De bien belles surprises !…
- La parution, vivement espérée, d’un nouvel et deuxième opus pour un groupe morbihannais qui nous avait, particulièrement, séduits et, qu’avec conviction, nous vous avions présenté et vivement conseillé sur nos pages en ligne, lors de la publication de sa première création, « Tan » ; c’était en décembre 2020.
- Sans excessive rupture avec ce prime album, certes plus « électro-néo-trad » , mais dans sa droite ligne, alors envisageable, la transcendance de ses prometteurs prémices, notamment guitaristiques, avec, cette fois, une couleur bretonne et celtique portée par un son, résolument, Pop/Rock.
- Afin de, mieux encore, affirmer, conforter, intensifier ce présent choix stylistique, un élargissement de l’effectif instrumental fondateur, transformant le duo initial voix/guitares, formé en 2018, en quartet, par l’adjonction d’une basset et d’une batterie, constituant ainsi, la normative configuration, idéale pour un groupe de rock.
- Une très enrichissante rencontre artistique et devenue pérenne collaboration entre quatre excellents musiciens, puisque ce nouveau périmètre, initialement prévu, par les deux membres originels, que pour la mise en valeur de quelques chansons du nouvel album, aboutit, finalement, à une totale intégration pour l’ensemble du programme discographique et, mieux encore, pour les prestations scéniques qui en découlent.
- Un judicieux et qualitatif choix des nouveaux instrumentistes, puisqu’il s’agit, excusez du peu, de Benoît GUILLEMOT, à la batterie et de Stéphane De VITO, à la basse !...
Mais au fait ?… un natif duo voix/guitares aux résonances franchement celtiques et électriques, notamment griffées « Fender Stratocaster » , soulignant et dialoguant avec la féminine, puissante et prenante voix d’une expressive artiste qui chante en breton, en français, en anglais ou en gaélique écossais…
Cette trop sommaire, mais fondamentale description, ne vous rappellerait-elle pas VINDOTALÉ ?
Eh bien oui, il s’agit bien de ce talentueux duo qui, abandonnant sa prime parité structurelle, d’ailleurs traduite graphiquement dans son logo, intègre deux masculinités instrumentales pour nous proposer sa nouvelle création, « Hunerez Ar Bal - La Dormeuse du Bal » .
Ce titre fait penser, bien évidemment, au « Dormeur du val » , poème d'Arthur Rimbaud l
C’est ainsi qu’au sein de cette nouvelle production discographique, brillamment, figurent :
- Au chant et chœurs : Bleunwenn (TRI YANN, Dan AR BRAZ, Carlos NUNEZ…).
- Aux guitares, programmations et chœurs : Gwenole LAHALLE (CARRE MANCHOT, Annie EBREL, Yann Fañch KEMENER, Sylvain GIRO, LUGO…).
- Aux guitares basses : Stéphane DE VITO (AR RE YAOUANK, GUICHEN Quartet, PAT O'MAY, HIKS…).
- A la batterie : Benoît GUILLEMOT (KREIZ BREIZH AKADEMI#6, HIKS…).
Afin de ne point être récurrents, nous n’avons mentionné, ci-dessus, pour chaque artiste, que quelques repères biographiques, en vous invitant à vous reporter à nos précédentes chroniques « Tan » de VINDOTALÉ (Notre chronique) ou à « Bezañ en e vutun » de HIKS (Notre chronique) .
Cette distribution resterait, néanmoins, incomplète si nous ne mentionnons pas, pour 3 titres et aux vielles, Willy PICHARD (CHEVREL/HAMON/PICHARD, LEFEVERE/PICHARD…) et pour une pièce aux paroles traditionnelles écossaises, à la veuze, Clément LE GOFF (FORJ Trio ou Sextet, WARAOK…).
L’excellente formation, récemment constituée et atteignant, pour quelques titres, le périmètre du sextet, va-t-elle parvenir à redonner vie à cette « Dormeuse Du Bal » qui, au sortir d'une léthargie forcée, par un contexte sanitaire, encore bien présent dans nos esprits, ne dansait vraiment plus ?
Rassurez-vous, c’est, ô combien, le cas !
Avec 10 titres, dont 5 chantés, intégralement, en breton, VINDOTALÉ nous propose près de 40 minutes de mélodies et rythmes, tour à tour, énergiques, endiablés, voire planants, pour un voyage musical et textuel se déroulant entre Armorique, de Ouessant aux Marches de Bretagne, via les marais salants guérandais… jusqu’aux îles Hébrides.
Mais ne vous y trompez pas, ces compositions originales, parfois adossées à des textes traditionnels, «évoquent, en filigrane, des thématiques plus contemporaines : la liberté, les travers de ce monde, le non-conformisme, la quête intérieure… » , comme le précise le site officiel de VINDOTALÉ,
Ainsi souhaité par les artistes, le chemin de cette randonnée celtique se révèle, d’entrée, avec « You » , délicieusement « RocKailleux » !
Comme pour rappeler les fondements de VINDOTALÉ, c’est le duo voix/guitare électrique qui, sur une même ligne mélodique, « scande » les toutes premières notes de la première plage de l’opus.
Une réverbération… puis, en quelques pulsations bien senties, la batterie ouvre la voie aux électriques phrasés divinement échevelés de Gwenole qui précèdent le chant puissant et syncopé de Bleunwenn évoluant, ponctué de quelques courtes césures « a capella » , sur un tempo d’enfer, qui transite, aussi, par une incantatoire phase de transe.
La vielle de Willy PICHARD vient s’adjoindre à ce déferlement de sonorités instrumentales et vocales extrêmement énergiques, parfois acides, en y distillant ses habiles spires celtiques.
Avec une texture musicale bien profonde, due à la basse de Stéphane DE VITO, toutes les strates rythmiques et vocales sont, à bon volume d’écoute nécessaire pour ce style, parfaitement « lisibles » , grâce à un excellent mixage, signé VINDOTALÉ.
Si la musique est émargée du duo originel, le texte de « You » , chanté en breton par Bleunwenn, est un traditionnel, Initialement titré « Pa sav al loar - Quand la lune se lève » .
Le texte qui, en page 4 du livret annexé au CD, chapeaute l’intégralité des paroles, nous donne la teneur globale du propos.
« Quand la lune se lève en décembre, sous les nuages couleur de cendre, je vais avec les nains chercher des herbes. Lorsqu’elles sont jaunies par la lumière de la lune, j’en fais des remèdes sans pareil, j’en fais des drogues magiques qui guérissent toutes les maladies. Ha ha ha ! Gens imbéciles ! Croyez-vous que je resterai, mort, dans ma tombe ?
Je courrai encore les champs ! Avec le vieux Satan et tous les diables ! » .
Si, désirant éluder, pour vous, tout caractère fastidieux de lecture, nous ne détaillerons pas, comme pour ce « You » , tous les morceaux qui constituent « Hunerez Ar Bal - La Dormeuse du Bal » , nous tenions, néanmoins, à pleinement souligner, à la fois, les sonorités très Pop/Rock associées à un certain enracinement traditionnel qui génère directement les créations du groupe ou qui, plus largement, nourrit l’inspiration des nombreuses paroles originales écrites par Bleunwenn.
En ouverture et en quelques secondes, ce fort réussi et convaincant « You » donne le ton à l’ensemble du programme, tant vocalement que musicalement.
C’est, sans conteste, le morceau « phare » de la coloration, très nettement Pop/Rock, vigoureusement insufflée par la nouvelle structure de VINDOTALÉ.
Dans l’esprit « bien mordant » du morceau, nous aurions, néanmoins, préféré, pour notre part, un final « en cut » , plutôt qu’un fondu en fermeture. Mais c’est, vraiment, un détail !
Après, en 2e plage, « Shony » qui nous emmène dans le passage mystérieux du Minch, vers les Îles Hébrides, en Ecosse, chanson durant laquelle, en introduction et quasi conclusion, Fañch BIHAN GALLIC donne, en gaélique, réplique narrative à l’enjôleuse tessiture de Bleunwenn qui chante, ici, en anglais, un texte composé par elle-même, nous avons beaucoup aimé
« Bale » , la marche, en breton.
Une musique de Gwenole LAHALLE, des paroles, en langue bretonne, de Bleunwenn, « Bale » , apparaît comme « une errance au cœur des terres d'Armorique, hymne à la liberté et à l'héritage ancestral d'un pays » , comme le précise le site Internet officiel de VINDOTALÉ.
« J'ai pris la route au lever du soleil… De l’île d’Ouessant aux Marches de Bretagne…
J’avance dans l’année nouvelle… Dans la violence du vent…
Je chante mes rêves en devenir… » .
Durant les 15 premières secondes de la pièce, une nappe de programmations, semble s’élever, brumeuse et fantomatique, préfaçant un prenant glas de guitare électrique, assez saturé, lui-même introduisant la très belle ligne vocale de Bleunwenn qui, en volutes réverbérées, module une obsédante complainte, toujours, sur la ponctuation assez sombre de la guitare.
L’ample contraste entre la voix et les instruments paysage, à souhait, l’ensorcellement du cheminement.
Sur une ligne de basse bien présente, l’impétueuse batterie intervient, les programmations soutiennent l’entêtement de la guitare pour mieux relancer cette marche « dans la violence du vent » , jusqu’aux toutes dernières et plus ténues notes « a capella » de notre « Viviane de la lande » .
Ce morceau est, aussi, un essentiel de « Hunerez Ar Bal » . Il n’est pas étonnant que VINDOTALÉ ait choisi d’en réaliser, en décembre 2022, une captation « live » , enregistrée à la Chapelle bleue de Ploërmel.
Selon une source, publiée en ligne, le disque aurait pu être baptisé du nom de cette grandiose pièce, à écouter dans toute sa puissance pour ne rien rater du son particulier qu’il revêt.
Suivant le titre éponyme, une fois, encore, composition de Gwenole LAHALLE, paroles, en langue bretonne, de Bleunwenn :
« Jadis elle dansait… Et beaucoup d’autres aussi… vaincus leurs corps et leurs bras…
Par le silence… séparés dans la nuit… Ce soir, elle danse la dormeuse du bal ! » …
nous avons, particulièrement apprécié « Yeun Elez » .
Non pas, par paresse rédactionnelle, mais parce que VINDOTALÉ traduit par ses mots et à merveilles, l’essence même de ce très beau morceau, nous en reprenons, ci-dessous et in extenso, les termes :
« Yeun Elez » est une chanson d'amour, dont le refrain met en musique les premiers vers de chanson amoureuse retrouvés par un moine copiste, écrit en bas-breton. Une chanson d'amour mais pas que. Autour de ces deux amants qui se retrouvent, se cherchent, s'attendent sur les pentes récemment calcinées du Yeun Elez, - cristal du duo guitare-voix -, c'est un monde fou, perturbé par la guerre, la violence, - notes profondes, abyssales de la basse de Stéphane De Vito- . Face aux troubles du monde, le Yeun Elez, traditionnellement considéré comme les Portes de l'Enfer, semble devenu un Jardin d'Eden... ».
Chanté, principalement, en français avec, un fragment de poème d’amour écrit en moyen-breton et retrouvé par Ivonet OMNES, moine copiste (1350), cette respiration Pop/Folk, en voix et guitare acoustique Maestro, seulement, secondées par quelques claviers, met parfaitement en lumière toutes les nuances que peut révéler le divin, large et souple registre vocal de Bleunwenn.
A écouter et réécouter… à déguster !
« An guen heguen an laouenas An hegarat an lacat glas mar hann guorant va karantit da vout in nos oh he costit… » | « La blanche souriant m’a réjoui L’aimable à l‘œil bleu… Si me garantit mon amour D’être la nuit à son côté… » |
Nous voici, à nouveau, interpellés par les déchirants et persistants riffs de Gwenole, pour un retour en Ecosse avec un traditionnel titré « Air Falalalo » , juxtaposant des thèmes musicaux breton et écossais.
Au cours de ce morceau, en chapelets de « Falalalo » , virevolte la voix de Bleunwenn, qui survole un tempo de basse et batterie, particulièrement soutenus et « Rock-celtisé » , par de très agiles et obsédantes interventions de la veuze de Clément LE GOFF.
A la suite de cette chanson traditionnelle ré-arrangée par VINDOTALÉ, nous aurions souhaité, plus largement, vous parler, en plage 7, de « La fille du sable » .
D’autant qu’il s’agit, accompagné du chant de la veuze de Willy PICHARD et interprété en breton et français par les voix du duo fondateur, d’une ode aux vents et couleurs de la Bretagne… et des marais salants de la presqu'île guérandaise qui, par la localisation de Culture et celtie, l’e-MAGazine, nous sont, vous le devinez, intimement chers à notre cœur.
« Fille du sable ou bien du vent
Fille du soleil de l’Orient
De la lagune, de l’Océan,
Des marais, marais salants. »
Mais… mais, nous vous avions, en amont de ces présente lignes, fait la promesse, de ne pas « disséquer » tous les titres, bien que, l’intégralité ce ceux-ci, par leurs qualités de compositions, d’élaborations textuelles, d’interprétations vocales et instrumentales le mériteraient.
A grands regrets, nous survolerons, donc, « Mor » , où, délicieusement, la guitare de Gwenole se « Dan AR BRAZise » et la vielle de Willy PICHARD « flûtise » pour peindre la mer et suggérer les méditations, les mystères, les légendes, qu'elle suscite.
Sur l’onde de glaz et d’argent de cette magnifique pièce, en langue bretonne, vogue avec déconcertante aisance et beauté le chant d’une sirène… celui de Bleunwenn !
« Mor, mor, mor, Pelec’h e lakaez da wagennoù das c’hlavaiñ ? Da gevrin a vean gouzout : Da belec’h e skoda wagennoù na pa varvont ? » |
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Puis, en piste 9, sur une musique originale de Gwenole et Bleunwenn, la chanteuse interprète un texte traditionnel de Bretagne « La fiancée de Satan » .
« Assise sur une chaise dorée, je verse l’hydromel aux damnés. »
Avec tous ces titres électriques, énergiques et néo-celtiques, « La Dormeuse du Bal » s’est, sans doute aucun, belle et bien réveillée.
« Hunerez Ar Bal » se referme, en effet, adapté d'un chant traditionnel des Îles Hébrides (chant à battre le linge des femmes écossaises), sur un morceau échappant au style Pop/Rock qui imprègne de tous ses rythmes, sonorités, lignes vocales, l’ensemble du programme, puisque « Gaol Ise Gaol I » apparaît, clairement, dansant, même, disons-le, franchement « disco » , style qui, par ailleurs semble revenir dans l’air du temps.
C’est virevoltant, parfois, par le jeu de la guitare électrique ou de la voix… scandé.
Le chant de Bleunwenn, nous rappelle, ici, et de façon fort troublante, celui de Karen MATHESON, chanteuse du groupe de folk écossais, de renommée internationale… CAPERCAILLIE !
De septembre à octobre 2022, enregistré et mixé à Sérent (56), au « Lann studio » (Voir site) , « Hunerez Ar Bal » vous réserve, à bon volume, un agréable confort d’écoute, tant pour sa mise en espace que pour sa stratification sonore, grâce, notamment, à Gwenole qui, au-delà d’un remarquable guitariste et compositeur est, aussi de métier, ingénieur du son. Il a crée son propre studio d'enregistrement, susnommé, en 2008.
Nous avons déjà, à ce titre, sur nos pages en ligne, rencontré sa griffe artistique et technique au travers d’enregistrements comme ceux d’Annie EBREL (Lellig), VINCENDEAU/PICHARD (Noctural Alchemy)…
Le mastering réalisé par Raphaël JONIN (Voir site) - sur nos pages en ligne : DENEZ (Mil hent - Mille chemins), Deborah REMY (De terre et d'eau), ‘NDIAZ (La brune), Celtic SOCIAL CLUB (Deluxe Edition) - donne la parfaite touche finale et essentielle à cette production discographique d’indéniable qualité.
Fruit d’un VINDOTALÉ qui a trouvé, en quartet, sa bonne et efficiente dimension ainsi qu'une pleine et riche puissance créative, « Hunerez Ar Bal - La dormeuse du Bal » est un album abouti, intense et énergique à vous procurer dans les meilleurs délais… Il préface, sans nul doute, dans l’avenir, de bien belles et autres surprises !…
Gérard SIMON
Illustration sonore de la page : VINDOTALÉ - "You" - Extrait de 01:03.
Le site officiel de VINDOTALÉ : (Voir site)
D'autres extraits sonores sur Culture et celtie, l'e-MAGazine (Voir site)
Les titres du CD "Hunerez Ar Bal" de VINDOTALÉ
01. You - Musique : Gwenole LAHALLE et Bleunwenn / Paroles : traditionnel (sauf refrain) - 03:50.
02. Shony - Musique : Gwenole LAHALLE / Paroles : Bleunwenn - 03:26.
03. Bale - Musique : Gwenole LAHALLE / Paroles : Bleunwenn - 03:52.
04. Hunerez Ar Bal - Musique : Gwenole LAHALLE / Paroles : Bleunwenn - 04:01.
05. Yeun Elez - Musique : Gwenole LAHALLE / Paroles : Bleunwenn (sauf fragment poème par Ivonet OMNES) - 03:51.
06. Air Falalalo - Musique : Gwenole LAHALLE / Paroles : Bleunwenn et traditionnel écossais - 03:51.
07. Fille du Sable - Musique et paroles : Gwenole LAHALLE (sauf breton) - 04:10.
08. Mor - Musique : Gwenole LAHALLE / Paroles : Bleunwenn - 03:51.
09. La Fiancée de Satan - Musique : Gwenole LAHALLE / Paroles : Bleunwenn et traditionnel - 04:05.
10. Gaol Ise Gaol I - Musique et paroles : traditionnel / Arrangements : Gwenole LAHALLE - 03:59.
CD "Hunerez Ar Bal" de VINDOTALÉ
Parution : 10 février 2023
Réf : 5112858
Production : AZTEC Musique (Voir site)
Distribution : Coop Breiz (Voir site)
© Culture et Celtie
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