Au bout de 30 ans, il est devenu évident que les outils créés par la Charte culturelle à partir de 1977, Institut Culturel, Conseil Culturel, Agence technique, devaient être rénovés et adaptés aux réalités actuelles.
Le Président Le Drian a souhaité réformer ces 3 organismes et on ne peut que l'en féliciter, même si l'on peut regretter le déficit de débats et de concertations publiques avec l'ensemble des acteurs culturels concernés.
L'une des évolutions majeures soutenues par l'exécutif « régional » est la transformation du Conseil Culturel de Bretagne en Conseil consultatif auprès du Conseil régional. L'idée est intéressante et reconnaît l'importance de la dimension culturelle dans la société bretonne actuelle.
Il n'en reste pas moins que 3 questions se posent face à cette évolution :
1- — Une question du ressort des associations culturelles bretonnes membres de l'actuel Conseil culturel : la création de ce Comité consultatif (ou un autre nom mais il s'agit de cela) ne peut et ne doit pas remplacer le Conseil culturel actuel qui, au-delà de ses activités de conseil et de rapporteur, est aussi, en quelque sorte, un lobby agissant vers l'ensemble des collectivités bretonnes ainsi que vers l'État ; ce rôle nécessaire ne sera pas pris en charge par un Comité consultatif qui sera dépendant d'une collectivité en particulier, dans ce cas le Conseil régional, et des politiques qui sont à sa tête.
2- — L'utilité d'un tel Comité consultatif est évidente mais cette utilité ne sera réelle que s'il dispose d'un minimum de liberté d'expression qui ne peut être garanti que par une composition réellement représentative du monde culturel. Qui décide des membres éligibles à ce Comité consultatif ? Sur quels critères ? Enfin, le fait que ce soit le président de la collectivité « régionale » qui, a priori, soit celui qui accepte ou refuse la participation d'untel ou untel nous semble plus inquiétant qu'autre chose ; c'est mettre entièrement entre les mains d'un politique, quel qu'il soit à l'avenir, un organe qui théoriquement doit parler au nom de l'ensemble des acteurs concernés. Ce fonctionnement, s'il est confirmé, est porteur, à terme, de conflits et de contradictions.
En outre, il serait inacceptable que le monde culturel de Loire-Atlantique n'y soit représenté que de façon marginale.
3- — Enfin, la création de cette nouvelle structure pose la question de la définition même du concept de « culture bretonne » : autant, des années 70 aux années 90, il était nécessaire de porter un effort volontariste sur la promotion de la culture issue de la tradition bretonne, autant actuellement, il nous semble nécessaire de poser la question de la dimension du terme «culture bretonne » . (La langue bretonne étant une question transversale est à traiter spécifiquement).
Peut-on continuer à scinder en deux espaces distincts la culture des habitants de ce pays : d'un côté, « la culture bretonne » , de l'autre la «culture » tout court ? Cette distinction est en fait fictive et contre-productive. La culture de l'ensemble des habitants de la Bretagne doit être considérée comme la culture de la Bretagne dans toute sa diversité : penser la culture de la Bretagne comme étant l'ensemble des expressions culturelles de Bretagne, et donc, la culture de la Bretagne comme étant la culture bretonne, en clair, avoir une perspective bretonne, aussi bien nourrie de nos spécificités que de nos échanges et notre participation aux courants culturels européens et mondiaux ; c'est, à notre avis, la seule voie novatrice qui permettra d'enrichir la vie culturelle de ce pays. En ce sens, la composition de ce Comité consultatif doit refléter la diversité des expressions culturelles, ce serait un premier pas en direction de l'affirmation de la dimension bretonne de la culture de l'ensemble des habitants des 5 départements.
Pour le Parti Breton,
Jacques-Yves Le Touze