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- Communiqué de presse -
Enseignement bilingue : quand l'inspecteur s'emmêle...
Dans l'émission Red an amzer diffusée sur France 3 Ouest le 4 novembre dernier, le journaliste Fañch Broudic recevait M. Rémy Guillou, inspecteur de l'éducation nationale en charge de l'enseignement du breton pour les deux académies de Rennes et de de Nantes.
Par Oui au breton le 3/12/07 13:36

Dans l'émission Red an amzer diffusée sur France 3 Ouest le 4 novembre dernier, le journaliste Fañch Broudic recevait M. Rémy Guillou, inspecteur de l'éducation nationale en charge de l'enseignement du breton pour les deux académies de Rennes et de de Nantes.L'entretien avait lieu en breton. La richesse de l'échange est suffisamment grande pour justifier sa retranscription en français afin que le plus grand nombre, y compris des parents non bretonnants, puisse en prendre connaissance. Les commentaires en italique sont de ouiaubreton. Un lien en bas de page permet d'accéder à la vidéo sur le site de France 3 Ouest.

Fañch Broudic : Est-ce-que la rentrée s'est bien passée ?

Rémy Guillou : Elles s'est bien passée. Il y a eu quelques problèmes, comme tous les ans, mais ça s'est bien passé. Cette année, on compte plus d'élèves dans les classes bilingues. Une augmentation de 600 ! On arrive donc à 11 300 élèves en filière bilingue. Ils sont aussi 400 dans l'académie de Nantes (je suis aussi en charge de l'académie de Nantes). C'est un bon nombre d'élèves qui apprennent le breton dans les classes bilingues.

Fañch Broudic : Vous avez l'habitude des problèmes ?

Rémy Guillou : Oui. Ils sont parfois nombreux... On ne peut pas ouvrir des classes, ou alors, on ne trouve pas les enseignants, mais on a trouvé des solutions pour presque tous les problèmes.

Fañch Broudic : L'augmentation de cette année est-elle suffisante ?

Rémy Guillou : Bien sûr, elle n'est jamais suffisante. On voudrait encore plus mais ce n'est quand même pas si mal. C'est positif d'avoir 600 élèves en plus ! Et chaque année, l'augmentation est de plus en plus importante.

Commentaire : Cet optimisme verbal est malheureusement contredit par la réalité des chiffres. Depuis 2005; la progression ne cesse de diminuer, tant en valeur absolue qu'en valeur relative (1) :

- 2007 : + 660 élèves (+5,95%)

- 2006 : + 674 élèves (+ 6,57%)

- 2005 : + 738 élèves (+ 7,63 %)

- 2004 : + 795 élèves (+ 8,95%)

La Loire-Atlantique est même en régression (13 élèves de moins en 2006 et stagnatation cette année). Rappelons que, pour atteindre l'objectif fixé par le Conseil régional de 20 000 élèves en 2010, il aurait fallu une progression de 17 % cette année. Nous en sommes loin.

Fañch Broudic : Quels sont les critères pour ouvrir des classes ou des écoles bilingues ?

Rémy Guillou : Pour ouvrir une classe bilingue dans un pôle déjà existant, ce sont les mêmes règles que celles en vigueur dans toutes les écoles unilingues. Pour une ouverture, les règles sont claires : il faut avoir 15 élèves âgés de 3 à 5 ans, ou 20 élèves entre 2 et 5 ans. De plus, bien-sûr, il faut l'accord de la mairie et du rectorat. On ne peut pas ouvrir de nouvelles classes ou de nouveaux pôles partout.

Fañch Broudic : Mais, parfois, les gens voudraient une école ici alors qu'il y en a une autre là. Tout le monde veut avoir une école la plus proche possible de chez soi...

Rémy Guillou : Ce serait déjà bien d'avoir assez d'élèves dans les classes existantes. On en voit certaines avec très peu d'élèves. C'est pour cette raison que nous essayons de créer des pôles pour rassembler les enfants et ainsi avoir plus d'élèves dans les classes. Cette année, il y a eu un problème à Guichen. Les parents voulaient la création d'une nouvelle classe dans leur bourg. Finalement, on a dit qu'il valait mieux ouvrir une nouvelle classe à Bruz, réunir les élèves à Bruz pour y avoir trois classes, plutôt que deux à Bruz et une autre classe à Guichen. Il vaut mieux avoir plus d'enseignants ayant moins de travail de préparation et moins de niveaux par classes plutôt qu'une ou deux classes un peu partout...

Fañch Broudic : C'est ce que vous appelez "le parcours" ?

Rémy Guillou : Oui, c'est ce que nous essayons de faire. Le but est de promouvoir le breton et le bilinguisme dans l'académie de Bretagne. Pour y parvenir, il faut des parcours : des classes primaires, puis des collèges et enfin des lycées. Il faut avoir assez d'élèves pour ouvrir des classes dans le primaire, ensuite dans les collègues pour terminer avec les lycées.

Commentaire : L'aveu est ici d'envergure. A la logique de développement qui prévalait péniblement ces dernières années, le rectorat a substitué une stricte logique comptable. Le refus d'ouverture à Guichen n'a pas amené à la création d'une 3e classe à Bruz... mais les enfants de Guichen, faute de classe bilingue dans leur école, n'apprennent toujours pas le breton. Et Guichen n'est pas le seul problème de cette rentrée. A Vitré, l'IEN a refusé une ouverture en invitant les parents à inscrire leurs enfants.... à Rennes !

A Ploeren, l'ouverture a été refusée alors que le nombre d'élèves répondait aux critères annoncés par M. Guillou. A Lorient-Merville, 15 élèves ne peuvent plus apprendre le breton. A Saint-Etienne-de-Montluc et à Coueron, des demandes d'ouverture ont été refusées. Ces erreurs ne seront pas sans conséquence : Le refus d'ouverture à Guichen empêchera, dans les prochaines années, d'alimenter le collège de Bruz. Le refus de continuité à Lorient-Merville empêchera d'alimenter le collège du secteur ! A Vitré, les carences de l'école publique ont amené les parents à se tourner vers l'école catholique qui, elle, a accepté l'ouverture.

Fañch Broudic : Ca nous amène au contrat de plan dont l'avenant pour le breton n'est pas encore ratifié. De même pour les écoles... Est-ce-que cela avance ?

Rémy Guillou : Oui. Et cela montrera la volonté du rectorat de développer l'enseignement bilingue. C'est certain. Fañch Broudic : Ce sera signé avant la fin de l'année ou il faudra encore attendre ? Rémy Guillou : Je l'ignore. Ca ne dépend pas de moi. Mais je crois que ça progresse bien.

Fañch Broudic : Que contiendra ce contrat de plan ? Peut-on dévoiler une partie ? Ou quel est l'état d'esprit de ce contrat ?

Rémy Guillou : Il y a plusieurs choses. D'abord, le but est qu'à la fin du contrat de plan, en 2013, aucun enfant de Basse-Bretagne, pour commencer, ne soit à plus de 20 km d'un collège bilingue. Tous les enfants qui le désirent pourront aller en classe bilingue. Le deuxième but du rectorat est d'améliorer l'enseignement en établissant des programmes officiels et il y aura des évaluations pour voir le niveau des élèves. Il y a aussi un autre but important : essayer de remplir les classes. Aujourd'hui, il y a beaucoup de classes, en collège et au lycée, avec très peu d'élèves. Prenons l'exemple du public : cette année, il y a moyen d'accueillir 1 980 élèves dans les collèges et les lycées publics, mais on n'en compte que 474 pour l'ensemble de ces classes. Les trois-quarts des classes sont vides : ce n'est pas possible, ce n'est pas efficace de travailler avec de telles classes. Et en plus, ça ne plait pas trop aux professeurs.

Commentaire : On le voit : la logique comptable continue ses ravages... Les 3/4 des classes seraient vides ? Mais sur quoi se base une telle désinformation ? Combien vaut un professeur ? 15 élèves ? 20 ? 30 élèves ? Si le sujet n'était aussi grave, on pourrait en rire : des professeurs qui se plaignent de ne pas avoir assez d'élèves ? En général c'est plutôt l'inverse... Et pourquoi seulement la Basse-Bretagne ? Les autres devront attendre ?

Fañch Broudic : Si de nombreux élèves ne restent dans les filières bilingues que jusqu'en CM2, que font-ils ensuite ? Ils changent d'écoles ?

Rémy Guillou : Ca dépend. ils vont souvent dans la filière bilingue mais ils sont encore trop peu nombreux en CM2 pour alimenter les sixièmes bilingues... Si on prend l'exemple de Lannion, on attendait 30 élèves de sixième et ils ne sont que 13. Pourquoi ? On ne sait pas... Mais on a aussi de bonnes surprises : A Rennes, il y a 26 élèves en sixième cette année.

Fañch Broudic : La région voulait, il y a déjà trois ou quatre ans, 20 000 élèves dans les filièress bilingues d'ici 2010. C'est dans deux ans. Il n'y aura jamais 20 000 élèves d'ici là ?

Rémy Guillou : Ce sera difficile, c'est certain... Déjà, si on arrive à remplir toutes les classes avec toutes les places disponibles, ça augmenterait le nombre d'élèves. Ainsi, non pas en 2010, mais en 2012-2013, on approcherait des 20 000 élèves. ll y aura de la place pour 20000 élèves dans les classes bilingues.

Commentaire : Triste aveu : le plan voté à l'unanimité au Conseil régional est donc bien tué dans l'œuf par le rectorat. A la place des 20 000 élèves voulus par les élus bretons pour 2010, les services de l'état proposeraient "d'approcher" les 20 000 élèves en... 2013... Ce n'est pas sérieux. Où est la respect de la volonté démocratique ? Dans le même temps, 60 000 locuteurs bretons auront encore disparu. Le compte n'y est pas.

Fañch Broudic : Avec assez d'enseignants ?

Rémy Guillou : Ca, c'est une autre question. C'est triste à dire, mais l'an dernier, pour le concours du public, il y avait 24 places disponibles et nous n'avons pu recruter que seize professeurs. Il n'y a pas assez d'étudiants qui apprennent le breton et se dirigent vers l'enseignement. C'est la même chose dans le privé. Fañch Broudic : Que faudrait-il faire ? Rémy Guillou : Il faudrait inciter les jeunes à étudier le breton en fac pour passer le concours et devenir professeur. Car sans professeur, c'est difficile d'ouvrir des classes !

Commentaire : Faux : seulement 20 postes étaient proposés au concours cette année alors que le contrat de plan en prévoyait 50 par an, chiffre qui n'a jamais été atteint au cours des cinq dernières années. De plus, chaque année, de jeunes enseignants bilingues sortant d'IUFM sont nommés sur des postes sans breton, alors que des demandes d'ouverture de classes bilingues ne sont pas satisfaites ! Des enseignants vacataires sont actuellement au chomage, faute de postes alors que la demande existe ! Enfin, pourquoi ne pas inciter les enseignants déjà en fonction à passer l'habilitation pour enseigner aussi en breton ? Dans le cadre de la formation continue, des stages sont proposés, et payés, aux enseignants volontaires pour se perfectionner en anglais. Y compris avec séjour en Grande-Bretagne. Pourquoi la même chose n'est-elle pas proposée pour le breton ? Les organismes de formation existent, et ils sont en Bretagne.

Fañch Broudic : Il y a déjà 700 instituteurs et professeurs rémunérés par le rectorat. Ce n'est pas un budget négligeable ?

Rémy Guillou : En effet. Les professeurs du public et du privé, catholique ou Diwan, sont payés par le rectorat et ça représente un budget d'environ 23 millions d'euros.

Commentaire : Joli tour de passe-passe... N'oublions pas que s'il y a des enseignants, c'est parce qu'il y a des enfants... Si l'enseignement bilingue n'existait pas, les enseignants seraient de toutes façons là. L'enseignement bilingue ne constitue pas une charge supplémentaire, il se substitue à l'enseignement traditionnel. Dire que l'enseignement bilingue coûte 23 millions d'euros, c'est faire de la désinformation. Quant à la rémunération des enseignants dans les écoles privées ou Diwan sous contrat, l'état n'en prend qu'une partie à sa charge... et seulement après cinq ans d'existence de l'école concernée. Ce qui explique, pour part, les difficultés que connaissent les écoles Diwan pour répondre à la demande et se développer.

Fañch Broudic : J'aurais aimé parler des programmes. Je n'y comprends pas grand chose, entre les échelons A2 ou C1... On ne risque pas de dévaluer l'enseignement du breton ?

Rémy Guillou : je ne le pense pas. Il faut prendre les enfants avec le niveau qu'ils ont. Aujourd'hui, les enfants qui fréquentent les filières bilingues ne vivent plus dans un environnement bilingue breton-français. Il faut les prendre comme ils sont, leur apprendre un maximum de breton pour leur permettre d'avoir un bon niveau en arrivant en terminale.

Commentaire : Un point de vue qui n'est celui des enseignants bretons. Voir le site de l'UGB et la pétition en ligne pour le retrait des nouvelles directives sur les programmes en langues régionales. (2)

Désinformation, quand ce n'est pas mensonge... La politique de dl'éducation nationale en matière d'enseignement bilingue est en nette régression. En Bretagne, le rectorat ne mène aucune action en faveur de l'enseignement bilingue, en faveur de l'enseignement du breton. A l'heure où continue de se négocier, dans le plus grand secret, un avenant au contrat de projet/région sur la politique linguistique, à l'heure où le plan pour la sauvegarde de la langue bretonne voté par le conseil régional en décembre 2004 n'est plus qu'un vœu pieu, la seule solution pour sauver la langue bretonne est que l'enseignement bilingue soit proposé dans toutes les écoles de Bretagne.  

Oui à l'enseignement bilingue dans toutes les écoles, dans les cinq départements bretons. 

Pour voir l'émission sur le site de France 3 Ouest, suivre ce lien  (voir le site)

Vous pouvez réagir publiquement à) cet article sur ouiaubreton en suivant ce lien : (voir le site)  

- (1) Source des données chiffrées : Association Dihun (voir le site)

- (2) Lire l'article "L'UGB appelle à signer une pétition contre les nouveaux programmes Langues régionales" (voir le site)

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