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Blé noir : les irréductibles Nantais
Le blé noir, une culture d’antan qui fleure bon en ce moment. Aurélia Geffray a manifestement de l’affection pour ce type de culture. «Regardez cette vague blanche qui ondule sous le vent» dit son père Jean-Claude Geffray, à l’origine de cette culture à Nantes. «La seule ferme de Nantes» dit-il, à la lisière de Carquefou.
Par bernadette Poiraud pour Journal La Mée le 28/08/06 15:26

« Le blé noir, une culture d’antan qui fleure bon en ce moment » : Aurélia Geffray a manifestement de l’affection pour ce type de culture. « Regardez cette vague blanche qui ondule sous le vent » dit son père Jean-Claude Geffray, à l’origine de cette culture à Nantes. « La seule ferme de Nantes » dit-il, à la lisière de Carquefou.

Jean-Claude Geffray, 61 ans, retraité de l’industrie automobile, ne voulant pas laisser ses terres en friches, a essayé l’an dernier de faire deux hectares de blé noir. Cette année c’est quatre hectares. « Que faire avec cette récolte ? J’ai mis une petite annonce dans un gratuit de Blain, j’ai eu aussitôt trois réponses de meuniers et un contact avec un entrepreneur disposant d’une installation de stockage et de tri. J’ai traité avec ce dernier car, pour lui, je pouvais livrer le grain brut sans avoir à le venter » explique Jean-Claude Geffray.

Le blé noir, encore appelé « la céréale du pauvre » est une plante très peu gourmande qui pousse sur des sols pauvres. Inutile de labourer profond. « Je sème en partie à la main, comme mon père, par plaisir. Ah le geste auguste du semeur ! Pour le reste je fais appel à un entrepreneur » .

Ni engrais, ni désherbant

Jean-Claude Geffray sème à raison de 65 kg à l’hectare, soit le double de ce qui se fait d’habitude. « Comme cela je n’ai pas de mauvaise herbe : le blé noir étouffe tout » . « Ni engrais, ni désherbant, je cultive à l’ancienne » .

Son grain est très apprécié des pigeons et des « péchelettes » (des petits oiseaux gris, un peu plus petits que les moineaux) : « Dès qu’il est semé, les voilà. Mais en 8 jours il est levé, on commence à voir les jeunes pousses » .

Le semis se fait à la fin mai. « on doit le semer au plus tard le premier vendredi de juin, pour qu’il soit gueurnu » [Gueurnu, prononciation locale de "grenu" : qui porte des grains].

Il n’aime pas le brouillard du petit matin : le soleil qui se lève grille la fleur et l’empêche de faire du grain.

La parcelle est parfois ravagée par les sangliers venus du marais de Mazerolles : « un passage peut en coucher suffisamment pour perdre 500 kg de grain ! » .

Ses fleurs attirent les papillons et les abeilles. « Celles-ci créent un intense bourdonnement le matin ! » dit Aurélia. [Le miel de blé noir est de couleur foncée].

Un peu d’histoire

Introduit d’Asie Mineure en Europe à l’époque des Croisades, le sarrasin devient dès le XVIe siècle une des cultures prépondérantes de Bretagne. Le sarrasin - dénommé blé noir ( « gwinizh du » ou « ed du » en breton) - constitue pendant longtemps la principale culture vivrière de la population bretonne, et la base de son alimentation sous forme de bouillie, et surtout des célèbres galettes et crêpes. Il entre aussi dans l’alimentation animale, et sa « paille » est utilisée pour la confection des litières.

La volonté de la Duchesse Anne d’assurer des récoltes aux plus démunis a permis d’étendre cette culture en Bretagne. La nouvelle "céréale" s’est imposée au point de devenir l’emblème de la nourriture bretonne.

A son apogée, vers 1862, le sarrasin représentait une surface de 740 000 hectares en France, dont 50 % pour la seule région de Bretagne. Mais, dès la fin du XIXe siècle, sa culture régresse sur tout le territoire national : moins de 40 000 ha en 1965, et 2 500 ha environ en 1985.

Pourtant la tradition culinaire reste très vivante (crêpe, galette, pâtisserie, bière bretonne, kig-ha-fars) et oblige sans cesse à accroître les importations de Chine ou du Canada « mais le blé noir canadien a de plus gros grains : les pâtissiers n’en veulent pas » dit Jean-Claude Geffray.

Pas une céréale !

Le sarrasin n’est pas une céréale, c’est le fruit d’une plante de la famille des polygonacées (qui comprend aussi l’oseille et la rhubarbe). La plante fait 70 cm à un mètre, le pied est rouge et progressivement toute la tige est rouge au fur et à mesure du mûrissement des grains.

La fleur est en réalité une grappe de petites fleurs (plusieurs centaines par tige), chacune d’elles portera un grain. « Les grains les plus beaux sont sous la tête, car ceux du dessus brûlés par le soleil, sont plus petits et plus légers » explique Jean-Claude.

Pour la consommation, il s'utilise en farine, en grains (entiers, écalés ou concassés), en miel, en germes et en pousses.

Sa graine est appelée akène (fruit sec à une seule graine). De couleur sombre, elle a une forme triangulaire. Concassée et grillée (kacha) elle peut être utilisée comme le riz ou les pommes de terre. On la met notamment dans les soupes et les ragoûts. Les graines non grillées ont une saveur plus délicate, qui conviendra mieux à un poisson ou à un dessert.

La farine de sarrasin est bien sûr utilisée dans la confection de crêpes. Attention, sans gluten, elle ne lève pas, et doit donc être mélangée à une farine panifiable si l’on veut faire du pain.

La farine est la forme la plus utilisé. Les Américains l’utilisent pour faire les pancakes, les Bretons pour les crêpes, le far breton, l’hydromel chouchen, les Italiens pour les pâtes et les Japonais pour leur soba (pâtes).

Les écales aspirées des grains de sarrasin servent de bourre d’oreillers pour les consommateurs allergiques aux plumes, à la poussière et au pollen. Les tiges du blé noir, creuses, peuvent servir après la récolte à faire du compost pour les champignons, ou à faire un « paillage » de protection pour les jardins.

Bon pour la santé !

Très facile à digérer et énergétique, cet aliment est riche en plusieurs vitamines dont B1, B2, B3, B6, E et minéraux dont magnésium, potassium, cuivre, calcium, fer, phosphore. Il contient les huit acides aminés essentiels -dont certains se trouvent surtout dans les protéines animales- mais aussi beaucoup de magnésium et de calcium.

Contrairement aux céréales, il ne contient aucun gluten, ce qui en fait un intéressant substitut du blé en cas d’intolérance.

Le sarrasin contient aussi de la rutine qui protège de la fragilité capillaire. La rutine favorise ainsi une bonne circulation sanguine et aide à prévenir les varices et autres problèmes. Des propriétés nutraceutiques (1) utiles pour abaisser le taux de cholestérol et contrer le diabète sont aussi à l’étude.

Une plante bio

Semée fin mai, la plante fleurit fin juillet, les graines arrivent fin août, la récolte se fait en octobre. « Je fais venir une machine à battre qui me livre le grain en vrac. Il y a tout un tri à faire pour éliminer ce qu’on appelle " le pou du blé noir " c’est-à-dire les petites feuilles. Il faut aussi éliminer les grains trop légers. C’est pourquoi il faut venter la plante » . Ceci représente un gros travail , « mais je n’ai pas à le faire puisque j’ai trouvé à vendre le sarrasin à un grossiste qui possède un dispositif de tri » .

Cette plante rustique pousse très vite, avec peu d’engrais et sans herbicide. Elle est d’une résistance exceptionnelle et rend inutiles les insecticides, ce qui en fait une plante idéale pour la culture biologique. Elle est cultivée en URSS, Pologne, Canada, Japon et France en Bretagne.

Les irréductibles Nantais

Avec leurs 4 ha de blé noir, à Nantes, Monsieur et Madame GEFFRAY font figure d’irréductibles gaulois sur des terres que guignent tous les promoteurs immobiliers ! Aurélia Geffray et B.Poiraud

(Recherches et photos : Aurélia Geffray)

Quelques références : (voir le site) ?page=Hstoriqueetref=02

Et le numéro 45 de la revue « Ar Men »

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GALETTE DE BLE NOIR

Pour 500 g de farine de blé noir : deux oeufs une cuillérée d’huile un demi-litre de lait trois quarts de litre d’eau et du sel Bien mélanger. Essayer ensuite une première galette, si elle est trop épaisse, rajouter de l’eau

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BOUILLIE DE BLE NOIR

un kg de farine de blé noir 2 litres de lait 3 litres d’eau, et du sel bien sûr

Faire cuire comme une bouillie. Verser ensuite une part dans l’assiette creuse des convives. Chacun fait alors un trou au milieu, comme un puits, et y met un bon morceau de beurre (demi-sel). On mange alors une cuillerée de bouillie que l’on trempe dans le beurre fondu.

Aurélia Geffray et B.Poiraud

Pour voir d'autres photos : (voir le site)

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