Pour le rétablissement de l'enseignement des langues et cultures régionales dans les programmes du 1er degré. Signée des principaux acteurs de l'éducation à la Réunion, cette lettre ouverte dénonce la suppression de l'enseignement du créole à la Réunion et demande au recteur de revenir sur sa décision.
Monsieur le Recteur,
Puisque certains courriers que nous vous adressons ne vous parviennent pas, nous nous voyons contraints de vous envoyer ce message par la voie de la lettre ouverte. D'autant que la situation est grave. Il nous semble même qu'il y a urgence. Nous espérons que vous comprendrez la nécessité pour nous d'adopter cette voie. Depuis quelques années, les programmes du premier degré comportaient un chapitre intitulé "Langues vivantes étrangères et régionales". Cette disposition permettait une prise en compte du créole réunionnais dans la scolarité de nos élèves. Or, nous découvrons avec inquiétude que la mention "Langues régionales" a disparu des nouveaux programmes et que vos services ont supprimé le test de pré-habilitation permettant aux professeurs des écoles qui le désirent d'envisager une spécialisation à l'enseignement de la Langue et de la Culture Réunionnaises (LCR). Nous sommes tentés de voir dans cette mesure, tout d'abord, un obstacle de plus à l'enseignement de notre langue régionale, deuxièmement, une régression de la pédagogie à un stade où la peur de la langue et de la culture créoles provoquait le désarroi des maîtres et la crainte des parents. Serions-nous devant un commencement de destruction des dispositions pédagogiques qui montraient pourtant de plus en plus de résultats positifs sur l'apprentissage du français et des autres disciplines ? Monsieur le Recteur, nous espérons que cette mesure n'est pas l'effet d'une mauvaise appréciation de l'attitude des parents et du grand public. Si certains acteurs sociaux prétendent que la population manifesterait une hostilité vis-à-vis de notre langue et culture créoles, les sondages à notre disposition établissent en effet de manière claire qu'il existe une réelle demande sociale pour une pratique raisonnable du créole, pratique qui améliore, pour de nombreux élèves, celle du français, des autres langues et l'apprentissage des autres matières.
Les nouveaux programmes précisant que « les élèves dont le français n'est pas la langue maternelle peuvent, lorsque cela est possible, bénéficier d'un soutien linguistique dans leur langue (souligné par nous) afin de tirer le meilleur profit de leur bilinguisme » , la possibilité existe donc pour que l'enseignement de la langue créole de La Réunion se poursuive encore au Primaire à la rentrée prochaine, et nous vous demandons de réunir d'urgence le Conseil Académique de la Langue Régionale pour que, ensemble, nous étudiions les modalités d'application de ce texte en attendant le rétablissement de l'enseignement des langues et cultures régionales dans les programmes.
Veuillez agréer, Monsieur le Recteur, l'expression de nos salutations respectueuses. »
Pour Ankraké, la Présidente, Laurita Alendroit-Payet
Pour la FCPE-Réunion, le Président, Benoît Blard
Pour la FSU, le Secrétaire départemental, Christian Picard
Pour l'Office de la Langue créole de La Réunion, le Président, Axel Gauvin
Lambert-Félix Prudent, Directeur d'une unité de recherche CNRS
Pour le SGEN, le Secrétaire départemental, Jean-Louis Belhotte
Pour le SNES, le Secrétaire départemental, Michel Zervetz
Pour SUD éducation Réunion, Joël Grouffaud
Pour Tikouti, la Présidente, Laurence Daleau
Pour l'UDIR, le Président, Jean-François Sam-Long