Je suis favorable à la possibilité d'amender les terres par du sable coquillier, tout particulièrement pour les légumiers, et je comprends parfaitement les besoins de l'agriculture en la matière. Il ne faut d'ailleurs pas, comme s'évertuent certains, à opposer les activités économiques, les unes aux autres. En plein milieu d'une crise économique, il faut au contraire conforter toutes les secteurs qui créent de la richesse et de l'emploi et régler les problèmes avec bon sens. L'agriculture doit pouvoir bénéficier de sable coquillier, mais extrait à un autre endroit ; des solutions existent. Les Anglais l'ont prouvé en l'extrayant au large dans la Manche. La pêche doit pouvoir poursuivre son travail tout comme les autres activités humaines : tourisme, nautisme… dans le respect de l'ensemble des autres activités économiques, sans les fragiliser ou les menacer. L'extraction de sable coquillier doit donc se faire à un autre endroit que celui aujourd'hui visé. Les activités maritimes, et tout particulièrement celles de la pêche, doivent être préservées et respectées.
Mais aujourd'hui rien ne dit que le projet de la Compagnie Armoricaine de Navigation (CAN) filiale du groupe Roullier, soit exclusivement destiné, sur le long terme, à l'agriculture. La CAN veut en effet extraire 400 000 m3 de sable coquillier par an sur une période de 20 ans, soit au total 8 millions de m3, d'une dune sous-marine située à la « pointe de Lannion » à moins d'un kilomètre de deux zones classées Natura 2000 dont celle de la réserve des Sept Iles, sanctuaire d'oiseaux marins. La zone que convoite la CAN est un endroit où vivent et se développent notamment les lançons qui sont à la base de la nourriture de nombreux oiseaux marins, de poissons tels le lieu jaune et le bar et des poissons plats tels la barbue et le turbot. Cette zone est critique pour les pêcheurs professionnels qui y passent plus de la moitié de leur temps de pêche et y placent leurs casiers. Elle est également une zone fréquentée par les pêcheurs plaisanciers et les plongeurs soit plus de 10 000 personnes par an.
La raison et le bon sens devraient prévaloir en la matière et la zone d'extraction, comme le recommande l'association « Le peuple des dunes » , se situer au large, comme le font les Anglais dans la Manche. L'extraction de sable coquillier, dont on pressent qu'il pourrait, à terme, surtout servir à la construction (il s'agit quand même du groupe Roullier qui une fois obtenu l'autorisation pourrait faire ce qu'il veut…) et non plus à l'agriculture, ne doit pas compromettre les emplois des autres secteurs d'activités que sont la pêche, le tourisme ou le nautisme. Ce sont plus de 350 emplois qui sont en jeu. Rien ne sert d'opposer des catégories professionnelles entre-elles à l'heure où des solutions en commun doivent être trouvées pour préserver les emplois et le développement économique sur notre territoire. C'est le sens de ma démarche en allant manifester samedi à Lannion.
Christian Troadec
Maire de Carhaix et Porte-parole de Nous te ferons Bretagne