UN JEU POUR NOËL
Il est une Union Démocratique qui se sent aussi à l'aise dans sa réalité démocratique que l'était la République Démocratique Allemande.
Elle tombe non seulement dans un irrédentisme surprenant, mais encore a-t-elle l'audace d'afficher un découpage territorial comme si ces terres étaient inhabitées. Belle ingérence !
On découpe, on décide, on impose. Quid des personnes qui habitent ces espaces et leur donnent vie ?
D'aucuns diront que ce n'est qu'une proposition, malencontreuse sans doute, mais seulement une proposition. Rien n'est moins sûr.
L'UDB, grâce à sa collaboration active avec le Parti Socialiste, bénéficie de fonds publics. Quand des fonds publics financent une campagne de découpage territorial, sans que les populations résidentes se soient prononcées, il s'agit bien de propagande et non de proposition. 150 panneaux en 4x3, c'est 150 fois 12 m², soit 1 800 m² qui feraient mieux d'être cachés.
Les quelques fonctionnaires fatigués de Pétain qui ont soustrait la Loire-inférieure à la Bretagne se sont inspirés des documents de la kommandantur. Ce n'était pas autre chose qu'un copier-coller, né de la paresse historique de notre fonction publique.
Et voici qu'un parti breton se met à jouer à l'identique. On joue à la Datar….et en accord avec la pensée de Raffarin, on imagine des régions « fortes » .
Ici, la Bretagne, là la Normandie (reconsidérée, refaçonnée), là encore un Val de Loire, et pour finir une Vendée-Poitou-Charentes. C'est un jeu de société qui devrait bien se vendre à l'approche des fêtes de fin d'année. Quelle sensation de pouvoir que de décider des frontières, de créer des limites, de maîtriser l'espace, de le contrôler !
Le département de la Manche n'est guère favorable à une grande Normandie. Dans son avis sur la révision du SRADT, en date du 18 juin 2007, le Conseil général de la Manche précise que « l'intérêt départemental se construit aussi par rapport à la région Bretagne et l'ensemble de l'Arc-atlantique. D'une part, le sud-Manche, notamment l'avranchin, est davantage sous l'influence de la métropole rennaise que caennaise. D'autre part, l'activité du port de Cherbourg, à l'extrémité d'un département connecté dorénavant à l'autoroute des estuaires, dépend aussi de la façade atlantique » .
N'oublions pas que l'avranchin et le cotentin ont été sous le contrôle du roi Salaun. Doit-on y déceler une vision territoriale plus prégnante que la seule référence au duché qui conforte la Bretagne dans une péninsularisation dangereuse ?
La raison dure et immuable, la raison autoritaire n'est jamais autre chose que l'expression d'une déraison.
Que signifie une région « forte » ? Sa superficie ? non Sa population ? non
Sa créativité ? oui Ses libertés ? oui
On a eu l'occasion de l'écrire. Le PIB par habitant de petites régions est très souvent supérieur au PIB de régions plus vastes. La notion de taille critique est une vue de l'esprit. A l'aune d'un tel raisonnement, aucun canton suisse n'existerait plus, Hambourg ne serait plus une ville-état, le Luxembourg aurait disparu et il n'y aurait plus que 15 états aux Etats-Unis d'Amérique.
Ce prétexte de région forte relève du principe de l'exclusion. Il n'y aurait plus d'Alsace sans au moins une Lorraine. Serait-ce suffisant ? Il n'y aurait plus de Corse qui avec ses 8 722 km² ne peut plus prétendre être une région. Que dire de la Savoie, du Pays Basque français quand bien même ce dernier pourrait réintégrer le pays basque historique ?
L'Irlande qui est sept fois plus petite de la France a un Pib par habitant nettement supérieur. ( 35 767 dollars contre 29 554 dollars - Chiffres OCDE-2004)
Où est la démocratie dans cette campagne d'affichage ? A l'évidence, elle n'est pas convoquée.
Hélas, on n'y voit que la trace d'un interventionnisme délétère, l'ombre d'un dirigisme d'une autre époque, l'esquisse d'un léviathan régional qui fait frémir.
Est-ce bien à nous, Bretons, de définir une région Vendée-Poitou-Charentes, sans tomber dans le grotesque et nous mêler de ce qui nous ne regarde pas ?
Le 9 novembre 2007
Jean-Yves QUIGUER
Président du Mouvement Fédéraliste de Bretagne