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- Discours -
16 mars 2009 - Session plénière du CESR : création du nouveau Conseil Culturel, de l'EPCC Ofis, etc.
Cette session avait à son ordre du jour l'examen des bordereaux concernant la création du Conseil Culturel de Bretagne et de l'EPCC Ofis ar brezhoneg, de même que deux autres documents relatifs à la langue.
Alan Monnier Par Institut Culturel de Bretagne le 17/03/09 3:50

Cette session, qui a vu la présence de M. A. Lespagnol puis de M. Y-B Thomin, représentant le Président en déplacement au Vietnam, avait à son ordre du jour l'examen des bordereaux suivants concernant la culture et la langue :

- création du Conseil Culturel de Bretagne

- création de l'EPCC Ofis ar brezhoneg

- convention additionnelle au Contrat de projets Etat-Région sur l'enseignement et la pratique sociale de la langue

- institution des bourses destinées à encourager le recrutement d'enseignants de breton/en breton dans l'une des trois filières

Ces bordereaux ont été examinés à divers moments de la journée, M. le Préfet de Région, entouré des responsables des services de l'Etat, étant venu communiquer sur la politique de l'Etat en Région, politique dont les bilans 2006 et 2007 étaient présentés à l'assemblée.

Interventions du représentant de l'Institut Culturel de Bretagne et du Conseil Culturel de Bretagne, A. Monnier :

- concernant la création du nouveau Conseil Culturel :

J’interviendrai au nom de Kuzul Sevenadurel Breizh et Skol-Uhel Ar Vro. Je souhaiterais revenir d’abord sur le terme de créolisation employé par notre Collègue rapporteur et qui me fait immédiatement penser aux écrits d’Edouard Glissant et Patrick Chamoiseau. Ces auteurs particulièrement attachants – et qui établissent par ailleurs comment la créolisation s’oppose à la pidginisation - rappellent dans un ouvrage récent qu’ « il n’y a pas de beauté dans les mémoires solitaires, les fondamentalismes, les histoires nationales sans partage, les épurations ethniques, la négation de l’autre, les expulsions d’émigrés, la certitude close. Pas plus de beauté dans l’essence raciale ou identitaire… ». L’occurrence de l’examen de ce bordereau dans le contexte de ce qui vient de se passer aux Antilles, patrie de ces auteurs, est un clin d’œil que doivent savoir reconnaître les acteurs sociaux, économiques et culturels.

Lorsqu’il a pris ses fonctions en 2004, le Président du Conseil régional l’a déclaré d’emblée, citant Xavier Grall, autre poète qui m’est cher, et prolongeant la pensée d’un grand historien breton aujourd’hui disparu : « Nous te ferons, Bretagne. » L’emploi, dans cette phrase, du futur comme du pluriel traduisent assez le caractère collectif et non exclusif de cet engagement, mais ils en expriment non moins surement la détermination et le caractère tangible.

L’institutionnalisation d’un Conseil culturel de Bretagne/Kuzul Sevenadurel Breizh, une première dans l’Hexagone, peut et doit faire partie de cet effort collectif auquel nous sommes tous appelés à participer et qui doit profiter à tous, en Bretagne mais bien au-delà de la seule Bretagne, afin que soient respectées les exigences d’une diversité culturelle bénéfique à tous.

Plus récemment, concluant le colloque co-organisé par Dastum et l’IRPa sur le patrimoine culturel immatériel, le Président Le Drian a affirmé : « Il faut à la fois la création et la transmission. Il faut donner les moyens à la transmission et il faut donner les moyens à la création. La transmission pour la transmission mène aux ghettos. La création sans transmission, c’est l’éthéré. Donc pas de création sans transmission et pas de transmission sans création. […] Il n’y a pas d’innovation sans mémoire. Gardons cela comme axe d’action collective en Bretagne. »

Porter le projet de ce Kuzul nevez, ce n’est pas seulement reconnaitre l’effort militant assumé depuis des décennies par le monde associatif, avec le soutien des collectivités, c’est aussi, pour reprendre les termes de Jean-Yves Le Drian « donner les moyens » à la transmission et à la création, l’une ne se faisant pas sans l’autre.

C’est pourquoi il importe que ce Conseil soit pleinement représentatif de ce qui constitue la richesse et la diversité de la culture bretonne d’aujourd’hui, largement et légitimement représentées au sein de l’actuel Conseil Culturel de Bretagne ; qu’il soit pleinement représentatif de ce que le CESR a su discerner, il y a bientôt dix ans, comme composant la « dynamique culturelle bretonne/lañs sevenadur Breizh » (rapport CESR janvier 2000) ; il importe que la transformation du Conseil associatif en conseil institutionnalisé ne laisse aucun secteur de côté : ni la représentation des territoires, ni la réflexion d’ordre juridique (EBLUL, Bretagne Réunie), ni la préoccupation économique (Produit en Bretagne), au moment où Alain Glon, à propos du modèle socio-économique breton, vient de mettre en garde le politique contre « l’incompréhension de l’économie » (cf. Armor-Magazine, mars 2009), ni bien entendu la somme d’efforts prodigués depuis des dizaines d’années dans le cadre de l’éducation populaire, à l’institut Culturel de Bretagne comme à l’Institut régional du patrimoine de Bretagne par exemple, grâce à des relations renouvelées avec le monde de l’Université ; enfin, il ne peut s’agir non plus d’ignorer les liens qui se sont tissés à l’international avec d’autres régions européennes, avec d’autres cultures du monde.

Concernant les modalités, et quelles que soient les mutations ultérieures, n’oublions pas qu’il est plus facile de constater la vacance d’un siège que de réunir une nouvelle assemblée pour en créer de nouveaux. Tandis que sur le plan des principes, il est primordial que soit reconnue au monde associatif la même capacité à désigner ses représentants au sein du premier collège que celle dont disposeront les structures siégeant dans le 2ème collège.

Le monde associatif sait par nature qu’un héritage, cela se partage et cela représente une richesse pour tous. Aujourd’hui, il s’agit bien, nous voulons le croire, de prolonger les nombreux acquis du mouvement culturel reconnu par la Charte de 1977, de les amplifier et de les rendre disponibles à une population bretonne plus large encore, les rendre accessibles, grâce aux nouvelles technologies et aux facilités de déplacement, aux nombreux amis de la Bretagne dans le monde.

Ainsi, pour reprendre les termes utilisés par Glissant et Chamoiseau, c’est bien de « l’intraitable beauté du monde » dont il s’agit. Cette beauté du monde que célébrait déjà en 1916, juste avant de tomber mais sans que sa voix pour autant ne s’éteigne, le Grand Veilleur/ar Gédour Braz, Yann-Berr Kalloc’h :

« Me zo er Gédour braz én é saù ar er hleu.

Goud e hran petra on ha me oér petra hran :

Oll kened er bed é, en noz-man, e viran. »

« Je suis le grand veilleur debout sur la tranchée,

Je sais ce que je suis et je sais ce que je fais :

[…] C’est toute la beauté du monde que je garde cette nuit »

D’eus hor kartér-noz, du fond de notre « quart de nuit », avec l’installation de ce conseil, souhaitons sortir de cette même nuit de l’oubli, souhaitons tous ensemble mieux savoir qui nous sommes et ce que nous faisons, dans quelle mesure nous participons nous aussi, - essentiellement - à notre place, à la richesse, à la beauté du monde.

Ma emañ kont ar c’hiz-se, chañs vat a hetomp deoc’h gant ar Kuzul sevenadurel nevez. Trugarez vras evit hoc’h sel vat.

- concernant la création de l'EPCC et les autres bordereaux liés à la politique linguistique :

J’interviendrai au nom du mouvement associatif culturel, dont d’ailleurs l’Office de la langue bretonne/Ofis ar brezhoneg est issu et qui regroupe les trois filières d’enseignement bilingue ou en breton.

Une nouvelle fois, je ferai appel au témoignage d’Edourad Glissant qui confie : « De mon point de vue d’écrivain, j’écris en présence de toutes les langues du monde, même si je n’en connais qu’une seule » pour finir par l’assurance « que le multilinguisme ne se ramène pas au développement d’un plurilinguisme quantitatif, le multilinguisme relève [...] aussi d’une sensibilité nouvelle, liée à ma fréquentation d’une poétique de la mondialité. »

Dans ce contexte, tous les efforts entrepris par les collectivités, ici bien sûr la Région, de même que dans le très intéressant bordereau instituant les bourses d’études, ailleurs la Région et l’Etat, dans le bordereau créant le comité de suivi, toutes ces initiatives doivent être saluées pour ce qu’elles sont : non seulement la mise en œuvre à moyen ou long terme de ressources pour le conservation et le développement de la langue bretonne, sans oublier le gallo, mais également une contribution au maintien de la diversité culturelle universelle.

Le professionnalisme acquis par l’Ofis en a fait un outil fiable et efficace. La transformation en EPCC de cet outil doit inscrire la tâche qui est la sienne dans la pérennité et la sécurité pour celles et ceux qui vont pouvoir utiliser son travail, comme pour celles et ceux qui y ont consacré leurs efforts, à titre professionnel ou bénévole, toutes ces dernières années.

Aux observations faites par la Commission quant aux modalités de fonctionnement (gouvernance, expertises, définition des missions) et de recrutement de l’EPCC, j’ajouterais que, concernant l’ensemble de la politique linguistique telle qu’elle est envisagée sous l’angle des différents bordereaux à l’examen de cette session, il semble que dans un souci d'efficacité et pour éviter de multiplier les structures redondantes, il serait plus cohérent que le comité Etat-Région se rapproche de l'outil de politique linguistique public qui rassemble les acteurs et où les pouvoirs publics Etat-Région seront majoritaires . Ceci afin de bien déterminer qui fait quoi et pour essayer d'envisager des solutions pratiques aux problèmes qui peuvent surgir quant aux modulations d’effectifs. En effet, malgré les efforts entrepris, la rentrée ne s'annonce pas sous de très bons auspices puisque pour la première fois aucun nouveau site bilingue public ne devrait ouvrir. Après 5 ans de politique linguistique régionale, cela laisse entendre que l’efficacité peut encore être accrue : la mise à disposition de nouveaux outils mais également la capitalisation de l’expérience constitueront des atouts majeurs pour les collectivités comme pour les usagers.

E gwirionez, posubl eo d’ober buanoc’h ha gwelloc’h ha muioc’h ha mont war-raok gant ar brezhoneg.

Evel just, omp gouest ! Yes, we can !

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