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l'expo
- Chronique -
Le professeur Hervé Le Bihan se désolidarise aussi de l'exposition anti-celtique de Rennes
Je fais partie des universitaires qui avaient été sollicités par le Musée de Bretagne en vue de l’organisation de l’exposition actuelle « Celtique ?
Par Hervé Le Bihan pour HLB le 29/08/22 20:06

Je fais partie des universitaires qui avaient été sollicités par le Musée de Bretagne en vue de l’organisation de l’exposition actuelle « Celtique ? » . Je n’ai participé à aucune des réunions du Comité Scientifique et je ne souhaite pas apporter ma caution à une exposition qui s’avère partiale et partielle.

Une exposition qui ne tient pas compte des derniers travaux scientifiques.

L’histoire des origines de la langue bretonne est expédiée en quelques lignes d’une grande confusion. Ce qui laisse passer des approximations et des anachronismes. Tout aussi confus et approximatif est le tableau de présentation de la dérivation des langues celtiques entre elles. Pas un mot du lépontique ou du tartéssien. Regrouper le gaulois et le galate n’a pas de sens. Pas un mot non plus sur la division du brittonique en deux dialectes distincts : le dialecte du Nord-Ouest (représenté par le gallois) et le dialecte du Sud-Ouest (représenté par le cornique et le breton). Pas un mot non plus sur les changements de langues sur l’île de Man ou en Écosse.

Ces approximations permettent de faire croire que le breton descend autant du brittonique que du gaulois : ce qui est une contre-vérité, mais c’est aussi ce qui permet de mieux éloigner la langue bretonne des autres langues brittoniques.

Pourquoi la cartographie mise en ligne par BCD (Bretagne Culture Diversité) n’a-t-elle pas été utilisée, alors que BCD est partenaire de cette exposition ?

Pourquoi n’a-t-on pas tiré parti de la dernière grande synthèse, publiée sous la direction de Elmar Ternes en 2011 « Brythonic Celtic – Britannisches Keltisch / From Medieval British to Modern Breton » .

Et les autres questionnements connectés à la langue, pourquoi n’y en-a-t-il pas trace ?

Ainsi, quid des différentes couches linguistiques bien attestées et bien étudiées dans la toponymie bretonne ? Aujourd’hui on sait très bien ce qui relève du préceltique, du celtique continental et du celtique insulaire. A cet égard la thèse d’Erwan Vallerie est toujours d’actualité.

Quid de l’organisation territoriale de la Bretagne (plou-, lan-, tre-, lok-, etc) si particulière et originale et concerne tout le territoire breton : comme le nom de la commune moderne Plessé (Plebe qui dicitur Sei, en 854) qui se situe en Loire-Atlantique, donc en Région Pays-de-Loire. Escamoter ce thème permet bien sûr de donner une carte de la Bretagne correspondant à celle de la Bretagne administrative à 4 départements.

Quid de la toponymie secondaire ? Elle est majoritairement celtique dans la partie Ouest.

Quid de l’anthroponymie bretonne ? Pourquoi ne pas citer le Cartulaire de Redon ?

Quid de l’ancien droit breton qui a marqué et façonné aussi bien les paysages que les comportements politiques ? Comme, entre autres, le système de quévaise (du moyen-breton quemaes, kevaez aujourd’hui).

En ce qui concerne le Roi Arthur il est totalement incompréhensible de ne pas avoir placé dans l’exposition le tome 2 du manuscrit 1007 de la BRM, ouvert à la page 1426 (alors que le tome 1 est exposé sur un autre propos). En effet, à cette page commence le plus ancien texte arthurien en langue bretonne, le Dialogue entre Arthur Roi des Bretons et Guynglaff. Trop celtique sans doute ?

Tout de même, un ouvrage universitaire collectif est sorti en 2019, intitulé « Arthur in the Celtic Languages / The Arthurian Legend in Celtic Literatures and Traditions » , sous la direction de Ceridwen Lloyd-Morgan et Erich Poppe. Une lecture profitable de cet ouvrage aurait permis d’éviter ce qui a été malheureusement produit dans l’exposition.

Cette exposition a été montée autour de réponses niant la dimension celtique à des questions qui n’existent pas. Nous sommes bien loin d’un travail scientifique, hélas. Et ma réaction est très éloignée du « côté affectif » (Ouest-France 17.08.2022).

Tout ceci m’apparaît être une manipulation basée sur l’escamotage et souffrant de confusion d’expression – volontaire ? -, qui permet de gommer ce qui est évidemment celtique, et donc de justifier le point d’interrogation polémique du titre de l’exposition.

Professeur des Universités Rennes 2

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Directeur du Département de breton et celtique, UFR Langues depuis 2011. Université de Rennes 2.
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Vos 17 commentaires
Pcosquer Le Lundi 29 août 2022 23:48
Aotrou LE BIHAN mersi bras deoc'h!
Votre intervention, ainsi que celles de Ronan Le COADIG, de Yann-Vadezour Ar ROUZ (Justice pour nos langues) et d'Alan STIVELL font un bien fou. C'est mon sentiment.
Cette bagarre est une affaire de spécialiste(s) et leur(s) capacité(s) à convaincre devient de fait la référence: une caution morale en quelque sorte (morale, parcequ'elle porte ici plusieurs racines : culturelles mais aussi scientifiques, on aprécierait une intervention politique du conseil régional...).
Sans vos interventions, aux uns et aux autres, tout peut-être dit sans contradiction car le public peut-il vraiment juger? Même initié cela semble difficile...Cet élément me paraît primordial et justifie pleinement vos interventions, au nom de la vérité certainement mais aussi, au nom de l'identité bretonne.
Si je peux me permettre un clin d'oeil, l'ensemble des écrits parus ( 3 pour l'instant) pour remettre en question l'exposition du musée de Bretagne devient une pédagogie redoudable et salutaire:
D'une part, quand on lit ces trois documents, on perçoit les éléments clés qui semblent nécessaires à la connaissance du sujet pour accueillir les visiteurs et leurs questions. Santet e vez pouez an amzer war emdroadur ar brezhoneg , pouez an darvoudoù, pouez an daveoù...ar strizhder. skiantel, ar from... Ur gentell vrav 'nag eo!
D'autre part je me demande si cette exposition ne va pas aboutir, à force de protestations, à son objet inverse: intéresser davantage les Bretonnes et les Bretons à leur idendité celtique...
(6) 
Claude Le Duigou Le Mardi 30 août 2022 07:48
Trugarez Herve.
(1) 
Naon-e-dad Le Mardi 30 août 2022 08:36
Mersi braz deoc'h evit ho savboent, hag an argudennoù e-leizh emañ diazezet warne.
.
Ne c'hellan ket mont da welout an diskouezadeg-mañ. Mes sur ne vo keuz ebet ganin, pa lennan ar pezh a skrivit, c'hwi ha reou all evel Ron Ar c'hoadig.
.
Ur goulenn, bremañ:
"on sait très bien ce qui relève du préceltique, du celtique continental et du celtique insulaire". Penaos gouzout hirroc'h. Levrioù all zo estreget hini ErwannVallerie? Pere? Ho ali a vefe degemeret mat .
Mersi braz deoc'h evit ho savboent, hag an argudennoù niverus emañ diazezet warne.
.
Ne c'hellan ket mont da welout an diskouezadeg-mañ. Mes sur ne vo keuz ebet ganin, pa lennan ar pezh a skrivit, c'hwi ha reou all evel Ronan Ar c'hoadig.
.
Ur goulenn, bremañ:
"on sait très bien ce qui relève du préceltique, du celtique continental et du celtique insulaire". Penaos gouzout hirroc'h ? Levrioù all zo estreget hini ErwannVallerie? Pere? Degemeret ma e vefe ho ali ...
(2) 
kris braz Le Mardi 30 août 2022 09:16
Deuet eo ganez !
(0) 
Anne Merrien Le Mardi 30 août 2022 10:22
Le contre-argument de "l'affectif" blessé des mécontents pour essayer de sauver la démonstration de cette expo me rappelle que l'amputation de la Loire-Atlantique était présentée comme un conflit entre le coeur et la raison. La Bretagne a toujours tort et, en général, ce n'est pas faute de raison, mais de pouvoir. C'est bien connu, l'Histoire (comme la Géographie) est écrite par les vainqueurs.
(7) 
Anne Merrien Le Mardi 30 août 2022 11:14
Si lan- est d'origine celtique (landa), ce n'est pas le cas de plou- tre- loc- qui sont des emprunts au latin (plebem, tribus, locus), emprunts que l'on retrouve en gallois ou en cornique, du fait de l'incorporation du sud de l'île de Bretagne à l'Empire romain durant quatre siècles. Il y a pas mal de mots d'origine latine dans la langue bretonne, ce qui n'en fait pas moins une langue celtique (tout comme l'anglais est une langue germanique, malgré l'emploi de mots d'origine normande ou angevine).
(3) 
Anne Merrien Le Mardi 30 août 2022 11:46
Erratum : tre- viendrait bien du celtique (cette racine existant en gaulois et en irlandais).
(0) 
pascal rannou Le Mardi 30 août 2022 12:29
Je me suis rendu à l'expo, et j'ai dit ce que j'en pensais sur la page que Ronan a écrite. Le guide a dit qu'on avait rien écrit en breton sur la légende arthurienne. J'ai lui ai parlé ensuite du "Dialogue entre Arthur Roi des Bretons et Guynglaff", qui contredisait son propos: il n'en avait jamais entendu parler... mais n'en avait pas l'air plus contrarié que ça!
(2) 
Jean-Paul Touzalin Le Mardi 30 août 2022 16:10
Au début du siècle dernier, il y avait de pseudo "érudits locaux" ... il y a maintenant, en notre époque si moderne, de pseudo érudits ... "muséaux" !
«Escamoter ce thème [l'organisation territoriale de la Bretagne ] permet bien sûr de donner une carte de la Bretagne correspondant à celle de la Bretagne administrative à 4 départements.»
CQFD ... n'est-il pas ?
Merci M. Le Bihan
(3) 
Anne Merrien Le Mardi 30 août 2022 18:13
Je n'ai pas visité ce musée. Il semblerait que ce soit le musée de la Bretagne administrative, à moins que cela soit le musée administratif de la Bretagne.
(5) 
Dominig YVON Le Mercredi 31 août 2022 06:38
Amusant qu'au moment où, 900 000 Bretons et autres Irlandais, Gallois,etc...soient passés par le festival interceltique de Lorient, un musée leur explique qu'ils ne sont pas celtes en fait......
La réaction de Polig Monjarret aurait été surement plaisante....
On croyait cette vielle lune jacobine : "vous n'êtes pas celtes mais gaullois , donc frañcais " abandonnée..... Il nous faut, à tout le moins, leur reconnaitre de la constance.....
Je te propose Anne un nouveau nom pour ce qu' on ne devrait plus appelé musée , mais bon, soyons bon joueur , et appelons le "musée des jacobins"...
Merci à l'auteur de l'article pour sa démarche , elle scientifique, qui fournit aux Bretons des références fiables....
(3) 
Gurvan Mével Kotulla Le Mercredi 31 août 2022 11:47
Ma grande crainte, est que bon nombre de citoyens, qui n'ont quasiment jamais accès à l'histoire, la culture, bretonnes et celtiques (c'est à dire beaucoup de monde !), ne la rencontrent pour la toute première (et dernière) fois, que par le biais de cette Grande Exposition Objective car Scientifique (pas comme nous les rêveurs et autres extrémistes). Quel dégâts potentiels, pour une Bretagne déjà bien amputée (au sens stricte) : c'est un peu comme si comme si l'on découvrait l'histoire en lisant Ernest Lavisse.

Alors trugarez vraz Hervé Le Bihan !

Je pense que le chercheur Claude Sterkx ne doit pas non plus se sentir très en phase avec le parti pris de l'exposition.
(3) 
Reun Allan Le Mercredi 31 août 2022 18:07
« LES BRETONS SERAIENT DES AUVERGNATS QUI AURAIENT ÉTÉ ARRETES PAR LA MER  »
J’avais un collègue parisien-auvergnat et néanmoins ami qui aimait bien taquiner les Bretons lorsque le service organisait un pot de l’amitié (cela se faisait encore dans les boites civilisées des années 90). Sa vanne favorite pour faire réagir les Bretons du groupe était la suivante : « Les Bretons sont des Auvergnats qui ont été arrêtés par la mer ». Ça marchait au quart de tour mais c’était bon enfant. On n’aurait pas imaginé à cette époque que cette vanne allait faire l’objet d’un questionnement quasi officiel par un musée (prétendu) breton et financée par les contribuables bretons.
A notre époque où les hommes enceints apparaissent sur des affiches du planning familial et que tout le mal de l’humanité serait venu du mâle qui fait cuire ses merguez au barbecue, il ne faut plus s’étonner qu’un musée breton puisse douter du caractère celtique de la Bretagne.
Alors pas celtique la Bretagne ? Si elle ne l’est pas alors de quoi donc est-elle le nom ? Mon ami parisien y avait sa thèse mais lui il avait le sens de l’humour. Sur ce coup-là, il n’était pas loin d’avoir flairé la bonne piste. On ne pourrait pas dire que les Bretons ne seraient pas celtiques mais à condition de leur attribuer des ancêtres gaulois (donc futurs géniteurs de Français), Nos ancêtres bretons seraient en fait des Arvernes qui auraient été arrêtés par la mer.
Nan ! On déconne ? Pas tant que ça si je me réfère à une conférence d’un universitaire qui n’en était pas loin tant il passait sous silence les origines insulaires des Bretons qui ont apporté leur langue, une forme de christianisme dit celtique et leur administration territoriale. Difficile de nier un apport insulaire quand on sait qu’un fils de Charlemagne (Louis le Pieux) était en guerre en 818 contre les Bretons (Morvan) pour mettre fin à la pratique chrétienne celtique insulaire qui s’était transposée chez les Bretons armoricains. Je ne me souviens plus du nom de ce conférencier mais j’avais été très étonné que cela puisse avoir eu lieu à Lorient sous les auspices du FIL. II y avait un fan club dont certains affirmaient en off que le brittonique aurait été apporté en Bretagne insulaire (Galles, Cornouailles) par les Gaulois. Tous les délires existent dans la nature.
Citons enfin des arguments de faits minoritaires qu’on fait passer pour déterminants dans une démonstration. Par exemple, dans le débat concernant le caractère breton de la Loire Atlantique, ceux qui nient son appartenance à la Bretagne historique prôneront que Nantes n’est pas bretonne car habitée par de nombreux Vendéens. Avec de tels raisonnements, en raison d’emprunts au français ou plus généralement au latin, l’anglais ne serait plus rattaché à ses origines germaniques et le breton ne serait plus celtique. Le français serait quoi ?
(0) 
Yannig Coraud Le Mercredi 31 août 2022 20:17
Pourquoi des bretons se prêtent ils au jeu de français qui ne cherchent qu'à déconsidérer notre culture ?
Des historiens jouent aussi une telle désinformations voire manipulation de notre Histoire Nationale .
La réponse est là Si la Bretagne est une vulgaire région de france et encore amputée d'un cinquième de son territoire, elle ne doit pas avoir d'Histoire différente de la nation une indivisible et monolingue . Et surtout pas d'alliances avec les autres nations celtiques . Paris et l'Ile de france appartenaient à la Belgique antique ... Le franckland que personne n'opposerait au FranckReich ! Et pourtant .
La Bretagne a un avenir en Europe mais certainement pas en France J'en suis désormais convaincu .
(2) 
jakez Lhéritier de St Nazer de Bretagne Le Jeudi 1 septembre 2022 20:08
il y a une quinzaine d'années" un historien" des Côtes d'Armor est venu dire que le Triskel était une variante de la croix nazie?
Ceci sous l'égide de Libre Pensée de St Nazer présidée par un ingénieur des chantiers de l'Atlantique,syndiqué à FO..
Dans cette affaire de Rennes quelles sont les conséquences envers l'organisationn de cette exposition ?
Il est important de diffuser cela et il est important de savoir qui sont les financeurs,les commanditaires de cette oeuvre négationiste?
Y a t il moyen de remonter une exposition contradictoire?
(3) 
Elen Guennoc Cariou Le Vendredi 2 septembre 2022 10:10
Trugarez dit Hervé. Setu ur respont frealzus evidon. Léon Fleuriot ….. deus en dro ! ?
(1) 
M Frélaut Le Lundi 15 mai 2023 12:26
Ar gwirionez a wineb d’ar bed !
(0) 
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