Le breton, une langue menacée, le breton classé «sérieusement en danger», le breton en voie d'extinction sont quelques des titres de l’actualité télévisuelle et journalistique récente en Bretagne. En effet, le breton, langue régionale de France, peine, comme ses homologues alsacienne, basque, corse, catalane, occitane à trouver sa place au sein de la législation française. Et ce n’est pas dans le projet de loi de finances 2018 que ces langues trouveront un meilleur appui, tout étant consacré à la langue française. Rien pour les langues de France et rien pour la langue bretonne.
La France n’ayant pas repris à son compte certains des engagements en matière de service public qui figurent dans la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, en particulier la co-officialité de deux langues, il n’y a donc pas de politiques linguistiques institutionnelles en faveur des langues de France autres que le français. La langue bretonne n’étant pas une langue officielle régionale comme le gallois et le gaélique écossais en Grande-Bretagne, le basque et le catalan en Espagne, l’irlandais en Irlande, il ne peut pas avoir de politique en sa faveur.
Les interventions sur les questions de langue bretonne sont donc le fait soit de structures administratives comme la région ou le département soit de structures associatives régionales ou locales comme le collectif Ai’ta!. Ces interventions tentent de peser par une action de nature réglementaire ou/et militante sur la situation sociolinguistique concernée. Mais ce sont des politiques linguistiques de protection, patrimoniale et non des politiques de soutien et de développement. Ces politiques publiques contribuent à légitimer la survie de la langue bretonne, en général stigmatisée en même temps que célébrée, et à accroître sa visibilité dans l’espace public au travers de signalisations bilingues ou de manifestations festives.
Peu de résultats jusqu’à présent : 4,5 % de locuteurs actifs, 11 % de communes pourvues d’une filière bilingue, 2 % d’enfants scolarisés dans les filières bilingues, 0,27 % d’étudiants suivant un cursus “langue bretonne”, 0,07 % d’apprenants adultes et 0,5 % du budget régional. On ne s’étonnera donc pas que la langue bretonne ait été classée par l’UNESCO comme une langue sérieusement en danger, 10 000 brittophones disparaissant par an. Et donc, on ne s’étonnera pas non plus que les Bretons dans leur grande majorité ne parlent pas breton.
Alors que presque toutes les nations et les peuples ont leur propre langue parlée au quotidien, la Bretagne est un pays qui a une langue très peu parlée par la population. En fait, en Bretagne, au quotidien, plus de gens parlent anglais que breton. Aujourd'hui, une personne qui parlerait seulement le breton aurait du mal à se déplacer en Bretagne. Pourquoi est-ce ainsi?
Parce que le breton n’est pas une langue officielle en Bretagne. Certes les panneaux de signalisation sur les routes secondaires et dans certaines municipalités sont dans les deux langues. Le bilinguisme, signe de co-officialité des langues française et bretonne, est présent également dans certains établissements culturels et commerciaux. Mais le breton n’est pas un sujet obligatoire pour tous les élèves et vous n’êtes pas obligés de le connaître pour aller au collège, au lycée et à l’université. La structure administrative dénommée Conseil régional n’a pas su créer une radio et une télévision en langue bretonne.
Donc, en pratique, le français domine. Tout le monde né en Bretagne parle couramment le français. C'est la langue de la télévision, de la radio, des journaux, du travail et des magasins. Les politiciens font parfois des gestes symboliques comme l'utilisation du breton pour la première ligne de leur discours ou ânnonent plus qu’ils ne chantent l’hymne national breton mais ils passent rapidement au français car sinon ils ne seraient pas compris. Le seul endroit où le breton est parlé, c'est dans les quelques salles de classe où il est enseigné. D’où au niveau politique, une vision scolaire et non culturelle de la langue bretonne. Dans le maigre budget régional, le soutien à la langue bretonne est une sous-rubrique de la mission Enseignement.
La langue bretonne est pourtant, comme toutes les langues, une langue qui participe à la richesse de la culture en Bretagne, en France et en Europe. Et ce n’est qu’en acquérant un statut de langue officielle que la langue bretonne ne disparaîtra pas et que son usage et son enseignement pourront être promus et renforcés aux plans institutionnel, médiatique et éducatif.
“Did you know that the Gaelic Language (Scotland) Act was passed unanimously by the Scottish Parliament in 2005? This created and gave Gaelic a measure of official status in Scotland.” (1) SCOTTISH PARLIAMENT. (voir le site)
La parole est au “Parlement" Régional !
Image © Scottish Parliamentary Corporate Body
(1) Traduction: “Saviez-vous que la loi Language (Scotland) Act a été adoptée à l'unanimité par le Parlement écossais en 2005 ? Cela a créé et a donné au gaélique une dimension de statut officiel en Écosse.”
Certains éléments de ce texte sont empruntés à l’article de Robert Nielsen: “Why Don’t The Irish Speak Irish ?”