- Chronique -
Le nouvel album du Ronan Le Bars Group - "Strink Mor"
Le nouvel album du Ronan Le Bars Group - "Strink Mor"
Par Gérard Simon pour Culture et Celtie le 8/04/20 19:10
Ronan LE BARS Group - "Strink Mor" - Extrait de "Parz ar Strink Mor" - 01:02 CD Ronan LE BARS Group

Qui, d’entre vous, n’a jamais lu le nom de Ronan Le Bars, figurer, en crédit de participation, sur les jaquettes de très nombreux albums publiés par les plus grands noms de la musique bretonne ou celtique comme Alan Stivell, Dan ar Braz, Gilles Servat, Red Cardell, Didier Squiban, les frères Boclé, Jacques Pellen, pour n’en citer que quelques-uns ?

Sans compter la présence de ce maître incontesté de l’uilleann pipes, au sein de l’HERITAGE DES CELTES ou du CELTIC SOCIAL CLUB, Ronan évoluant, artistiquement et en virtuose pratiquant de cette cornemuse iconique, au son si emblématique, entre culture musicale bretonne ou irlandaise, plus largement celtique !

Jaquette CD du Ronan LE BARS GROUP

Natif de Guingamp, c’est, dès l’âge de 9 ans, qu’au sein du Bagad Gwengamp, Ronan a, abondamment, joué de la cornemuse écossaise. Mais, c’est par son père qui, un jour, a rapporté à la maison un disque du groupe de musiciens qui, sous le nom de Planxty, a marqué la musique irlandaise des années 1970, avec, pour membres, Andy Irvine, Christy Moore, Dónal Lunny et Liam O'Flynn, que le sonneur guingampais a été fasciné, cette fois, par le son, si spécifique, de la cornemuse irlandaise.

Participer, amplement et très fréquemment, ceci depuis tant d’années, aux productions discographiques et prestations scéniques des autres, parfois, même, dans le contexte de la musique de variété de qualité, mais, plus largement, dans le style celtique ou d’enregistrer et se produire, en duo, avec Nicolas Quemener, incitent, un jour, à une expression personnelle, encore plus marquée.

C’est, en 2012, dans le cadre du Festival Kann al Loar de Landerneau, cherchant, pour cette édition, de nouvelles expressions artistiques et proposant à Ronan Le Bars une carte blanche, que le virtuose trégorrois crée, avec 4 musiciens de renom, le premier collectif, chapeauté de son nom. Le Ronan Le Bars Group était né !

Suite au succès de ce premier passage, confirmé par une prestation estivale de cette formation au Festival de Cornouaille de Quimper, un premier disque, sous cette dénomination collective, paraîtra en juin 2013, sous le label Keltia Musique. Il s’agit de « Lammdour » qui, élargissant l’univers celto-breton, se termine par une suite écossaise.

Il faudra attendre mai 2016, pour que le musicien breton publie son deuxième opus, sous le nom du Ronan Le Bars Group. Edité chez Coop Breizh, « An Erc'h Kentañ - The first snow, largement consacré au paysage musical breton, notamment dansant, se conclut, cette fois, sur « Ratchemisca » , un air bulgare, confirmant, alors, l’intérêt marqué du musicien pour toutes les musiques traditionnelles du monde.

Après cette présentation de l’artiste, certes, bien trop synthétique, eu égard à la richesse et la densité de la carrière de ce musicien d’exception, et cette qualification, est ici, plus que jamais, amplement méritée, nous en venons à ce 3e album « Strink mor - Les embruns » que Ronan Le Bars nous a concocté, sous la houlette de Patrick Péron, au studio La Grande Boutique de Langonnet (56) (Voir site) , dès le printemps 2019.

Sous une jaquette, organisée en triptyque, avec, en façade, une très belle photo, dénommée par son auteur qui n’est autre que le musicien lui-même, « Vue de l’île Renote (22) » , une petite perle maritime de la Côte de granit rose, baignée par la Manche et appartenant à la commune de Trégastel, 10 merveilleux instants musicaux vous attendent.

Un encart bilingue, glissé à l’intérieur du premier pan du digipack et signé de Donal O’Connor, qui a réalisé, en septembre 2019 le mixage, le mastering de l’enregistrement ayant été confié à Cormac O’Kane, au studio RedBox Recording de Belfast (Voir site) , présente, avec ferveur, le musicien et l’esprit artistique qui l’anime.

Puisque nous en sommes à la description de l’écrin qui renferme ce bijou mélodique, à droite du panneau central enserrant le CD, une très belle photo de Ronan signée d’Eric Legret (Voir site) illustre le générique des parties artistiques et techniques prenantes.

Mais, n’oublions pas, qu’il s’agit du Ronan Le Bars Group !

Un cliché de la photographe Myriam Jégat (Voir site) , nous présente les quatre musiciens qui unissent leurs talents autour du célèbre sonneur.

De gauche à droite, vous découvrirez, Nicolas QUEMENEUR (guitares), Aymeric LE MARTELOT (piano, claviers), Ronan LE BARS (uilleann pipes, whistles), Pierre STEPHAN (violon, mandoline) et Julien STEVENIN (contrebasse et basse électrique).

C’est, par ailleurs, à partir de ces deux clichés que nous avons conçu notre UNE et illustré notre chronique.

Un voyage musical de plus de 45 minutes, dans l’univers de Ronan Le Bars, des pays de Bretagne, à la Galice, en passant par l’inspiration polonaise, articulé en 7 compositions originales de l’instrumentiste et 3 traditionnels va, littéralement, vous ravir, vous faisant découvrir l’uilleann pipes dans toute sa sensibilité expressive, loin de toute lancinance que certains auditeurs pourraient redouter.

Des pièces à danser, ronds, plinns, marches, valse, d’autres à écouter, panachent, judicieusement, un programme, très varié mais homogène, avec de magnifiques arrangements de cordes et vents signés du bien connu Robert Le Gall qui assure, également, la direction d’orchestre et le rôle de premier violon.

C’est, tour à tour, symphonique, jazzy, world, toujours celtique. Jamais on ne s’ennuie et le voyage semble bien court.

Tous les titres sont captivants, nous n’en citerons que quelques-uns.

Après, « La suite de Loudéac » magnifiée par l’uillean pipes et le clavier, « Dewezhioù Goañv » , inspiré par les jours sombres de basse saison, les mois noirs (Miz Du), en 4e plage, « Breton man in New-York » , apparaît comme un évident hommage à Sting, rappelant son légendaire « English man in New-York » , instant où l’on retrouve l’ambiance délicieusement cuivrée qui estampille le morceau original, grâce, ici, à l’intervention, au saxophone, de Bernard Le Dréau, sur une ponctuation rythmique de Gwenael Péron.

Cette remarquable composition de Ronan Le Bars, est en quelque sorte, une dédicace en direction de la diaspora bretonne, fort présente, dans certaines villes des Etats Unis, comme, pour exemple, cités, plus haut, les frères Boclé, Bretons partis à New York pour jouer du jazz.

Mais Ronan Le Bars sait, aussi, nous ramener sur les terres trégorroises avec « Toñ Plinn » , le plinn étant une danse traditionnelle destinée, originellement, à damer le sol en terre battue des maisons.

Ronan a appris le premier thème de cette suite, à partir d’un enregistrement de 1979, en Côtes d’Armor, appelées, encore, jusqu’en 1990, Côtes du Nord, lors du concours Plinn de Bourbriac.

Le second thème est du talabarder, Daniel Philippe et le troisième une composition originale et personnelle, à l’uilleann pipes, signée de Ronan.

Pour restituer l’antériorité et la transversalité temporelle de cette danse, la plage commence comme un vinyle 33 tours qui gratte sous le diamant d’un vieil électrophone, avant de faire place à l’enregistrement contemporain sur lequel on perçoit, même, le pas bien martelé des danseurs, fruit des percussions de Keyvan Chemirani, invité pour ce titre, ainsi que pour deux autres morceaux de ce programme.

Citons, aussi, en piste 8, « Aldona » , l’une des toutes premières compositions de Ronan, valse qui vit le jour, en 1989, lors d’une tournée en Pologne avec le Bagad Gwengamp.

Mentionnons également, en plage 9, « Tapas Nocturnes » , détour par la Galice, autre pays celtique, avec une suite de trois airs où l’on reconnaît, en conclusion de cette séquence, la virevoltante « Costa del Galicia » , apprise du géant de la gaïta… Carlos Nuñez !

Pour notre part, nous avions, connu, ce titre, en 3e position du CD « Dan ar Braz et l’Héritage des Celtes - Finisterres » , paru en 1997.

L’album se conclut par « Tonkañ » , signifiant, en breton, comme sur le chant de foire, une affaire conclue.

Il s’agit d’un air composé par Ronan, sur lequel vient se poser, la, toujours, délicieuse voix d’Annie Ebrel.

L’enchanteresse voix féminine de Bretagne chante avec la souplesse et la clarté qu’on lui connaît, un texte traditionnel, « An teir rozenn - les trois roses » , dont les paroles bretonnes et leur transcription, en français, figurent au dos de l’encart sus-décrit, au début de cette chronique.

Celui-ci est bâti à partir de deux collectages : l’un d’Ifig Troadec, extrait de son carnet de route, le second de « Tenzor e Bodkol » , patrimoine chanté des Frères Morvan.

Puis l’uilleann pipes de Ronan ponctue la deuxième partie de cette ultime pièce, rejoint par de très belle spires celtiques réverbérées qui s’échappent en volutes légères, enrobant, avec infinie grâce, la ligne mélodique de l’instrument.

Décidément, ce Compact Disk, « Strink mor - Les embruns » , prouve, s’il en est, encore, besoin, que le musicien trégorrois, Ronan Le Bars est l’un des plus grands instrumentistes traditionnels européens, certes, passeur de la musique traditionnelle bretonne ou irlandaise, mais aussi, notamment, par ses compositions, créateur, porteur d’une nouvelle musique celtique, parfois même, inspirée de pays voisins liés à l’histoire de cette culture.

S’inscrivant dans une Celtic World Music, l’uilleann pipes se révèle, par la subtilité du jeu du véloce et subtil instrumentiste, un fer de lance, certes irlandais d’origine, mais, de plus en plus, partie prenante et apprécié du milieu culturel et musical breton.

Les quatre excellents musiciens qui forment, à ses côtés, le Ronan Le Bars Group semblent ouvrir à ce compositeur et interprète breton, par leur présence très affirmée et plus qu’esthétique, en restant, toutefois, au service du musicien leader, de bien belles perspectives où l’univers artistique du maître de l’uilleann pipes, qui intervient, aussi, aux whistles, se révèle, toujours un peu plus.

« Strink mor - Les embruns » du Ronan Le Bars Group est une pépite à placer dans l’écrin de vote discothèque celtique et surtout dans le lecteur de votre chaîne HI FI en programmant, comme nous… une lecture, comme l’on dit, communément, « En boucle » .

Gérard Simon

Illustration sonore de la page : Ronan Le Bars Group - "Strink Mor" - Extrait de "Parz ar Strink Mor" - 01:02.

D'autres extraits sonores sur Culture et celtie, l'e-MAGazine (Voir site)

Les titres du CD du Ronan Le Bars Group - "Strink Mor"

01. Parz ar Strink Mor (Composition Ronan Le Bars) – 05’07.

02. Suite Loudéac (Traditionnel) – 03’45.

03. Dewezhioù Goanv (Composition Ronan Le Bars) – 04’025.

04. Breton Man in New-York (Composition Ronan Le Bars) – 03’59.

05. Toñ Plinn – (Traditionnel / Daniel Philippe / Ronan Le Bars – 03’50.

06. Roud an Amzer (Composition Ronan Le Bars) – 04’15.

07. Toñ Bale ha Lartides (Traditionnels) – 05’31.

08. Aldona(Composition Ronan Le Bars) – 04’03.

09. Tapas Nocturnes (Suite Galicienne) (Traditionnel / Composition Ronan Le Bars) – 05’18.

10. Tonkañ (Composition Ronan Le Bars) – 06’44.

Durée totale – 46’34.

CD "Strink Mor"- Ronan Le Bars Group.

Parution : Mars 2020.

Production : PAKER Prod (Voir site)

Distribution : COOP BREIZH - (Voir site)

Réf : 4016351.

Le site Internet de Ronan Le Bars Group : (Voir site)

© Culture et Celtie

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