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- Chronique -
Les nouveaux chemins de la révolution
Il fut un temps où les pulsions révolutionnaires étaient rangées dans la catégorie de l'extrémisme politique. Quand ces pulsions n'étaient pas fondées sur la violence, elles y basculaient assez facilement.
Jean-Pierre Le Mat pour ABP le 4/11/12 21:47

Il fut un temps où les pulsions révolutionnaires étaient rangées dans la catégorie de l'extrémisme politique. Quand ces pulsions n'étaient pas fondées sur la violence, elles y basculaient assez facilement. La logique était de créer un rapport de forces avec le pouvoir politique ou le pouvoir économique. La violence est en effet un élément déterminant du rapport de forces.

Désormais, d'autres perspectives émergent. Le rapport de forces correspond à une stratégie de renversement d'un ennemi stable. Bousculés par une série de crises, parmi lesquelles la crise de leur propre légitimité, les grands pouvoirs ont perdu une partie de leur ancienne stabilité. D'autre part, nous avons développé, peut-être à tort, une aversion pour la violence. Les stratégies de renversement s'adaptent à cette nouvelle situation. Elles évoluent des techniques de la boxe à celles du judo. La violence reste une option, mais la déstabilisation est devenue une alternative au rentre-dedans.

La déstabilisation des pouvoirs établis peut prendre un aspect ludique, alors que le révolutionnaire classique se complaisait dans une posture sérieuse, voire tragique. L'objectif reste cependant le même : non pas améliorer le système en place, mais le pousser à l'effondrement. Les crises et les nouvelles technologies ont révélé quatre nouvelles façons de créer un court-circuit sociétal.

La première option est la désobéissance civile. Vieille lune, me direz-vous. Certes. Mais désormais des actes comme le refus de l'impôt dépassent le niveau groupusculaire. Ce type d'action est sérieusement envisagé par les ultra-libéraux américains pour faire dépérir la bête. Le contre-civisme, de droite ou de gauche, est un anarchisme sans utopie. Les "libertariens", aux USA en particulier, visent clairement à déposséder le gouvernement central de ses prérogatives en le privant de ressources. D'autres formes d'action y contribuent, volontairement ou involontairement, comme la fraude organisée, la délocalisation ou l'exil fiscal. L'appel paru dans Libération le 3 septembre dernier « Jeunes de France, votre salut est ailleurs : barrez-vous ! » (voir le site) est assez illustrative, non pas d'une volonté révolutionnaire, mais d'une banalité et d'un chic de l'incivisme.

La seconde option est la construction de micro-sociétés autonomes. Les modèles alternatifs trouvent souvent leur origine dans les utopies de gauche, bien qu'elles puissent être le fait de sectes ultra-conservatrices. Il existe toute une variété de solutions intermédiaires entre la société établie et les contre-sociétés : organisations coopératives, réseaux financiers des Cigales, bourses d'échanges, SEL. Les monnaies locales ou complémentaires font partie de cette option. Aujourd'hui, les nouvelles technologies boostent les relations directes et court-circuitent les institutions (voir le site) Toutes ces solutions sont tolérées par les pouvoirs établis tant qu'elles restent marginales. En effet, elles contribuent à la tranquillité publique. Elles fonctionnent de façon contre-cyclique. Elles émergent lors de crises économiques et financières, et disparaissent généralement ensuite. Elles pourraient être dévastatrices si l'ordre établi tardait à apporter aux populations la protection qu'elles attendent.

La troisième option révolutionnaire est la contre-information, option liée fortement aux nouvelles technologies. Ici, l'idée n'est pas que le pouvoir corrompt. C'est l'idée que la corruption est le fruit d'une alliance entre le pouvoir et le secret. L'organisation la plus représentative de cette stratégie est Wikileaks (voir le site) , mais bien d'autres initiatives, mondiales ou locales, ONG ou associations, y participent. Des groupes activistes se sont organisés pour faire de la "sousveillance", c'est-à-dire pour surveiller les surveillants. L'action des forces de l'ordre ou des hommes de pouvoir est vérifiée, filmée, diffusée. La conséquence est de perturber et, au-delà, de neutraliser. On trouve parmi les Anonymous des activistes qui raisonnent aussi de cette manière, bien que le mouvement ne se donne pas un objectif aussi radical.

La quatrième option est l'hyper-judiciarisation, dans le cadre de la société du spectacle. Le dépôt massif et répétés de plaintes médiatisées devant les tribunaux permet de bloquer une décision politique ou économique, ou au moins d'introduire des délais d'application. Dans un monde de vitesse, ces délais aboutissent à des blocages rédhibitoires. L'exemple le plus représentatif est la succession de polémiques-spectacles et de procès qui s'est créée autour des OGM. Le retard pris de ce fait par la recherche française et européenne a créé une quasi-obligation de trouver d'autres voies de progrès agricole, pour ne pas être dépendant des USA. Les recherches autour d'une agriculture plus verte ne se seraient sans doute pas ouvertes si l'option OGM avait été moins perturbée. Dans les domaines en forte évolution ou en forte concurrence, le ralentissement lié à la judiciarisation pousse le système politique ou économique, soit à la bifurcation, soit au dysfonctionnement.

Le révolutionnaire traditionnel se référait à un idéal ou, au moins, à une sorte d'exigence morale. Dans le monde actuel, on ne croit plus en rien et on ne doit plus rien à personne. De nouvelles influences, comme les Punks, ont brouillé la vision d'un avenir radieux et apaisé. Le révolutionnaire n'arrive plus à envisager un futur stable. Il est indigné. Il a la sensation d'avoir été floué. Par qui ? Les banques, les marchés financiers, les patrons, les syndicats, les immigrés, les soixante-huitards, l'Europe, la France ? Qu'importe. Il est plus proche des nihilistes que des utopistes. Peut-être sera-t'il plus efficace que l'ancien pour favoriser ou accompagner l'effondrement.

N'oublions pas que nous sommes en Bretagne. Ici, réfléchir au scénario d'effondrement, c'est aussi réfléchir au scénario d'autonomie.

Jean Pierre LE MAT

Voir aussi :
Vos 7 commentaires
SPERED DIEUB Le Dimanche 4 novembre 2012 23:23
Jean Pierre je poste ce lien particulièrement pour vous
http://www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2005-4-page-71.htm
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eugène Le Tollec Le Lundi 5 novembre 2012 11:09
Jean-Pierre La Mat
Bon sujet et démonstration
J\'ai été sur les sites menntionnés dont celui noté par Spered DIEUB
Le principe de peter a été lu et est connu de tout management et démontre qu\'en France toute la structure
d\'état peut s\'analyser à partir de ces constats qui nous montrent toutes les inefficacités,jusqu\'au niveau le plus bas du fonctionnariat et des politiques.
Clay Shirky peaufine l\'énoncé et semble démontrer qu\'un pays quelqu\'il soit peut fonctionner sur lui même sans état (voir durant des années le fonctionnement du Liban ravagé par des guerres et conflits internes!).
Spered DIEUB done une information sur le context irlandais durant la première guerre ,cela me fait toujours dire ,qu\'une revendication de niveau supérieur ,ne peut pas se construire sans idéal et surtout sans foi.
Actuellement,en France, Le peuple n\'a plus d\'idéal ni de foi.
Certains peuples sont dans un état d\'apathie qui permet toutes les contraintes.
La Bretagne est le parfait exemple de ces soumissions de fait,nous avons des groupements politiques ou d\'associations politiques incapables de s\'unir sur quelques thèmes communs.
La pensée bretonne est-elle dans ses derniers retranchements tels des \"derniers postes\"!
Monsieur ,je suis écoeuré de cette apathie bretonne.
Ils ont tous leurs vérités mais ils sont incapables de sortir une vérité.
Nous ne pourrons pus faire la Revolution par un soulèvement du peuple,seul des grands maux peuvent créer le ferment et l\'étincelle ( nous ne sommes pas encore dans ce schéma, mais des \"quantas\" s\'interconnectent!)
Nous sommes vraiment dans les déclinaisons du \"dernier poste\"
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eugène Le Tollec Le Mercredi 14 novembre 2012 16:19
Je relis et répète
Sommes nous dans toute cette logique?
Oui!
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Ar Vran Le Mercredi 14 novembre 2012 17:59
Peut être que la nouvelle démarche d'union proposée par KAD peut amener les Bretons à s'unir au delà des partis et autres groupuscules politiques bretons adeptes des guerres picrocholines...
En attendant à propos de révolution et concernant la France, je viens à penser que la révolution française n'est toujours pas terminée. Les ordres privilégiés contrairement, à ce que l'on pourrait penser, existent encore ou du moins ils ont été remplacés et ont toujours leurs privilèges.
A la "Noblesse" s'est substituée "les Serviteurs de l'Etat" au "Clergé", les "Journalistes et le personnel du rectorat (Education national)" quant au tiers état, il est toujours aussi bon et corvéable à merci. A part peut être (certains?) bourgeois qui bénéficient de leurs liens de copinages avec les 2 autres ordres... Intéressant, non ?
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eugène Le Tollec Le Mercredi 14 novembre 2012 19:16
Ar Vran
exact
La révolution française n'est pas terminée car nous vivons dans ses derniers soubresauts et reliquats de la pensée dont l'apogée est dans tout le 19 et 20ième siècle.
Hélas, on ne change pas ,une équipe fortement imprégnée de certains principes ,en particulier celui de la domination du peuple"corvéable à mercy".
NOUS SOMMES DANS UN DE SES TRAVERS?L'élitisme individualiste.
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Hervé Gaignard Le Samedi 17 novembre 2012 00:51
Il est temps d\'aller voir ce qui se passe à ND des Landes. Les différentes stratégies exposées y sont en marche. Curieux, pas d\'info sur la manif dans ABP aujourd\'hui.
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eugène Le Tollec Le Samedi 17 novembre 2012 10:35
un problème
Tous les bretons qui hurlent à NDL, le trois quart a voté socialiste,ils sont socialistes et seront toujours socialistes,ils ont donc un des remerciements de leur soumission,voir aussi les apparentés!
Qui est à la tête de la DATAR depuis des années?
Qui dirige la pensée d'état français... pas un politique !
Un politique n'obéit qu'aux bons conseils susurrés dans l'Oreille ET PARFAITEMENT CONSTRUIT
NDL est classé,acquis "état"!
Le projet est dans le classeur depuis des dizaines d'années.
lA SEULE CHOSE QUE JE DIS,QUE CE "HUBB" SOIT DE NIVEAU MONDIAL , mais là encore l'état ,la Bretagne ,les pays de loire,le Poitou chartente sont tellement C..s que tout va être encore une fois raté,par laxisme et non projection
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