Les 15 et 16 décembre 2008 s'est tenu à Genève au Palais des Nations, le premier forum des Nations unies sur la question des minorités, sous la responsabilité de Madame Gay McDougall experte indépendante pour les minorités.
Intervenant au nom d'EBLUL (European Bureau for Lesser Used Languages, Bureau européen des langues moins répandues), Tangi Louarn a rappelé qu'en Europe, ces droits sont garantis en particulier par une Convention-cadre sur les minorités nationales et que, d'autre part, la Charte européenne des langues régionales ou minoritaire a pour objectif de protéger et promouvoir les langues des minorités. Il a déploré que, dans l'Union européenne, la Grèce et la France sont les deux seuls États qui n'ont ratifié aucune de ces deux conventions. « La France » , a-t-il dit « n'a pas non plus ratifié l'article 27 du Pacte international sur les droits civils et politiques, ni l'article 30 de la convention des droits de l'enfant, articles qui reconnaissent les droits des personnes appartenant à des minorités. » Il a aussi souligné que La France, en particulier, "reste marquée par une conception et une pratique d'assimilation des peuples différents et refuse officiellement de reconnaître les droits des personnes appartenant à des minorités."
Le représentant d'EBLUL a tenu à remercier le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies pour son action et ses dernières recommandations à la France notamment en mai dernier. En effet, il a fait remarquer que ces recommandations ont été mises en avant par un Sénateur breton lors des débats au Parlement français à la fin du mois de mai et qu'elles ont fortement contribué à faire évoluer certaines opinions et à faire adopter en juillet 2008 la mention symbolique des langues régionales dans la Constitution française au titre du patrimoine de la France, grâce à l'action des parlementaires soutenus par une opinion publique très favorable.
Regrettant que, selon le Gouvernement français, cette modification constitutionnelle ne donne encore aucun droit aux membres des minorités linguistiques, le représentant d'EBLUL a relevé que ces recommandations de l'ONU seront un soutien "à tous ceux qui refusent l'assimilation forcée".
Il a également fortement approuvé l'objectif d'éducation aux droits de l'homme, pour les majorités comme pour les minorités, en rappelant l'importance de la Déclaration sur la diversité culturelle de l'UNESCO qui se fonde notamment sur l'article 1er de la Déclaration universelle des droits de l'homme dont on vient de célébrer le 60e anniversaire : "tous les hommes naissent libres et égaux en dignité et en droit". Mais "dans un pays comme la France, on assimile l'égalité à l'uniformité et on oublie souvent la notion d'égale dignité" a-t-il remarqué. Car la dignité renvoie directement, au respect de l'identité culturelle des personnes et des groupes, comme l'affirme la Déclaration universelle de l'UNESCO sur la diversité culturelle : "la défense de la diversité culturelle est un impératif éthique, inséparable du respect de la dignité de la personne humaine".
Or, il a montré un exemple exactement contraire à la promotion de cette diversité culturelle : un manuel scolaire utilisé dans des écoles françaises, mentionné dans le rapport 2007 d'EBLUL-France, dans lequel des populations "à risque de repli identitaire", en Alsace, au Pays Basque, en Catalogne, en Corse, en Savoie. sont stigmatisées sur une carte de France et dans les textes, à la périphérie de l'État. Il a souligné qu'à l'inverse des allégations de ce manuel, l'éducation multilingue et pluri-culturelle naturelle des locuteurs de langues régionales les prédispose bien plus à l'ouverture sur la diversité des cultures que l'éducation monolingue francophone, et qu'elle favorise en outre de meilleurs résultats scolaires et une meilleure insertion dans le monde d'aujourd'hui.
Par ailleurs, plusieurs experts sont intervenus pour que ces recommandations des Nations Unies soient exprimées de façon plus impérative.
Il faut aussi noter que la notion même de "minorité", bien que nécessaire au vu de l'ensemble des textes qui y font référence, a été plusieurs fois soulevée au cours des débats. Quand bien même une population se trouve minoritaire au sein d'un État, cette qualification peut être perçue da façon dévalorisante, ou même discriminatoire. Il serait possible de qualifier les groupes minoritaires de "composantes" de la société, considérées sur un pied d'égalité. On pourrait aussi parler de "peuples ou populations dominés", car les minoritaires peuvent représenter globalement une majorité dans un pays ou un État, alors qu'un groupe minoritaire dominant peut exercer l'essentiel des pouvoirs. Le représentant d'EBLUL a rapporté qu'ainsi en France 90 % de ceux qui sortent de l'École nationale d'administration et qui contrôlent l'État, sont nés à Paris. Et on a vu que l'unanimité des membres de l'Académie française a protesté contre l'introduction des langues régionales dans la Constitution, tandis que 68 % de la population française y était favorable selon le dernier sondage CSA qui a été fait en juin 2008.
An Biúró Eorpach do Theangacha Neamhforleathana
Bureau Européen pour les langues moins répandues
European Bureau for Lesser Used Languages
46 Kildare St 46 Sráid Chill Dara,
Baile Atha Cliath 2 /Dublin 2,
Éire/Ireland
(voir le site) de EBLUL
(voir le site) de Eurolang
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