroupées sous le nouveau holding Monark Cycleurope dépasse le million de vélos. Le chiffre d'affaires consolidé s'élève à 1,9 milliard de francs et l'effectif à 2 100 salariés. Monark Cycleurope devient ainsi le second producteur mondial, derrière l'anglo-américain Derby et ses 400 millions de dollars de chiffre d'affaires.

La marque "Gitane" a sponsorisé ses premiers cyclistes professionnels en 1948. De 1953 à 1955, Gitane a équipé le jeune Jean Stablinski. En 1960, Gitane s'est illustrée grâce à l'équipe Rapha-Gitane-Dunlop de Rudi Altig. En 1963 puis 1964, Gitane est parvenue au sommet en remportant, le Tour de France1 avec Jacques Anquetil (équipe Saint Raphaël-Gitane), puis en 1966 avec Lucien Aimar. Dans les années 70 et 80, la mythique équipe Renault-Gitane s'illustra dans les grandes compétitions cyclistes. Grâce à Lucien Van Impe, Bernard Hinault, Laurent Fignon et Greg Lemond, Gitane se forgea alors un palmarès exceptionnel. Dans les années qui suivirent, Gitane sponsorisa les équipes Système U (de Laurent Fignon), et RMO (de Charly Mottet). Dans les années 90, Gitane se lança également dans le sponsoring d'une équipe VTT. Dans les années 2000, après quelques années d'absence, Gitane est revenue dans le peloton professionnel avec La Française des Jeux et BigMat-Auber. Actuellement, Gitane ne sponsorise plus d'équipe professionnelle, mais est partenaire de La Poste pour la fabrication des vélos des facteurs. Palmarès :

• Tour de France 1963, 1964 (Anquetil), 1966 (Aimar), 1976 (Van Impe), 1978, 1979, 1981, 1982 (Bernard Hinault), 1983, 1984 (Laurent Fignon)

• Championnat du monde 1980 (Bernard Hinault), 1983 (Greg Lemond)

• Record de l'heure Roger Rivière, Elsy Jacobs

Anquetil, Geminiani, Altig, Stablinsky, Zoetemelk, Van Impe, Hinault, Fignon, Lemond... les plus grands coureurs sont entrés dans l'histoire du sport avec Gitane, en inscrivant 6 titres de Champion du monde, 2 records de l'heure et 11 victoires au Tour de France.

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Bernard Le Nail est un écrivain fondateur de la maison d'édition LES PORTES DU LARGE. Contributeur ABP
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