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"Talm ur galon - Le battement d’un cœur" (CD STARTIJENN - Talm ur galon)
Le nouveau CD de STARTIJENN : "Talm ur galon"
« La Bretagne est méconnue », déplore Tanguy OILLO, invité de Baptiste MEBROUK, au micro de France Bleu Breizh Izel. « La Bretagne est sous représentée, à notre goût », ajoute, sur France Bleu Armorique, Julien STEVENIN, reçu par Glenn JEGOU. En effet, hors Armorique et hexagone, ce sont plus que des impressions, des constatations largement partagées par tous les membres de ce groupe emblématique de la transe bretonne qui se produit, aussi, régulièrement à l’étranger, parfois en suivant un « circuit Folk-Music », nommé, parallèlement, par les anglo-saxons, Indie-Music ou Roots Music, appellations évoquant, ainsi, toutes les musiques du monde enracinées et souvent chantées en langues vernaculaires. Dans cette catégorie, pourtant, la Bretagne est peu présente et sa localisation perçue d’autres pays, demeure assez inconnue. C’est, aussi, dans ce contexte, qu’au-delà de sa réelle et référente notoriété en Bretagne et sur le territoire national (Picardie, Normandie, Paris, Lyon, Toulouse…), la formation dont l’A.D.N. est et reste le fest-noz, souhaite, également, en dehors du strict cadre de la danse où elle excelle, exporter ses créations en devenant, en quelque sorte, un porte-drapeau identitaire de la musique et de la culture bretonne, lors de ses prestations données à travers le monde. Il faut noter qu’avant la crise sanitaire de 2020, les cinq musiciens se sont produits, en formule concert, jusqu’en Australie, en passant, entre autres pays, du Danemark, Allemagne, Espagne, Pologne, à la Chine ou l’Indonésie (Ile de Bornéo)… C’est, notamment, en s’inscrivant dans cette perspective artistique et identitaire à l’international que, sous un jour nouveau, vous allez découvrir STARTIJENN (énergie, en breton) groupe que vous avez, sans aucun doute, reconnu d’entrée, rien que par la mention des susnommés guitariste et bassiste. Créant, sur des bases traditionnelles et avec un son bien spécifique, une identité musicale bretonne actuelle et incisive, la formation reste, à la fois, grand public, sans qu’il y ait de rupture stylistique avec ses créations antérieures, mais prolongation et étendue de son spectre musical, pouvant aller jusqu’à quelques phases expérimentales qui transcendent, plus particulièrement, le registre de certaines interventions des instruments traditionnels. « Talm ur galon - Le battement d’un cœur », tel est le titre d’une prochaine tournée, en formule concert, destiné, également, aux déplacements hors de Bretagne. Un spectacle qui sera, en quelque sorte, mise en scène par le regard extérieur de Sylvain GIRAULT. Celle-ci est précédée par la parution, le 8 avril 2022, d’un album de 10 titres taillés, avec une esthétique nouvelle, pour la scène et, bien évidemment, toujours, pour la danse. 9 compositions du groupe et une reprise constituent le programme, plus qu’énergique, de ce 7ème opus, tout à fait conforme au nom du groupe. Ecouté à bon, voire ample volume, ce Compact-Disk que nous vous présentons, au travers de cette chronique, restitue, grâce à un enregistrement irréprochable, une ambiance « live », toutefois bénéficiant d’une qualité d’écoute parfaitement structurée. Produit par Paker Pod, distribué par Coop Breizh, le disque a été enregistré dans les Monts d’Arrée, au Studio Streat ar Skol, à Saint Cadou (Voir site) http://www.streatarskol.com/ et mixé à Brest, par Ludo MESNIL et Tangi OILLO. Le mastering est signé de Bruno GRUEL (Voir site) https://www.elektramastering.com/ Félicitations à tous, pour ce « gros » et, surtout, « bon » son, clefs de voûte indispensable à la couleur rock et à la puissance musicale volcanique de STARTIJENN ! Pour les musiciens, nous retrouvons, les trois copains bretonnants du collège Diwan du Relecq-Kerhuon, près de Brest, alors âgés de 13 ans et fondateurs du groupe, en avril 1997. - Tangi OILLO : Guitare, - Youenn ROUE : Bombarde et voix, - Tangi LE GALL CARRE : Accordéon diatonique, membre, dès 1998, et, bien sûr : - Julien STEVENIN : Basse, membre depuis 2011, - Lionel LE PAGE : Binioù et uilleann-pipes, membre depuis 2013. Cette distribution met en exergue une spécificité instrumentale du groupe, celle de posséder, en son sein, sur une base rythmique musclée, basse et guitare, un emblématique couple de sonneurs biniou/bombarde, bien représentatif des fondements musicaux bretons. Pour l’enregistrement de « Talm ur galon - Le battement d’un cœur », STARTIJENN a invité, sur 5 morceaux et le batteur, Jean-Marie NIVAIGNE. Passionné par les rythmes et cultures du monde pratiquant l’accompagnement de la danse, (Régions de France, Maroc, Algérie, Mali, Corée, Inde, Argentine, Brésil…) ce musicien a, entre bien d’autres, collaboré avec Sylvain, GirO, Erik MARCHAND, HAMON-MARTIN Quintet, KREIZ BREIZH AKADEMI #3, Gilles SERVAT... Pour marquer ce « jour tout neuf, inattendu », comme le mentionne la fiche de presse qui accompagne cette nouvelle parution, il fallait que la jaquette qui contient le CD soit, aussi, par son image, son design, différente et évocatrice d’une certaine évolution artistique souhaitée par le groupe. Une élégante sobriété a été privilégiée, avec une conception graphique, signée de Gwenael OILLO et des photos de l’incontournable et talentueux Eric LEGRET. Le digipack cartonné, se développant en triptyque, présente en première de couverture, dans une ambiance, quelque peu, « Blues Brothers », une déambulation latérale des cinq musiciens, en costume, cravate et lunettes noires, voire pour Julien STEVENIN, chapeau. Un STARTIJENN Inattendu, non ? Réalisée d’après un cliché d’Eric LEGRET, l’image collective du groupe au noir saturé et au blanc translucide, s’incruste sur un fond rouge et nuancé de gris qui, dans un rapport 2/3 - 1/3 scinde horizontalement, la première de jaquette. Très discrètement, en haut et à gauche, comme une étiquette Dymo, lettrée en rouge sur fond noir… Le nom du groupe. Juste, en dessous, en simple lettrage noir : Le titre du disque. En interne, au fond plus « acier », sur le panneau de gauche, toujours en lettrages type Dymo, blanc sur fond noir, ou, selon les lignes, l’inverse, est répertoriée la distribution technique et la production. Sur le pan de droite, sont mentionnés les noms des musiciens, les crédits et les remerciements. Sur ce même volet, mais, cette fois, replié, figure une photo du groupe, de même texture graphique que le cliché de façade. Le Compact Disk, harmonisé aux couleurs rouges et noires de la charge graphique du projet apparaît comme un vinyle 45 tours, 4 titres, avec son large trou central, son étiquette rouge, composée à l’ancienne et sa noire surface dédiée à l’enregistrement analogique où est simulée la trace de deux plages de microsillons. On est en droit de me reprocher, au cœur de cette chronique, cette longue description du « contenant », mais je trouve que l’effort artistique graphique entrepris, comme ici, STARTIJENN, par nombre d’artistes, se doit d’être salué. Un bel objet ne peut que servir… de la bonne musique et un support musical physique bien présenté est, quand même, plus chaleureux et mieux documenté que des fichiers numériques, par ailleurs, diffusés par Believe. Il faut savoir s’arrêter sur tous les noms des musiciens, techniciens, communicants producteurs, distributeurs qui construisent, pour notre plaisir, le plaisir, le rêve… Quant à la charge graphique, elle semble, comme à nous, importante pour STARTIJENN, car étroitement liée au projet. Pour preuve, tout en nuances de gris, le sobre clip de « Skilfoù an noz - Les griffes de la nuit », sorti le 21 mars et réalisé par Yannick DERENNES, assisté de Stéfan GIRRES, avec ses images épurées, la respecte scrupuleusement. A ce sujet, la production précise : « La sobriété de la mise en scène est renforcée par l’esthétique de noir et blanc, en lien avec la direction artistique de l’album et des photos réalisées pour celui-ci ». Il est temps, d’en venir au contenu… à la musique. Je peux vous dire que, d’entrée, on n’est pas déçu ! C’est le titre éponyme qui ouvre le programme. Après une frissonnante introduction spectrale et des timbres d’inspiration électro joués à la basse, la bombarde, de quelques notes, devance l’accordéon qui, sur une base rythmique guitare et basse, vient souffler une fort enjôleuse, envoûtante, mais inquiétante mélodie. Dans cette atmosphère nocturne, nous semblons presser le pas… A mi-parcours, un battement de cœur samplé introduit la voix de Youenn ROUE qui, tour à tour chuchote, scande, puis clame dans une langue bretonne bien timbrée, un texte aussi noir que porteur d’espoir, corroborant les primes intentions du propos musical : - Talm ur galon. « Dindan gouleier yen ar straedoù, korfoù goullonderet O anal a dreuz prenester mein-bez bras ar vered neoù marnaoniet ha dremmoù masklet ur boblañs hag a glemm Danvez rust ar riblennoù gleborek ha klouar a gren Pazenn ha pazenn, kammed ha kammed Ar spi zo tec’het dindan zouar da glask kuzh Da zisoñjal trouz skiltr lerenn sklas ar skourjez a stlak a-us Mein ha beton faoutet ha frailhet a lez da vont Trouz un dasson, trouz un dasson Talm ur galon, talm ur galon ». - Le battement d’un cœur « Sous les lumières blafardes des rues, des corps étripés Leurs souffles passent au travers des fenêtres des grandes pierres tombales du cimetière Des âmes affamées et des visages masqués d’une population qui souffre Sur la texture rugueuse des trottoirs humides et tièdes qui tremblent Marche après marche, pas à pas L’espoir a fui dans les sous-sols de la ville pour s'y réfugier Afin d’oublier le son perçant de la lanière glacée du fouet qui claque au-dessus Pierres et béton, fissurés et fendus laissent passer Le bruit d’une résonance, le bruit d’une résonance Le battement d’un cœur, le battement d’un cœur ». Ce texte, écrit originellement, en breton, avec sa traduction en français, figure, comme celui de « Skilfoù an noz », sur un encart plié et inséré dans la jaquette. Son fond « acier », présente, en recto-verso, toujours inscrites dans l’esprit de la charge graphique sus-décrite, deux « photographismes » du groupe. Suivant, en plage 2, « Skeulenn Richter - Gamme de Richter », un plinn, très dense, très danse, très transe, éclairé par le fin et alerte jeu de batterie de Jean-Marie NIVAIGNE qui dialogue, notamment avec le couple de sonneurs ROUE/LE PAGE et l’entêtant accordéon de Tangi LE GALL CARRE, voici « Mojenn Alan Torrboc’h - La légende d’Alan Torrboc’h » et la magnifique et prenante intervention de Lionel LE PAGE, cette fois, à l’Uilleann-pipes. Cette présente version studio est beaucoup plus concentrée que celle de plus de 11 minutes, enregistrée au festival des Vieilles Charrues, sur l’EP « STARTIJENN et Cyril ATEF » (2020), avec ses digressions rythmiques et interactives, bien à propos, sur scène et, de plus, en présence d’un remarquable batteur et percussionniste invité. Ici, on reste dans la tradition de la gwerz, avec prédominance du couple Uilleann-pipes/Accordéon diatonique, sur picking de guitare. En tous cas, un très bel et émouvant moment. Après sa sortie en EP, le 7 mars, et je l’ai évoqué plus haut, la récente réalisation d’un clip, dont il fait l’objet, mais aussi, une deuxième fois présent, en version « Radio-Edit », sur la dernière plage de ce CD, voici « Skilfoù an noz - Les griffes de la nuit ». C’est visiblement le morceau « promo » de « Talm ur galon ». Pour les inconditionnels du rap, et ils sont très nombreux (En 2021, le rap français se taille la part du lion dans le top 10), ils seront comblés. J’ai, pour ma part, préféré la « partie instrumentale » et sa rythmique rock, avec, en premier lieu, l’époustouflant solo de biniou qui va chercher des aigus extrêmes, habituellement, propres aux envolées des guitar heroes. Quelle performance ! Par contre, lisez avec grande attention l’édifiant texte écrit, comme un vibrant manifeste, par le bretonnant Youenn ROUE qui, après avoir confirmé, au nom du groupe, le viscéral attachement de STARTIJENN au fest-noz, à la danse, aux danseurs et à la langue bretonne, rend, musicalement, hommage au feu et légendaire guitariste Jacques PELLEN et au plus que vivant accordéoniste diatonique, Fred GUICHEN, co-créateur du groupe Are Yaouank (A.R.Y.), dans les années 90.[.../…] Pobl a zañs zo kreñv evel ur panzer An dañser zo priziusoc’h ‘vit kant mil stream Ur skoed a-dal d'ar c’haoc’h a strev an ardivink Selaou ‘ta Jacques hag e c’hwec’h kordenn strink Nerzh an hengoun a vir ur strakell diouzh an tuning Paket e vi etre skilfoù an noz 'vel gant Freddy gant A.R.Y ». [.../…] [.../…] « Ni zo ‘tal sal ar fest ha prest d’he deviñ Ivin ma biz kreiz a gresk da vout ur skilfenn Ni ‘vo ar re o bounto ‘tal dor an Ifern ». |
[.../…] « Un peuple qui danse est puissant comme un panzer Un danseur est, pour nous, plus précieux que cent mille streams Il est un rempart face à la médiocrité que nous crache la machine Écoute donc Jacques et ses six cordes de cristal La force de la tradition nous préserve de la misère culturelle Tu seras prisonnier des griffes de la nuit Comme avec Freddy dans A.R.Y. » [.../…] [.../…] « Nous sommes en face de la salle de concert, prêts à y mettre le feu L'ongle de mon majeur pousse jusqu'à devenir une griffe Nous serons ceux qui pousseront l'Ankou jusqu'aux portes de l'enfer ». |
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