Bataille d'Azincourt, miniature tirée de l’Abrégé de la Chronique d'Enguerrand de Monstrelet, XVe siècle, Paris, BnF, département des Manuscrits.
Arthur de Richemont
- Chronique -
Les Bretons à la bataille d'Azincourt (25 octobre 1415)
Puisque vous, chers lectrices et lecteurs, semblez aimer les batailles qui ont fait l'histoire (11 000 vues sur les pages facebook pour l'article sur les Bretons à Hastings), puisque c'est
Par Frédéric MORVAN pour FM le 23/10/15 17:13

Puisque vous, chers lectrices et lecteurs, semblez aimer les batailles qui ont fait l'histoire (11 000 vues sur les pages facebook pour l'article sur les Bretons à Hastings), puisque c'est le 600e anniversaire de cette fameuse bataille, parlons de la présence des Bretons à Azincourt. Avant tout, un peu de contexte, le roi de France, Charles VI, était devenu fou dès 1392, lors de son expédition contre la Bretagne. Son frère cadet, Louis, duc d'Orléans, tenta de gouverner à sa place mais il fut assassiné en 1407 sur ordre de son cousin Jean sans Peur, duc de Bourgogne. Le gendre du duc d'Orléans, le comte d'Armagnac, décida de le venger. La guerre civile commença et les massacres aussi.

Après la mort du duc d'Orléans, le duc de Bretagne, Jean V, né en 1389, duc depuis 1399, époux de la fille de Charles VI, s'était uni aux princes de France, ses cousins, contre le duc de Bourgogne (ligue de Gien, 15 avril 1410). Cependant, il ne paraît pas avoir apprécié le programme extrémiste des Armagnacs qui en appelèrent au roi d'Angleterre lui promettant de lui restituer la grande Aquitaine. Il refusa donc d'attaquer le duc de Bourgogne. En contrepartie, ce dernier abandonna les Penthièvre qui prétendaient au trône breton et signa un traité d'alliance avec Jean V à Paris le 18 juillet 1410, et à Vannes le 29 juillet 1410. Le duc de Bretagne commença alors sa politique ménageant la chèvre et le chou, visant à protéger la Bretagne de toute invasion. Il se concentra sur son rôle de négociateur entre les deux partis surtout lors de la révolte des Parisiens en 1413, dite des Cabochiens ou écorcheurs. Profitant de cette révolte, les Armagnacs prirent le pouvoir à Paris. Et les massacres continuèrent. Durant cette période, le duc, avec ses Bretons, alors à Paris, protégea la famille royale et permit à des conseillers du roi de s'enfuir.

La situation était telle que le roi d'Angleterre, Henri V, décida d'en profiter et débarqua avec 6 000 hommes, surtout des archers, à Harfleur en Normandie. Son but était en fait de piller le plus possible la riche Normandie et de repartir en Angleterre par Calais. Pour l'arrêter, les Armagnacs au nom du roi, alors hébété après une crise de folie, convoqua l'armée royale. Sans doute près de 15 000 hommes d'armes répondirent à l'appel. Le duc de Bretagne se devait de faire de même, en tant que beau-fils du roi et un de ses principaux vassaux. Et Jean V partit donc avec ses redoutés bretons, plusieurs milliers. Les Bretons constituaient une force non négligeable. Ils étaient alors considérés comme parmi les meilleurs guerriers d'Europe. C'étaient eux, commandés par Du Guesclin, qui avaient remporté la première phase de la guerre de Cent ans. Mais l'armée ducale s'arrêta à Amiens, au sud donc d'Azincourt, car Jean V n'était pas content. Il apprit que le duc de Bourgogne, son allié, n'était pas autorisé à rejoindre l'armée royale.

Vous me direz donc, il n'y a donc pas eu de Bretons à Azincourt. Et bien si ! Le jeune frère cadet du duc, Arthur de Richemont, né en 1393, élevé par le duc de Berry, principal chef armagnac, fut de la partie. Jean V lui avait donné la permission de commander 300 hommes d'armes bretons. Arthur se rendit donc à Azincourt par ses propres moyens. Où était-il lors de la bataille ? On ne sait pas vraiment. Il est vrai que le chaos régna quasi immédiatement dès le début de la bataille. Les charges des chevaliers du roi de France furent immédiatement détruites par les flèches anglaises. Les hommes du roi, empêtrés dans la boue jusqu'aux genoux, furent massacrés ou faits prisonniers par milliers. Il est possible qu'Arthur et ses hommes se trouvèrent avec le seigneur d'Azincourt qui avait réuni, vers la fin de la bataille, quelques hommes, dont des Bretons. Cette attaque parvint à faire si peur au roi Henri V que ce dernier ordonna à ses hommes d'égorger les centaines de prisonniers français de peur que ces derniers très nombreux ne se révoltent contre leurs gardiens. Arthur fut gravement blessé. Reconnu grâce à sa cotte de maille, recouverte par ses armoiries, d'hermines surmontées par les lions d'Angleterre (il avait reçu en héritage le comté anglais de Richemont que le roi d'Angleterre refusa de lui donner), il obtint d'être soigné. Il est vrai que sa mère était la reine douairière d'Angleterre. Elle avait épousé Henri IV, père d'Henri V. On connait les noms de quelques Bretons tués lors de la bataille : Jean de Châteaugiron dit de Malestroit, seigneur de Combourg, Patry et un autre Jean de Malestroit, mais aussi Bernard de Montauban, Guillaume de La Forest, Guillaume Le Voyer. Parmi les prisonniers, on trouve Edouard de Rohan, fils cadet du vicomte de Rohan et futur seigneur de Léon, Olivier de la Feillée, Jean Giffart et d'autres.

Arthur partit, prisonnier, pour l'Angleterre où il put rencontrer sa mère. Selon certains, leur rencontre aurait été un désastre. Il ne l'aurait pas reconnu. D'abord incarcéré au château de Fotheringay (Northamptonshire), il se retrouva en 1420 à la Tour de Londres. Henri V d'Angleterre le laissa repartir qu'à condition qu'il devienne son homme de guerre, ce qu'il fit. La mort du roi en 1422 le libéra de son obligation. En 1425, Arthur devenait le connétable de France, c'est-à-dire le chef de l'armée royale. C'est lui et ses Bretons qui mirent fin à la guerre de Cent ans en 1453. En 1457, il montait sur le trône breton en tant qu'Arthur III.

Quant à son grand frère, le duc Jean V, après l'écrasante défaite du roi de France, il continua sa politique, ménageant tous et toutes. Il conclut un nouveau traité d'alliance avec la Bourgogne (février 1417), vint signer personnellement un traité de paix au château d'Alençon avec Henri V et finit par s'allier avec les princes d'Anjou, chez qui le Dauphin de France, le futur Charles VII, s'était réfugié (août 1417). Cette politique était très lucrative car le duc reçut de fortes sommes d'argent de la part de la Cour du roi de France tandis que la Bretagne s'enrichit en ravitaillant les Anglais qui occupaient tout le Nord du royaume de France et l'Aquitaine. Surtout, alors que le royaume de France était ravagé par la guerre, la Bretagne était préservée.

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