Nantes, jeudi 2 février, à 20 h.
Dans les rues, il fait déjà -2°. Partout, les passants ont ressorti des cache-oreilles, et des paires de gants, et se déplacent d'un pas pressé vers leur leur domicile après leur journée de travail. Mais ce n'est pas le cas de tous. Au presbytère de saint Clément, un groupe de jeunes s'affaire à confectionner des sandwiches et à faire chauffer de la soupe et du café. Il est constitué de lycéens et d'étudiants qui ont décidé de passer la soirée à aller à la rencontre des sdf du centre-ville qui vont passer la nuit dehors.
Après quelques consignes, ils se dirigent vers le centre-ville, et vers un groupe de sans-abris rassemblés par le froid, et qui prennent leurs dispositions pour la nuit. L'un d'entre eux, très touché par cette initiative, nous en a dit plus sur sa situation ; « Je suis sorti de prison ce matin, après 11 ans passés derrière les barreaux, et j'ai hâte de pouvoir revoir mes enfants. Mon aîné a 19 ans ; en 11 ans, personne ne m'a parlé, personne ne s'est intéressé à moi » . Un autre sdf témoigne de la dure réalité de leur vie en centre-ville ; « On est chassés par les commerçants qui pensent que notre présence éloigne les gens ; hier, nos bâches et nos couvertures, posées devant un immeuble, ont été brûlées ».
Un peu plus loin, un sans-abri d'une vingtaine d'années raconte comment il en est arrivé là ; « À 18 ans, mes parents m'ont mis à la porte ; et après, comment trouver un travail si on n'a pas de domicile ? Personne n'engagerait un sdf ! » .
Une telle précarité est à peine croyable dans une ville comme Nantes. Comment une municipalité peut-elle relâcher une personne lorsqu'il fait -2° dehors ? Les infrastructures “grand froid” ? « oui, j'ai entendu parler de gymnases aménagés, mais je ne sais pas où ils se trouvent et comment m'y rendre » explique Didier qui a 43 ans, et qui vit dans la rue depuis 13 ans.
Alors où est le problème ? Les services d'aide aux personnes sans domicile fixe manquent de moyens ? Dans une ville qui a les moyens de subventionner les entreprises pour qu'elles construisent des places à vélo dans leurs garages, ce serait tout de même étonnant... Les vélos seraient-ils plus importants que la précarité ? On espère tout de même que ce n'est pas le cas...
Louis LECOMTE