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Histoire maritime de la Bretagne avant 1532 - 3/10. Les ravages normands, la conquête de l'Angleterre en 1066
Nous avons déjà évoqué les moines évangélisateurs celtiques d'Outre Manche qui, à la fin de l'empire romain, rénovèrent le christianisme du continent, molesté par les incursions barbares. Rappelons que Constantin le Grand, général de Grande-Bretagne, fut le premier empereur à se convertir au christianisme. La Bretagne est confrontée alors aux ravages des Vikings
Par marc Patay Lejean pour ABP le 9/03/12 19:56


Nous avons déjà évoqué les moines évangélisateurs celtiques d'Outre-Manche qui, à la fin de l'empire romain, rénovèrent le christianisme du continent, molesté par les incursions barbares. Rappelons que Constantin le Grand, général de Grande-Bretagne, fut le premier empereur à se convertir au christianisme. La Bretagne est confrontée alors aux ravages des Vikings. Après maintes désolations, les Bretons se ressaisissent, les battent puis les rejettent à la mer, au contraire des Francs qui leur concèdent la Neustrie en 911. En 1066, avec les Normands qui gardent souvenir de leurs talents guerriers, les Bretons partent à la conquête (reconquête) d'Albion, cinq siècles après la légendaire bataille de Badon. Après les Normands, ils se taillent la meilleure part des fiefs dans leur ancienne possession.

Les ravages normands, la conquête de l'Angleterre en 1066

VIe siècle, Saint Gwenaël, né en Armorique, passe sept ans en Irlande, il traversa la Manche dans une nacelle recouverte de cuir… Vita Guenaili.

VIIIe siècle, une étoffe de soie (l'étole de saint Pol) trouvée à Batz, date du VIIIe siècle et viendrait d'Assyrie ou de Perse. Une croix pectorale, dite de l'abbé de saint Matthieu, datée du VIIIe siècle, étrangère à l'empire grec, viendrait de Salerne (Italie) comme les reliques de saint Matthieu. L'Europe et l'océan au Moyen Âge : contribution à l'histoire de la navigation. Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur.

Nous savons, par Eginhard, qu'au VIIIe siècle, sous Charlemagne, la flotte bretonne est encore puissante et résiste aux Vikings, parce que les drakkars ne sont pas assez grands pour résister aux robustes «pontos» celtes. Éginhard 770-840, premier biographe de Charlemagne, Le cartulaire de Redon (recueil de chartes du VIIIe siècle au milieu du XIIe siècle) indique d'importants convois arrivant à Redon, jusqu'à 150 barques à la fois, à l'occasion de la grande foire, qui transforme la ville en un inextricable dépôt de marchandises. Traduit de l'Espagnol, Louis Kervran, El Verdadero Descubrimiento de América.

En 800, le commerce maritime des Bretons était resté fort considérable. L'on peut s'en faire une idée par ce que rapporte le moine de Saint-Gall. Charlemagne se trouvait dans un port voisin de Narbonne. Tout à coup il vit apparaître au large une flotte considérable. Les uns crurent que c'étaient des vaisseaux de marchands juifs, d'autres soupçonnèrent que ces navires étaient montés par des Bretons. Ce peuple naviguait donc dans la Méditerranée, puisque l'on supposait que cette flotte leur appartenait. Aurélien de Courson, 19e , Histoire des peuples Bretons dans la Gaule et dans les îles.

IXe siècle, « car le port est toujours plein de barques, de dromons (légers bâtiments) et de grands vaisseaux (ou nefs) venant de lointains pays avec des cargaisons de fines épices, de draps de soie, de draps d'or et de pourpre, de samit, de cendaux (bateaux), de toutes sortes de riches étoffes et autres marchandises de prix, commerce qui fait la richesse d'Aleth et du roi Aquin … il y eut de curieux épisodes, des exploits et des engagements particuliers, dans lesquels l'archevêque de Dol et ses Bretons brillèrent au premier rang. L'archevêque, entre autres, arracha de vive force aux païens (Normands) le château de Dinard, au moyen du feu grégeois; c'est lui aussi qui, profitant habilement de la basse mer, enleva à la barbe du roi Aquin une flotte de trente navires, qui se rendait dans le port d'Aleth chargée de richesses immenses et surtout d'armes et de vivres pour ravitailler la place » .La Borderie, Historien du 19e et Le Roman d'Aiquin, chanson de geste écrite en Bretagne par un moine de Dol, XII-XIIIe siècles, qui évoque l'histoire de la Bretagne au IXe siècle, les Normands et Charlemagne.

Dès les croisades, les escadrilles des corsaires malouins étaient proclamées les troupes légères de la mer, incommodant l'ennemi, divisant les forces, balayant les croiseurs et butinant de riches cargaisons. La Bretagne ancienne et moderne, Le Saint, 1885.

853, mais privé de l'alliance de Sidric, Erispoé n'avait plus de flotte, par conséquent, plus de moyens d'attaque des Normands de Biesse (Nantes). La Borderie.

855 ?, Des matelots (bretons) abordèrent en cette ville de Tarrium (Egypte ?) en vue de faire du commerce comme ils en avaient l'habitude. Saint Mathieu leur apparut de manière très visible et leur demanda en breton … « d'où êtes-vous, hommes, mes frères ? … nous sommes Bretons, nous sommes venus dans ces régions pour faire du négoce» . Translation Sancti Matthai, Léon Fleuriot, historien, XXe.

C'est au Caire que le corps du Saint Évangéliste (saint Mathieu) aurait reposé jusqu'au temps où saint Salomon régnait en Bretagne. Des marins bretons se trouvant en cette ville, l'apôtre leur apparut, et s'adressant à eux dans leur propre langue les chargea d'emporter son corps dans leur pays …. L'ayant transporté sur leur navire, ils mirent aussitôt à la voile; favorisés par les meilleurs vents, ils arrivèrent à la péninsule qui forme du côté du Nord la rade de Brest. Le bruit d'un tel événement se répandit, et saint Salomon vint au rivage avec toute sa cour pour faire à l'évangéliste une glorieuse réception. Albert Le Grand, hagiographe, XVIIe.

IXe siècle, des marins et commerçants bretons seraient allés chercher la dépouille de saint Mathieu (Matthieu), évangélisateur des Éthiopiens et des Perses, inhumé au Caire après avoir été martyrisé. … la population indigène s'était pervertie, devenue infidèle. … Il n'y resta pas longtemps (dans l'abbaye de saint Mathieu, Finistère) car au Xe siècle des écumeurs des mers (Normands) l'auraient enlevé et emporté à Salerne, en Italie. Toutefois, l'abbaye prétendit pendant tout le Moyen Âge, et encore au XVIIe siècle, détenir la tête du saint. L'évêque Eudo a ramené de Salerne, une partie du corps de saint Mathieu (en 1012 selon la vie de Goueznou). Fleuriot, voir aussi L'Europe et l'océan au Moyen Âge : contribution à l'histoire de la navigation, Par Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur.

Une flotte de navires Léonois qui estoit allée trafiquer en Egypte, trouva moyen d'enlever subtilement le chef du glorieux Apôtre et Évangéliste S. Mathieu. Albert Le Grand.

862, Pour soutenir cette lutte, Salomon n'hésite pas à s'allier aux Normands de la seine, il leur emprunte douze vaisseaux. La Borderie.

En 873, Salomon change une nouvelle fois de stratégie et s'allie à Charles afin de reprendre Angers aux Vikings. En détournant le cours de la rivière, les Bretons amputent les Vikings de leur principale flotte.

889, les Normands assiègent Saint Lô qui appartenait aux Bretons de cette époque puis ils allèrent au Blavet et Alain le Grand les défit entièrement. Histoire maritime de France, par Léon Guérin.

911 Dans le même temps le duc Robert (Rollon ?), qui avait longuement, habilement, combiné sa brutale agression, lance sur les côtes de Bretagne une flotte qui menace de dévaster tout le littoral. La Borderie.

936, Il fit connaître son dessein au roi Athelstan (Grande-Bretagne) qui lui donna quelques vaisseaux pour le porter en Bretagne … avec cette flottille, Alain Barbetorte franchit la Manche. La Borderie. Selon Ogée, XVIIIe, ingénieur géographe, il débarque au port de Cancale. Athelstan était roi d'Angleterre de 924 à 939.

L'entreprise de (Alain) Barbetorte était des plus périlleuses … s'il était après son débarquement resté inactif … Alain eût été bientôt entouré … au lieu de cela, à peine débarqué, il fond sur eux (Normands) et prompt comme la foudre détruit coup sur coup trois de leurs repaires. La Borderie.

936, Alain, ayant su qu'une autre bande de Normands était retranchée dans St Brieuc, il s'y rend par mer, les attaque, les force et massacre tout ce qu'il y trouve. La Borderie.

938, (Alain Barbetorte), le petit-fils d'Alain-le-Grand revint dans sa patrie avec les fidèles qui l'avaient suivi. Ils débarquèrent près du monastère de Dol, et ayant surpris les Normands au milieu des fêtes d'un mariage, ils les attaquèrent, et en firent un grand carnage. Averti qu'une autre troupe de pirates stationnait près de Saint-Brieuc, à l'embouchure de la rivière de Gouet, Alain remonte aussitôt sur ses vaisseaux et court attaquer ces nouveaux ennemis. Les Normands sont mis en fuite. Aurélien de Courson

La libération s'achève à Trans, en 939, par la victoire d'Alain Barbetorte sur les Normands.

950 Pour en finir avec Eude de Blois, Richard (Ier de Normandie) avait appelé à son aide une grosse bande de pirates scandinaves commandée par deux rois de mer, Olaf et Lacman. Poussée par un vent violent et connaissant mal le littoral, cette flotte, au lieu de remonter la Seine, vint débarquer sur la côte bretonne non loin de Dol. La Borderie.

1030 Guillaume (de Normandie) avait été appelé par les mécontents de Bretagne … il partit pour la Bretagne, sûr de vaincre; mais, digne fils de son père, digne héritier de tant de valeureux capitaines, Conan II (né en 1030), attaqué dans ses États, lève aussitôt une flotte nombreuse, et il s'en va attaquer à l'embouchure de la Seine ce vaillant et habile capitaine. La Bretagne, Jules Gabriel Janin, XIXe.

1066, l'armée confédérée… s'embarqua sur une flotte de vaisseaux, non compris ceux qu'on appelait en ce temps-là nacelles, qui étaient petits. Guillaume, arrivé en Angleterre … partage son armée en trois corps, dont l'un était commandé par Alain Fergent (son fils Brian FitzCount en réalité), marche à l'ennemi, lui livre bataille, et fait un si grand carnage de ses troupes, que, si nous en croyons la Chronique manuscrite de M. de Thou, il demeura sur la place 67654 morts (très exagéré), parmi lesquels le corps d'Harald lui-même se trouva. Guillaume, victorieux, fut proclamé roi d'Angleterre, l'an 1070 (en 1066), et donna, par reconnaissance, à Alain Fergent (Brian FitzCount) le comté de Richemont… Raoul de Gaël fut aussi gratifié des comtés de Suffolk et de Norfolk. Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne Par Jean Ogée. Un noble breton fondait alors la dynastie des Stuart. Tandis qu'ensuite un Breton gallois fondait celle des Tudor.

1066, le Corps breton constituait l'aile gauche de l'armée de Guillaume, soit 2.100 hommes sur 6.000. Norman Longmate, Defending the Island, 1990…

Au XIIe siècle, l'écrivain Étienne de Fougères évoque les marchands bretons qui rentrent d'Espagne. La Borderie. Étienne de Fougères, chapelain du roi Henri II d'Angleterre puis évêque de Rennes.

1224 quand Louis VIII s'empare de la Rochelle, la colonie armoricaine y est déjà nombreuse et, semble-t-il florissante. A l'aube du XIVe siècle, les nefs bretonnes viennent chaque année en grand nombre charger du vin à Bordeaux. Jean Christophe Cassard, La Bretagne des premiers siècles.

1234, nous voyons les Malouins faire la course avec succès contre les Anglais et mériter, dès cette époque, le titre de « troupes légères de la mer » . Sept ans après, pour donner un plus grand essor à leur commerce, déjà fort important, ils s'associent à la Ligue Hanséatique, dont Hambourg et Lubeck avaient jeté les premiers fondements. Stéphane de La Nicollière-Teireijo, XIXe.

1239, le Pape demande à Pierre de Dreux (duc de Bretagne), à qui il reproche ses attaques contre l’Église, de se croiser et de prendre la tête d'une nouvelle croisade pour assurer la survie de l'empire d'Orient. Skol Uhel Ar Vro.

1242, Saint Louis de son coté demanda au duc de Bretagne (vaisseaux de Saint-Malo) et aux garde-côtes du Poitou, de Normandie et de Picardie, de donner la chasse aux Anglais et de n'épargner ni leurs corps ni leurs biens. En peu de temps, les pirates furent dissipés et contraints d'implorer le secours de l'archevêque d'York, à qui le roi Henry avait laissé l'administration de ses états. Les armateurs bretons, poitevins et normands attaquèrent une flotte chargée d'hommes et d'argent, que Richard du Bourg conduisait à Bordeaux. Ils le contraignirent de reprendre le chemin de l'Angleterre. Dom Morice, bénédictin, XVIIIe siècle. La Nicollière-Teireijo.

1249, Pierre du Pellerin passa avec Olivier de Guite, Eudon Le Déan et Robert Courson, tous croisés bretons, avec Huet, marinier et citoyen de Nantes, capitaine de la Pénitence, un acte de fret pour les transporter de Chypre à Damiette. Ogée.

1262, les Bretons exportent du sel vers le port de Hambourg. Horizons marins, itinéraires spirituels (Ve-XVIIIe siècles), Henri Dubois, Jean Claude Hocquet, André Vauchez.

1270, Éléonore (de Castille) s'embarque pour Bordeaux, où elle dirigea la préparation de la (8ème) croisade. Environ un mois plus tard, Edward (Ier), quitta Portsmouth et rejoint son épouse à Bordeaux, puis ils voyagèrent ensemble vers Aigues-mortes, où le duc de Bretagne (Jean Ier et son fils Jean II), beau-frère d'Edward, attendait leur arrivée avec une puissante flotte bretonne. Après avoir arrangé avec Saint-Louis une attaque combinée contre le Bey de Tunis, qui refusait de payer le tribut au roi de Sicile, Edward embarque avec sa femme et une foule de braves guerriers pour cette côte. The queens of England and their times, Francis Lancelott, XIXe.

1270 Les Malouins prirent aussi une large part aux expéditions lointaines de ce pieux monarque (saint Louis). Le 1er avril 1270, il entreprend sa dernière croisade. Le duc de Bretagne (Jean Ier) suivi de son épouse, de son fils (Jean II), et d'un grand nombre de chevaliers, se rend à Marseille. Les vaisseaux bretons contournent l'Espagne chargés de troupes qu'ils portent au rendez-vous. Nicollière-Teireijo.

Le 1er juillet, Saint Louis s'était embarqué à Aigues-mortes avec ses trois fils. Les Bretons partirent de Marseille et rejoignirent le roi à Cagliari.

1284, la Bretagne essuya un ouragan, les ports de mer ne furent pas un asile assuré et les vaisseaux y furent submergés. Ogée.

1295 «il advint que la comtesse (Jeanne de Flandre, épouse de Jean de Montfort), estant levée très matin, un petit après soleil levant regarda la mer et vit flamboyer grant foison de voiles en nefs; c'estoit la navie d'Angleterre qui venoit» . Jean Froissart, (~1337,~1404), chroniqueur de l'époque médiévale. Ce fut la guerre de succession de Bretagne où l'on vit le prétendant breton, Jean IV, l'emporter sur le prétendant français, Charles de Blois.

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Informaticien, marié, aime l'écriture (prose poétique, essais, traduction), la langue bretonne, l'histoire, de la Bretagne en particulier, etc
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Vos 1 commentaires
Naon-e-dad Le Vendredi 9 mars 2012 21:19

« une nacelle recouverte de cuir », cela s’appelle un coracle. On en trouve encore ce type d’embarcation légère (en toile) aux îles d’Aran (Irlande).
Lire à ce sujet le livre de Tim Severin (très connu chez nos amis d’Irlande et de Grande-Bretagne) relatant les recherches universitaires, la construction du coracle, puis sa traversée de l’Atlantique nord, jusqu’au continent nord américain. Il est peu fréquent que la Science historique et l’Aventure contemporaine se rejoignent d’une façon à ce point extraordinaire, enthousiasmante.
Trois points-clé, de mémoire :
. le cuir tanné selon la méthode artisanale résiste à l’eau de mer (contrairement aux cuirs modernes industriels!).
. tout au long de la route des Pierres de Gué (Islande, Groenland) on peut (on pouvait…) pêcher la morue, véritable poisson-miracle pour l’alimentation humaine.
. la faisabilité de la capacité technique des moines celtes à traverser l’Atlantique antérieurement aux Vikings a été faite. Sans parler de la capacité des Bretons à traverser la Manche de façon organisée et régulière (y compris en transportant les précieuses auges de pierre) au point, pendant un temps d’établir un royaume (Arthur) sur les deux rives de notre « Mor Breizh ».
Trugarez evit ar pennad-se. Ha posubl e vefe kaout titouroù resisoc’h a-zivout al levrioù roet o titl da Yann lenner ?
Merci pour cet article. Serait-il possible d’avoir les références plus précises des ouvrages cités ?
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