Chers amis qui soutenez Jérôme,
C'est avec une profonde émotion que je m'adresse à vous aujourd'hui, principalement afin de vous donner des nouvelles de Jérôme, mais aussi parce que je veux clarifier la situation du comité de soutien.
Je viens de recevoir un message du frère de Jérôme, Olivier, qui a pu lui rendre visite jeudi dernier, à la prison de Fleury-Mérogis, pour la première fois depuis son incarcération. Il m'a autorisé à vous livrer son témoignage :
“Cher René, Je viens de rendre visite à Jérôme pour la première fois depuis son incarcération ! C'est le c½ur serré que j'en suis sorti, tant ces 30 minutes passées avec mon frère ont paru courtes au regard de ces 5 semaines d'attente ! Nous avons à peine eu le temps de nous retrouver et d'aborder ensemble l'essentiel de ce qui occupe son esprit en permanence. Ses premiers mots ont été pour notre mère et notre famille … elles lui manquent énormément ! Il est aussi très soucieux pour tous ceux qu'il aime à l'extérieur et pense beaucoup à eux. Enfin, il songe aux actions liées à la procédure, le tout mêlé d'un sentiment d'impuissance dû à l'enfermement. Je l'ai trouvé préoccupé, mais déterminé à combattre et courageux comme à son habitude ! Côté physique, il ressent le contre-coup de plus de 2 mois de marche, et a bien évidemment du mal à s'accommoder à son nouvel environnement ! Je l'ai trouvé amoindri physiquement mais d'une combativité décuplée. Pour finir, cher René, je voulais vous dire ceci : C'est à travers tous les courriers qu'il reçoit, de proches et d'anonymes, qu'il puise aujourd'hui sa force pour continuer à avancer ! Alors n'hésitez pas à continuer votre action pour le soutenir ! Je souhaiterais terminer ce message au nom de Jérôme par un simple Merci … Merci à vous tous pour votre engagement et l'amitié que vous lui apportez tous les jours. Je vous en suis profondément reconnaissant." Olivier Kerviel
Je remercie Olivier du fond du c½ur de la confiance et de l'amitié qu'il me témoigne.
Je n'envisageais certes pas que nous en serions-là aujourd'hui – Jérôme en prison ! -, ce jour de juin 2010, le 11, où j'ai fondé le comité de soutien. Le premier procès se déroulait à Paris. Les comptes rendus en étaient alarmants. Les médias avaient déjà pris parti pour la Société générale, et en répandaient les accusations mensongères. L'image qui nous était renvoyée de Jérôme - notre Jérôme, l'enfant du pays -, m'était insupportable, aux antipodes de la personnalité du garçon droit, réservé, et sérieux que nous connaissions. J'étais révolté. Je lançai un appel, celui de la première manifestation en soutien à Jérôme ( (voir le site) ). Quelque 150 personnes se rassemblèrent, symboliquement devant l'agence de la Société générale, à Pont-l'Abbé, et exprimèrent leur totale incrédulité face à la version des faits qui était présentée au public, et leur indignation de voir Jérôme atteint dans son honneur - accusé de fraude !! La tante de Jérôme était présente, ainsi que sa maman, alors encore valide et en bonne santé.
3 mois plus tard, tombait la double condamnation - 5 ans d'emprisonnement, dont 3 ferme ; 4,9 milliards de dommages et intérêts - assortie des propos odieux du président Pauthe. Nous étions abasourdis. Dès le lendemain, je fus contacté par une famille modeste du Sud de la France, qui avait lancé une pétition de soutien à Jérôme ( (voir le site) ). Les signatures affluèrent de toutes les régions de France. Quelque temps après, Jérôme m'envoya un courrier, adressé à tous les signataires, que je m'empressais de diffuser sur l'Agence Bretagne Presse. Il y disait, de façon touchante, sa reconnaissance et ses remerciements.
Très vite, la nécessité nous est apparue de disposer d'un site Internet, qui centraliserait toutes les informations concernant Jérôme, et permettrait de l'aider dans sa défense, en lui apportant un soutien logistique. La création du blog, organe du comité de soutien, répondit à un tel besoin : ce serait le site officiel. Il s'ouvrit le 03 Janvier 2011( (voir le site) ).
A la même période, il se produisit un événement qui me bouleversa. Je n'oublierai jamais ce 30 décembre 2010, où Jérôme vint me rendre visite, chez moi, à Tréguennec ( (voir le site) ). Nous ne nous étions jamais rencontrés. Je vis arriver ce garçon sympathique, déjà meurtri par un jugement inique, mais qui redressait la tête et se disait aidé, pour cela, par ses nombreux soutiens. Il était venu accompagné de sa maman. Ce n'était plus la femme que j'avais rencontrée quelques mois plus tôt à Pont-l'Abbé. Elle se déplaçait difficilement, prenant appui sur Jérôme, et apparaissait visiblement marquée par le cataclysme qui s'était abattu sur son fils.
Le blog a été, pendant toutes ces années, la vitrine du comité de soutien. C'était le lieu où l'on pouvait trouver toutes sortes d'informations sur l'affaire, proposant une sélection des articles de presse sur le sujet, et accueillant les commentaires que ceux-ci suscitaient. On y était ainsi tenu au courant de l'actualité judiciaire de Jérôme, et des actions entreprises par la défense. Jérôme consacra l'importance que le blog présentait pour lui, en le citant, à la fin de la lettre déchirante qu'il a adressée aux députés et aux sénateurs ( (voir le site) en septembre 2013, comme source d'informations fiables et utiles.
Le blog évolua au cours de ces 4 années. Tout naturellement, on y transféra, dès le début, la pétition. Les signataires de la pétition 24 furent invités, celle-ci ayant été clôturée, à renouveler leur engagement sur le blog. D'abord simple revendication, la pétition devint, début 2013, un appel à la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, afin qu'elle fasse procéder à une expertise indépendante sur les pertes déclarées par la Société générale, dont la réalité n'a jamais été vérifiée ( (voir le site) ). Aujourd'hui vous êtes près de 14.000 à avoir soutenu un tel appel. Je vous en remercie du fond du c½ur, au nom de Jérôme.
Dès l'origine, le blog proposait une fenêtre « contactez-nous » ( (voir le site) ). Y parvenaient des messages de personnes qui suggéraient des articles à publier, et aussi des propositions d'aide concrète, de la part de traders ou de salariés de la Société générale, qui pouvaient apporter leurs témoignages, très utiles à la défense, laquelle en était aussitôt informée. Souvenir poignant : c'est par ce canal que Philippe Houbé prit contact avec Jérôme, en avril 2012 … avec les conséquences dramatiques que l'on sait – il a depuis perdu son emploi.
Au fil du temps, il apparut nécessaire d'ouvrir une rubrique exclusivement dédiée à de telles informations : la rubrique « professionnels exprimez-vous » ( (voir le site) ), regroupe actuellement 80 témoignages, très instructifs, au sujet, notamment, des pratiques de la Société générale.
Notre préoccupation constante a été - et demeure, - d'informer les citoyens au sujet de la vérité du dossier. Nous avons eu à c½ur de livrer, dans ce but, un véritable combat contre les médias, qui, en majorité assujettis à la Société générale, présentaient les faits de manière à dédouaner la banque de toute responsabilité, en chargeant Jérôme au maximum.
C'est ainsi que l'une d'entre nous accepta de couvrir la totalité du procès en appel, ainsi que les autres rendez-vous de Jérôme avec la justice. Des comptes rendus précis en étaient publiés sur le blog ( (voir le site) ). Dans la même perspective, le comité de soutien estima utile d'être présent sur les réseaux sociaux. Il a ouvert un compte twitter ( (voir le site) ), qui enregistre actuellement plus de 2.800 followers.
Nous avons entrepris d'alerter les politiques, dans l'objectif de les sensibiliser sur la cause : j'ai moi-même pris contact avec Annick Le Loch,( (voir le site) ), députée du Finistère, en lui demandant d'intervenir auprès de Pierre Moscovici, afin que toute la lumière soit faite sur la déduction fiscale accordée par Bercy à la banque au printemps 2008. La députée reçut une réponse dilatoire, le ministre de l'économie et des finances de l'époque s'abritant derrière le secret fiscal. L'une d'entre nous intercepta la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, à la fin d'un événement culturel auquel celle-ci participait ( (voir le site) ), et sollicita un rendez-vous afin de l'entretenir des nombreux dysfonctionnements observés dans le traitement judiciaire de l'affaire. Bien que manifestement sceptique quant à la version officielle de celle-ci, la ministre, d'abord disposée à accorder un tel entretien, changea ultérieurement d'avis et ne donna pas suite.
Une autre activité du comité de soutien a été de fouiller dans des documents disponibles sur Internet, à la recherche d'informations inédites, susceptibles d'aider la défense. Un résultat spectaculaire de telles investigations fut, par exemple, la découverte, en consultant les états financiers de la Société générale au 31/12/2007, que la déduction fiscale accordée à la banque par Bercy, n'était pas de 1,7, mais de près de 2,2 milliards d'euros !
Mais l'un des rôles que le comité de soutien a tenu avec le plus de ferveur, a consisté à soutenir Jérôme, dans les moments difficiles, où il était anéanti – je pense tout particulièrement à la période qui a suivi le verdict d'octobre 2012. Nous l'avons à ce moment-là littéralement porté à bouts de bras, l'encourageant quotidiennement par des messages affectueux, qui l'exhortaient à rester fort. Les remerciements qu'il nous adressa ( (voir le site) ), une fois remis sur les rails, nous bouleversèrent.
A plusieurs reprises au cours de ces 4 ans, nous avons discuté de l'opportunité de défendre la cause de Jérôme par des manifestations sur la voie publique – et nous y avons toujours renoncé. Nous ne nous y sommes décidés que tout récemment. A mon profond regret, je n'ai pas pu, pour des raisons personnelles, accompagner Jérôme dans ses derniers instants de liberté, à Vintimille. Tout le week-end, j'ai suivi les événements à la télévision. C'est alors que j'ai pris la décision d'organiser, à Pont-l'Abbé, le 24 mai, un rassemblement des bigoudens et des bigoudènes ( (voir le site) ) qui n'avaient pu entreprendre un déplacement aussi considérable, afin qu'ils puissent témoigner leur attachement et leur soutien à Jérôme incarcéré depuis 5 jours. Ce fut un succès. Environ 150 personnes se réunirent, malgré la pluie, au même endroit que 4 ans plus tôt. Malgré la révolte et le chagrin de savoir Jérôme injustement emprisonné, une chaleur émouvante unissait les participants. Malheureusement, l'état de santé de la maman de Jérôme ne lui permettait plus d'être des nôtres.
Le comité de soutien que j'ai fondé regroupe aujourd'hui des milliers d'anonymes, des gens modestes, vous et moi, qui ont avant tout une liaison de c½ur avec Jérôme, et, pour plusieurs d'entre nous, tout un passé vécu ensemble.
Depuis quelque temps, je constate que certaines personnes ont entrepris de récupérer et d'instrumentaliser le comité de soutien. J'entends donc aujourd'hui clarifier la situation, et réaffirmer que le comité de soutien restera sous sa forme actuelle, une structure souple, non hiérarchisée, et indépendante, tel qu'il a toujours été : un mouvement de solidarité, d'engagement citoyen, dont l'objectif est de réhabiliter Jérôme, de laver son honneur, et, dans l'immédiat, de le voir sortir de prison au plus vite.
J'invite donc ces personnes, si elles le souhaitent, à créer leur propre mouvement, ou association, à lui inventer un autre nom, et à prendre leurs propres initiatives. Je serai bien évidemment très attentif à ce qui se fera.
Enfin, je remercie David Koubbi et son équipe, pour leur travail acharné, et pour leur dévouement à Jérôme. Je souhaite que nous puissions continuer ainsi, chacun dans notre rôle : l'avocat, à défendre Jérôme, et nous, le comité de soutien, à le soutenir indéfectiblement jusqu'à la victoire.
René Coupa, fondateur du comité de soutien de Jérôme Kerviel