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Détail d’une miniature illustrant l’Estoire del Saint Graal : Joseph d’Arimathie sur son lit de mort confiant le Graal à Alain (Londres, British Library, Ms. Royal 14 E. iii [c. 1315-1325], fol. 86r) © British Library
Détail d’une miniature illustrant l’Estoire del Saint Graal : Joseph d’Arimathie sur son lit de mort confiant le Graal à Alain (Londres, British Library, Ms. Royal 14 E. iii [c. 1315-1325], fol. 86r) © British Library
- Communiqué de presse -
Aux origines brittoniques de la Légende du Graal
Avec ce nouvel essai, le mythologue Valéry Raydon confirme la celticité de la légende du graal et identifie son berceau : c'est au Pays de Galles qu'auraient été imaginées les aventures de Perceval à partir d'un ancien mythe natif. Alors qu'on s'interroge souvent sur la part de l'héritage celte dans la culture occidentale, un legs celtique d'importance discuté depuis longtemps est désormais authentifié avec certitude.
Par Valéry RAYDON pour Terre de Promesse le 19/01/19 17:30

Avec ce nouvel essai, le mythologue Valéry Raydon confirme la celticité de la légende du graal et identifie son berceau : c'est au Pays de Galles qu'auraient été imaginées les aventures de Perceval à partir d'un ancien mythe natif. Alors qu'on s'interroge souvent sur la part de l'héritage celte dans la culture occidentale, un legs celtique d'importance discuté depuis longtemps est désormais authentifié avec certitude.

LE CORTÈGE DU GRAAL : DU MYTHE CELTIQUE AU ROMAN ARTHURIEN

Couverture du livre "Le cortège du graal : du mythe celtique au roman arthurien"

Le cortège merveilleux du graal représente un des thèmes majeurs de la littérature arthurienne. L’immense succès que ce thème a rencontré depuis le Moyen Âge jusqu’à nos jours lui a valu de connaître d’innombrables adaptations artistiques et de devenir un pilier de la culture et de l’imaginaire de l’Occident. La plus ancienne mention relative à ce cortège nous a été léguée dans le roman du Conte du Graal composé par Chrétien de Troyes au cours de la décennie 1180. Le cortège y constitue un élément-clé de l’intrigue consacrée aux aventures de Perceval le Gallois. Le jeune chevalier Perceval appelé à devenir le meilleur chevalier du monde, est amené à recevoir l’hospitalité au château du Roi Pêcheur, et à l’heure du repas voit passer devant lui un intriguant groupe d’objets merveilleux portés par de jeunes serviteurs de noble naissance. C’est le cortège du graal. Il comprend une lance dont le fer blanc saigne continuellement et qui est investie d’un pouvoir guerrier la rendant capable de soumettre l’île de Bretagne à elle seule, un vaissel d’or et d’escarboucles irradiant une lumière solaire, qui est reconnu être le plus riche et le plus sacré du monde et pour lequel est suggéré un possible pouvoir de génération alimentaire sans limites, et enfin un petit tailloir d’argent dont les propriétés sont passées sous silence. Perceval, bien qu’intrigué, refuse de s’informer au sujet du cortège par souci de discrétion. Mal lui en a pris : il apprendra par la suite qu’une demande à propos de ces objets hyperboliques aurait rendu la santé au Roi Pêcheur impotent, et que de son silence découleront des maux sans nombre pour ce souverain, son royaume, et le monde arthurien tout entier. Et Perceval d’entreprendre alors une quête réparatrice pour tenter de retrouver le Château du Graal et poser les questions salvatrices. Le roman de Chrétien, malheureusement inachevé, a laissé irrésolu le mystère de cet étrange cortège.

Cet essai a pour ambition assumée de mettre fin à cette énigme vieille de plus de 800 ans et à un débat scientifique de plus d’un siècle quant à la signification et à la genèse du motif du cortège du graal. Son auteur, Valéry Raydon, à l’aide du comparatisme structural dumézilien, entend démontrer définitivement l’origine celtique du motif, en établissant la correspondance entre cette entité-groupe et la représentation mythifiée d’une ancienne institution de conception indo-européenne qui était partagée par les anciennes sociétés gaélique et galloise – celle des insignes de la souveraineté – et en montrant le recoupement individuel de chacun des trésors qui la compose avec un prototype de talisman royal merveilleux des littératures médiévales des Celtes insulaires. Il entend procéder aussi à une vérification de la celticité du récit percevalien qui accueille le motif, en apportant les preuves irréfutables que le roman du trouvère champenois reprenait dans sa trame, en en respectant scrupuleusement l’enchaînement chronologique des évènements, une source écrite unique qui s’avère être un conte arthurien gallois en prose. Un conte gallois qui présentait une particularité dans sa composition : il consistait en une adaptation littéraire fidèle d’un seul et unique texte mythologique retraçant les Enfances du dieu Lleu Llaw Gyffes.

Au cours des 410 pages passionnantes de cette enquête chirurgicale, Valéry Raydon lève le voile sur les matrices mythologiques celtiques du graal, de la lance sanglante, du tailloir, mais aussi des principaux personnages et épisodes du roman (enfance sauvage du héros, son premier combat, son attraction pour l’armure vermeille, sa rencontre avec Blancheflor, la blessure et la thérapie navale du Roi Pêcheur, le banquet du Château du Graal). Il décrypte le sens de l’épreuve du cortège graalien dans le roman champenois, qui demeure encore, derrière l’habillage chrétien et courtois du roman, une forme d’initiation archaïque rituelle à la souveraineté, où le jeune héros doit manifester sa capacité instinctive à reconnaître les objets hyperboliques constituant les insignes symboliques et les talismans garants du pouvoir et de la prospérité du royaume dont il se trouve être l’héritier présomptif. Il montre enfin l’évolution progressive du thème dans les romans graaliens français suivants, où les objets du cortège reconvertis en reliques de la Passion vont devenir le véhicule promotionnel d’un idéal chevaleresque féodal et chrétien tourné vers la défense du mystère de l’eucharistie.

L’AUTEUR

Valéry Raydon est né en 1973. Il est docteur en histoire ancienne, chercheur indépendant et écrivain. Il est l’auteur d’articles scientifiques et d’essais consacrés à la mythologie comparée intra-celtique et indo-européenne. Il a notamment publié « Le mythe de la Crau. Archéologie d’une pensée religieuse celtique » (2013), « Héritages indo-européens dans la Rome républicaine » (2014), et « Le chaudron du Dagda » (2015); il a également co-édité le collectif « Hagiographie bretonne et mythologie celtique » (2016).

LE CORTÈGE DU GRAAL : Du mythe celtique au roman arthurien par Valéry Raydon (Collection Au cœur des mythes, 6)

Format 17 X 24 cm, 406 pages,index, bibliographie, 30 €

ISBN : 978-2-9561503-0-5

Ebook, 10 € - ISBN : 978-2-9561503-1-2

Dépôt légal : 1er janvier 2019, éditions Terre de Promesse, Marseille

Disponible ou à commander chez votre libraire préféré, ou www.terredepromesse.com

Cet article a fait l'objet de 1138 lectures.
Valéry Raydon, chercheur indépendant, historien, mythologue, auteur
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Vos 4 commentaires
Naon-e-dad Le Jeudi 24 janvier 2019 21:26
" la défense du mystère de l’eucharistie" écrivez-vous...Fichtre!
L'Eucharistie est un fait, une réalité. Une réalité qualifiée de "mystérieuse" en celà qu'elle dépasse l'entendement ou l'intelligence humaine (ce qui ne signifie pas que l'intelligence humaine soit complètement impuissante à y comprendre quelque chose). L'être humain n'a pas les moyens de comprendre en plénitude ce qu'il est ni ce qu'est la divinité. En tant que telle, l'Eucharistie (c'est à dire le don de la divinité à l'humanité) n'a pas besoin d'être défendue, que ce soit par des chevaliers ou autres.
Après, on peut ignorer de quoi il s'agit, on peut en avoir connaissance et s'en détourner ou s'en approcher, ceci est une possibilité ou une attitude personnelle.
Tout celà pour indiquer que la phrase finale de votre article me paraît absconse. Pour le reste, je me réjouis du résultat dont vous faites état, préalablement.
N'oublions pas que si les Celtes de la Britannia ont accepté apparemment aisément le Christianisme, c'est sans doute que leur culture ou leur état d'esprit le permettait. Et le prestige de l'écrit évangélique (lui-même issu d'une culture de l'oralité) face à une culture celtique de l'oralité n'explique sans doute pas tout. Ne peut-on pas concevoir que les Gallois de l'époque étaient plus imprégnés et préoccupés de l'interrogation existentielle que nous ne le sommes aujourd'hui en Europe?
Il faudrait aussi - mais je n'ai pas lu votre livre - situer dans le temps la fondation du récit arthurien par rapport à la floraison de l'école monastique de Sant Iltud en Galles du sud.
Une piste à creuser? Un hentig da doullañ e-barzh?
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Valéry Le Vendredi 25 janvier 2019 15:13
Bonjour Naon-e-dad,
Je vous concède que la dernière phrase du résumé est peut-être maladroite, mais elle résume cependant bien la représentation que se font les auteurs français de romans graaliens postchampenois, le graal est à la fois tenu pour l’écuelle de la Cène et le proto-calice et il dispense aux rares chevaliers élus qui peuvent s’en approcher, des visions extatiques qui leur font expérimenter le miracle de la Présence Réelle du Christ dans l’hostie consacrée et contempler des scènes de la Passion du Christ mort et ressuscité, de la Trinité. Le thème culmine dans la Quête du Saint-Graal avec l’expérience mystique de Galaad : celui-ci contemple à l’intérieur du Saint-Graal au cours d’un sacrement eucharistique, et déclare avant de mourir d’extase : « Je vois sans fard ce que la langue ne peut décrire ni cœur penser, ici je vois le commencement des grandes entreprises et le motif des prouesses, ici je vois les merveilles de toutes les autres merveilles ». Une formulation qui s’inspire de discours de saint Paul mettant en avant l’inintelligibilité de la vision du mystère divin. On peut donc bien parler d’un graal renfermant les « mystères » inintelligibles à l’entendement humain de l’Eucharistie, et d’une chevalerie dont les meilleurs éléments sont appelés à se dévouer à la préservation de la Sainte-Relique dépositaire des secrets du saint-sacrement. Il convient sans doute pour comprendre cette signification revêtue par le graal de la replacer dans l’actualité religieuse contemporaine concernant les débats théologiques sur le sens véritable de l’Eucharistie, lequel aboutit à l’affirmation du dogme officiel de la Transsubstantiation au IVe concile œcuménique de Latran en 1215.
(0) 
Naon-e-dad Le Dimanche 27 janvier 2019 16:41
@Valéry
Merci pour votre réponse.
Le propos de Galaad, que vous rapportez, indique clairement une authentique expérience. Il s'agit donc d'un témoignage très intéressant que l'on peut croiser avec d'autres à différentes époques (je pense à un écrit de Teilhard de Chardin - XX° siècle -, sans équivoque).
Les Evangiles qui rapportent très brièvement et très rarement plusieurs circonstances ineffables (la Transfiguration, par exemple) le font toujours avec une sobriété remarquable, comme sont sobres également les écrits de grands saints (Thérèse d'Avila, par exemple). Tant il est de la dernière évidence que "la langue [humaine] ne peut décrire" ce qui ne relève ni des sens, ni du psychisme. La remarque attribuée à Galaad me paraît être un gage de sérieux concernant ce type de témoignage.
Du coup, je lirai peut-être votre livre. Rak-se e c'hellfen lenn ho levr, marteze...:-)
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Naon-e-dad Le Dimanche 27 janvier 2019 18:08
@Valéry
Merci encore pour votre réponse.
Ah ! Il me faut ajouter encore une remarque, à la suite de votre post, pour le lecteur non-averti.
Ne pas confondre «nature » (terminologie latine) et « substance » ‘(terminologie grecque, sauf erreur) .Ces deux catégories de description du réel sont distinctes.
La « nature » est accessible à l’observation scientifique (physique de la matière).
La « substance » est plutôt une notion philosophique, et n’est pas accessible à l’observation scientifique.
Pourquoi préciser cela ? Parce que la « Transubstantiation » -le mot est volontairement construit sur le vocable « substance » - n’impacte pas la « nature ».
Concrètement, une hostie consacrée et une hostie non consacrée ne diffèrent pas dans leur « nature » (du pain sans levain), mais dans leur « substance » (c’est ici que nous pouvons comprendre les expériences et rares témoignages évoqués plus haut).
Or, il peut arriver de lire des commentaires navrants sous la plume d’universitaires ou d’auteurs, manifestement ignorants du domaine.
Comment dit-on cela en breton ? / Penaos e vez lâret-se e brezhoneg ?
. « Sakramant an Aoter», evel just (diwar: An Tad Medard, Ar Werc ‘hez Vari Hor Mamm, 1936, pajennad 70)
. certains dictionnaires, s'essayant au néologismes, hésitent et n'évitent pas la confusion.
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