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François III de Valois, duc de Bretagne, mort en 1536.
François III de Valois, duc de Bretagne, mort en 1536.
- Chronique -
Chronique de la semaine : le pouvoir, les Bretons l'ont… mais....
Les Bretons et les Bretonnes se plaignent de l'autoritarisme de Paris, de Bruxelles, mais encore des Parisiens et des étrangers qui viennent envahir notre belle Bretagne durant les trois mois
Par Frédéric MORVAN pour FM le 15/08/15 22:59

Les Bretons et les Bretonnes se plaignent de l'autoritarisme de Paris, de Bruxelles, mais encore des Parisiens et des étrangers qui viennent envahir notre belle Bretagne durant les trois mois d'été, lorsque notre Bretagne est à son top, où le ciel se reflète dans une mer qui brille de mille feux… lorsqu'il ne pleut pas bien sûr. Je lis que la Bretagne a été et est colonisée par la France depuis le faux traité d'Union de 1532. En fait, il n'y a eu pas de traité, mais des édits du roi François Ier, alors régent du duché pour son fils le duc de Bretagne François III, aussi dauphin de France (et donc prince héritier du royaume de France) qui fut le dernier prince couronné duc de Bretagne le 14 août 1532. Ces édits royaux répondaient à la demande des Etats de Bretagne, c'est-à-dire aux députés de la Bretagne, dont certains, d'après ce qu'a raconté par la suite le chroniqueur de la fin du XVIe siècle, Bertrand d'Argentré, reçurent du roi de l'argent. Avaient-ils vraiment besoin d'argent pour faire cette demande ? C'est oublier aussi, bien vite, la parenté bretonne du roi François Ier qui, à cause de sa grand-mère paternelle, Marguerite de Rohan, avait plus de sang « breton » que sa belle-mère, Anne de Bretagne. François Ier était apparenté ainsi à toute la haute et très puissante noblesse bretonne. Il faut aussi savoir enfin que cette « Union » de la Bretagne à la France que d'autres nomment « Annexion » a été préparée par le chancelier Duprat, qui fut un proche d'Anne de Bretagne, et le Breton Louis des Deserts.

A mon humble avis, jamais aujourd'hui les Bretons n'ont été aussi influents. Un chroniqueur d'une chaîne TV d'info a même dit, au moment de l'affaire dite des Bonnets rouges, qu'ils étaient le pivot de la République. L'émigration massive des Bretons à Paris depuis 1880 en est bien sûr responsable. Au recensement de 1911, on comptait 160 000 natifs de Bretagne dans le département de la Seine et 38 000 dans celui de Seine-et-Oise. C'étaient surtout des bonnes et des man½uvriers. Dans les années 1950-1970, la Bretagne expédie des dizaines de milliers de ses fils et filles dans toute la France et bien sûr à Paris, et ils sont beaucoup mieux formés. Pour s'en sortir, tous les Bretons… de Bretagne et de Paris et d'ailleurs… ont trimé surtout à l'école. Très suivis par les parents et poussés par leur entourage, ils ont réussi et réussissent encore les concours de la fonction publique, des grandes écoles et ont peuplé et peuplent toujours (certains disent monopolisent) la haute administration et les grandes entreprises. Ils sont à la tête du monde culturel (Stivell, PPDA, Le Lay, Le Clezio, Nolwenn Leroy, Ozouf, Cornette, etc), du monde économique (Bolloré, Le Duff, Glon, Pinault, Guillemot, Hénaff, etc), du monde politique (Le Drian, Le Branchu, Le Foll pour ne citer que les ministres actuels).

Cependant l'impression générale semble être : on veut que rien ne change. Pas de modifications, pas d'adaptations, pas de modernisations. Qui le veut ? Il faut arrêter de se voiler la face : ceux qui appartiennent à ce qu'on peut nommer l'establishment breton ; ceux qui ont beaucoup à perdre ; ceux qui ont construit leur pouvoir sur un Celtisme clos – on devrait dire un bretonnisme car tout le monde ou presque en Europe de l'Ouest est celte – pour enfermer la Bretagne et sa culture entre des murs imaginaires, ce qui est un non-sens pour un espace aussi maritime que la Bretagne ; ceux qui ont bénéficié d'un système économique reposant surtout sur l'agro-alimentaire, aujourd'hui à bout de souffle, et qui pensent qu'après eux, le déluge et donc n'ont pas voulu préparer l'avenir. Ils ont joué un rôle énorme et, il faut rendre à César ce qui appartient à César, ont permis à la Bretagne d'être une très grande région connue dans le monde entier.

Mais il faut passer à autre chose. On ne peut pas regarder tout le temps en arrière. Il n'est plus acceptable de voir d'importants responsables refuser la diffusion via des sites et les réseaux sociaux.. Il n'est pas non plus acceptable de voir d'autres responsables refuser la publication numérique de milliers d'articles sur l'histoire de Bretagne publiés toujours dans de gros bouquins très coûteux issus des journées de congrès des sociétés savantes bretonnes. Il n'est pas non plus acceptable que l'on m'ordonne de retirer certains de mes articles sur les plus grandes familles de la noblesse médiévales bretonnes (les Tournemine de La Hunaudaye et les Dinan-Montafilant) que j'avais osé publier sur le site Academia.eu sous prétexte que je les avais déjà publiés dans une revue d'une société savante, société savante dirigée par un informaticien, mais qui ne numérise pas les articles… A rien n'y comprendre. Et on me dit que je ne suis pas correct. Permettez-moi de me demander qui est le plus incorrect ?

Il est difficile de quitter le pouvoir, du moins d'en abandonner le peu que l'on a. Certains, beaucoup, s'accrochent à leurs fonctions. Franchement, ils ont peur des nouvelles générations, de l'avenir. Mais on ne leur a jamais demandé de se retirer. On a besoin d'eux, de leurs conseils, de leurs expériences, de leur amitié. A force de jouer à ce petit jeu, face à leurs erreurs, à leur immobilisme, à leur vision d'un autre temps faite souvent de compromission avec un establishment français auquel ils appartiennent souvent, ils finissent par être carrément éliminés.

Une nouvelle génération se lève. J'ai appris qu'un parti breton vient d'avoir un nouveau dirigeant… de 24 ans… Les grands industriels bretons semblent mettre leurs enfants en avant. Les grands responsables du monde culturel, il faut bien l'avouer, restent bien à la traîne.

On ne peut sacrifier des générations. On ne peut pas refuser aux jeunes Bretons et Bretonnes de travailler au pays. On ne peut pas les contraindre à partir parce que, pendant qu'on les forçait à bosser à l'école comme des malades, on ne faisait que préparer sa propre retraite en oubliant bien « involontairement » de créer des emplois pour leur donner du boulot. On ne leur dit qu'une chose : si vous voulez du boulot, partez et ils partent par milliers, dizaines de milliers. A certains, on dit : formez-vous mieux à l'étranger ou à Paris et revenez avec des BAC + 5 et là que trouvent-ils comme boulot : caissière dans un supermarché, guide touristique à 700 euros… et encore ! Sans compter certains que je connais très bien qui ont BAC + 10 et qui sont professeurs dans un très petit collège sur la côte léonarde. J'ai été très surpris lors d'une de mes conférences ce printemps dernier à Paris au Club Erispoë – qui rassemble plusieurs centaines de jeunes Bretons et Bretonnes des Grandes Ecoles – de voir le nombre très important de mains levées lorsqu'on leur a demandé s'ils voulaient travailler après leurs études en Bretagne, même avec des salaires inférieurs. Il est clair que l'exaspération monte, que la cocotte-minute va exploser si cela continue ainsi, si l'establishment refuse de voir la réalité en face et continue d'appuyer de toutes ses forces sur le couvercle.

Quant au rôle de l'Etat de la République française, ce sera le sujet d'un autre article. Je sens que certains ne vont pas trop aimer.

historien de la Bretagne
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