Motion de l'Union Démocratique Bretonne relative à la réforme territoriale
À l'attention de Monsieur le Préfet d'Ille-et-Vilaine
L'Union Démocratique Bretonne est opposée à la réforme territoriale, actuellement en débat au parlement, car elle nie le principe d'intérêt régional et tend à mettre en œuvre une compétition d'inspiration ultra libérale entre les territoires. Cela dans un contexte de réduction de l'autonomie fiscale des régions.
Suppression de la clause de « compétence générale »
En 1982 le législateur avait octroyé aux Régions une clause de « compétence générale » qui les a autorisées à intervenir financièrement en dehors du cadre de leurs compétences obligatoires, sur la base du principe d'intérêt régional.
En Bretagne, sans cette clause de « compétence générale » l'Université de Bretagne Sud, par exemple, n'existerait pas car la Région, comme les autres niveaux de collectivité, a dû la cofinancer pour qu'elle voit le jour.
Nous constatons par ailleurs que le même pouvoir qui veut supprimer la dite clause, a imposé à la Région en 2008 un engagement de 650 millions d'euros pour consentir lui-même à engager un milliard dans le projet « Bretagne Grande Vitesse » pourtant déclaré d'intérêt national.
Des conseillers territoriaux élus dans des cantons
Le projet de loi sur la réforme territoriale prévoit la création de conseillers territoriaux qui siégeront à la fois dans les conseils généraux et dans les conseils régionaux.
En Région Bretagne, il est prévu 191 conseillers territoriaux, en remplacement des 83 conseillers régionaux et des 201 conseillers généraux.
Le gouvernement veut par ailleurs imposer un mode de scrutin uninominal majoritaire pour l'ensemble des conseillers territoriaux. L'élection se fera à 2 tours et il faudra avoir obtenu au moins 12,5% des suffrages exprimés pour pouvoir se maintenir au second.
Conséquences:
- il va falloir construire de nouveaux hémicycles dans toutes les Régions ;
- il y aura moins de diversité politique dans les assemblées ;
- les conseillers territoriaux seront d'abord les élus de leur canton.
La suppression de la clause de « compétence générale » , additionnée à l'élection des 191 futurs « conseillers territoriaux » non plus à l'échelle de la Région Bretagne mais dans des cantons, c'est-à-dire sur une profession de foi locale, pour ne pas dire localiste, cela signifie tout simplement la négation de la Bretagne comme territoire où peut s'exprimer l'intérêt général. C'est effectivement un retour de trente ans en arrière. Cela ne peut qu'affaiblir la Bretagne, déjà amoindrie du fait de la partition administrative.
Une autonomie fiscale réduite à presque rien
La Taxe Professionnelle va être remplacée par une Cotisation Economique Territoriale (CET).
Cette CET aura 2 composantes:
- la Cotisation Foncière des Entreprises (CFE),
- la Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE).
Les modalités de calcul de la CVAE seront fixées par l'État; la CVAE s'apparente à une dotation d'État.
Par conséquent la dépendance financière des Régions vis-à-vis des dotations d'État va passer d'un peu plus de 50 % à 90 %. Le but visé est clair: obliger les Régions à redevenir de simples exécutants des décisions de l'État, comme du temps des EPR avant 1982.
Mise en concurrence des territoires dans une logique libérale
Où est la simplification de la carte administrative censée justifier cette réforme ? Bien au contraire, elle crée un échelon supplémentaire à double déclinaison : les « métropoles » , statut réservé aux actuelles communautés urbaines ou d'agglomération de plus de 450.000 habitants et les « pôles métropolitains » .
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La loi prévoit que les « métropoles » , qui seraient au nombre de 8 (dont Nantes et peut-être Rennes), puissent s'approprier les compétences économiques des régions et des départements. La compétition entre les aires urbaines se fera au détriment des équilibres de développement à l'intérieur des régions. C'est toute la tradition bretonne, fondée sur un maillage urbain fait de villes petites ou moyennes, qui est mise à mal.
Cette analyse est renforcée par la menace qui pèse sur les pays dont le ministre Hortefeux avait déclaré souhaiter la « suppression immédiate » . Pour l'UDB la structure à supprimer n'est pas le « pays » , bassin de vie et d'emploi, mais le département.
Rennes, le 23 juin 2010
Pour voir la vidéo en breton d'Herri Gourmelen à l'issue de la rencontre avec le directeur de cabinet du préfet