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- Communiqué de presse -
La Bretagne en danger
La Bretagne en danger Il est des moments où la liberté est menacée. Ces instants peuvent être vécus dans une indifférence totale et une parfaite passivité. Ils peuvent aussi être l'occasion d'un sursaut légitime. Le discours qu'a tenu Nicolas Sarkozy à Epinal le 12 juillet dernier est davantage qu'une provocation. Quand
Jean Yves Quiguer pour Mouvement fédéraliste de Bretagne le 16/07/07 9:58

La Bretagne en danger

Il est des moments où la liberté est menacée. Ces instants peuvent être vécus dans une indifférence totale et une parfaite passivité. Ils peuvent aussi être l'occasion d'un sursaut légitime.

Le discours qu'a tenu Nicolas Sarkozy à Epinal le 12 juillet dernier est davantage qu'une provocation.

Quand il dit : "En France, les valeurs de la République et la conception de la nation sont le fondement de la démocratie" il déraisonne.

Pour défendre les thèses chères à Sieyes, N. Sarkozy dit exactement le contraire de ce qu'écrivait ce dernier.

L'idée de nation, chez Sieyes, est une pure création pour opérer un transfert de souveraineté. Sieyes n'était pas rousseauiste et se méfiait du peuple. Il n'était pas le seul à vouloir exclure le peuple de toute participation à la souveraineté. C'est ainsi que la nation surgit mais non sans poser un problème majeur. Le roi était une personne tangible. Que signifie le transfert de souveraineté à un concept intangible par définition ? La réponse ne se fit pas attendre. Il suffisait de remplacer le corps du roi par celui des représentants de la nation, ces-derniers apportant la tangibilité nécessaire. Et Sieyes de préciser que ces représentants représentent la Nation et non le peuple. S'ils représentaient le peuple, ce serait une démocratie, ce dont Sieyes ne veut pas. Il oppose la république à la démocratie.

« Les citoyens qui désignent des représentants renoncent et doivent renoncer à faire eux-mêmes la loi : donc ils n'ont pas de volonté particulière à imposer. S'ils dictaient des volontés ce ne serait plus un état représentatif, ce serait un état démocratique » (cité par Carré de Malberg in Contribution à la théorie générale de l'Etat)

En France le mot « nation » obéit à un objectif de neutralisation de celui de peuple.

Notre République est en opposition permanente avec les principes de la démocratie.

Le mode de vie social et politique de la "polis" est l'isonomie, le gouvernement des égaux. Le Demos c'est avant tout la convocation de tous au droit à la parole et à l'action politique. Ceux qui comme Nicolas Sarkozy évoquent la démocratie et qui ne sont pas des démocrates, pensent que la nature veut que le gouvernement revienne à ceux qui ont des titres pour gouverner : détenteurs de richesses patrimoniales ou intellectuelles, savants, experts, grandes familles, notables….

La démocratie n'est pas la forme d'un gouvernement représentatif mais le fondement de la politique elle-même qui renvoie de facto toute domination à son illégitimité première.

Dans la démocratie athénienne, c'est le tirage au sort qui décidait des responsables et non la représentation. La représentation obéit au principe oligarchique.

Ce qui effraie les anti-démocrates, c'est la puissance révolutionnaire du mot, voire sa force de scandale. C'est le gouvernement de la multitude, de ceux qui se qualifient de gens bien comme de la canaille.

La démocratie c'est avant tout le gouvernement de ceux qui n'ont pas de titres à gouverner.

La démocratie, écrit Claude Lefort, implique une « désincorporation du social, une dissolution de tout ancrage naturel ou transcendant de la vie collective, une expérience de la liberté politique liée au fait que le pouvoir est désormais reconnu comme interdit à l'appropriation des dépositaires de l'autorité publique ».

Nicolas Sarkozy poursuit : « En France, la démocratie doit s'accorder avec cette conception particulière de la souveraineté une et indivisible comme la nation et comme la République, et qui implique que l'Etat lui aussi soit un. Car si l'Etat en France doit obéir à la séparation des pouvoirs, il ne saurait être divisé en pouvoirs rivaux qui se concurrencent, qui se combattent, qui s'affaiblissent l'un l'autre comme c'est le cas dans les Etats fédéraux où la méfiance des pouvoirs locaux vis-à-vis du pouvoir central est constante. Comme c'est le cas aussi dans les modèles les plus libéraux où l'on ne croit qu'à la société civile, où l'idéal est celui de l'Etat minimum, où toute forme de pouvoir est considérée a priori comme une menace pour la liberté. » Les Etats-Unis sont une République indivisible, ce que récitent quotidiennement les jeunes américains scolarisés dans le « Pledge of Allegiance ». Contrairement à que dit N. Sarkozy cette conception n'est pas une particularité française. En revanche ce qui caractérise la pensée française, c'est cette vision étroite de la souveraineté, calquée sur l'inimitable Jean Bodin pour qui «La souveraineté est la puissance absolue et perpétuelle d'une République»

Cette conception de la souveraineté est totalement dépassée et quotidiennement mise en échec, ne serait-ce que par les limitations des organisations internationales, voire supra-nationales.

La souveraineté partagée est précisément ce qui empêche l'absolutisme. Et c'est cette souveraineté partagée qui est à l'œuvre dans le régime fédéral.

Parler d'affaiblissement du pouvoir dans les pays fédéraux, c'est ignorer la réalité de l'Allemagne, des Etats-Unis, du Canada, de l'Australie….qui ne sont pas les pays les plus affaiblis dans le concert des nations.

Nicolas Sarkozy plaide pour un état fort. Sa conception absolutiste de l'Etat, totalement obsolète, va le conduire sur des chemins minés, que seuls les apprentis dictateurs ont voulu emprunter.

On ne passe pas d'une république défaillante au bonapartisme caricatural, moins encore au césarisme d'un autre siècle, sans que les obstacles à franchir deviennent insurmontables.

La force d'un état ne dépend plus de sa puissance de coercition et de la privation des libertés, notamment de celles des populations minorisées. Le tout dépend de la richesse de ses parties.

Ce qui fait la force des Etats-Unis, c'est l'alliance fédérale des 50 états. Cette force ne trouve pas son origine dans la domination du pouvoir fédéral à l'endroit des états fédérés, il ne l'a pas, mais elle se situe au cœur même du principe fédéraliste.

Les pays européens qui nous entourent ont bien perçu cette réalité. L'Allemagne est fédérale, comme l'est aujourd'hui la Belgique. L'Espagne et l'Italie sont quasi fédéraux. Jusqu'au Royaume-Uni où la dévolution est un premier pas, même si c'est un pas timoré.

Doit-on lire en filigrane que c'est la fin de la décentralisation et que la France, en contradiction avec une dynamique européenne qui réattribue au local son pouvoir de décision, va une fois encore faire preuve d'exception ?

Quand il était ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy a renforcé les pouvoirs des Préfets de Région, non sans dessein.

Il est vrai qu'il avait la voie libre tant le pouvoir régional était absent des principaux dossiers, plus enclin à faire augmenter la pression fiscale régionale que de s'attaquer aux véritables problèmes.

Il aura fallu quelques semaines pour créer un nouveau logo et plus de deux ans pour constater qu'il n'y avait pas de politique maritime régionale…

Le Président a horreur du vide.

La mouvance indépendantiste crée les conditions de la résurgence d'un état parisien fort et autoritaire que nous allons subir, alors que la construction fédéraliste permet d'innerver toutes les composantes de la société et qu'elle est la seule stratégie possible pour acquérir cette autonomie souveraine dont dispose tout état fédéré.

Doit-on s'interroger sur la nature des dangers que nous encourrons et si, parfois, nous ne sommes pas ses principaux artisans ?

Une Bretagne état fédéré dans une France fédérale et au sein d'une Europe fédérale, est un objectif qui appartient au monde du possible.

L'indépendance fait surtout référence au non-dit. En 2007 aucun état n'est totalement indépendant.

Et il faut le dire sans ambages : être indépendant mais asservi par ses petits chefs locaux est peu enviable ; une illusion qui s'achève en regrets…. Le rôle libérateur de l'émancipation conduit souvent à celui d'oppresseur quand l'ancienne minorité est devenue majorité et que les leaders ont enfin obtenu les pouvoirs qu'ils convoitaient.

C'est la raison pour laquelle, le fédéralisme, qui est aussi une philosophie de la personne, et qui engage une refondation sociétale, est la voie de l'avenir breton.

C'est aussi faire rentrer la Bretagne dans l'univers de la démocratie, ce qui, hélas, n'est pas encore le cas ne serait-ce que par l'oligarchie encore très présente, qui, étrangement, ne vit que par et pour Paris.

Le fédéralisme implique l'épuisement d'une époque historique et suggère la possibilité de penser, d'imaginer et d'écrire sa propre histoire autrement.

Le 16 juillet 2007

J-Y QUIGUER

MOUVEMENT FEDERALISTE DE BRETAGNE membre de

L'Union des Mouvements Fédéralistes

Cet article a fait l'objet de 2447 lectures.
Le Mouvement Fédéraliste de Bretagne plaide et milite pour l'adoption d'une architecture fédérale en Bretagne, en France et en Europe. Membre de l'Union des Mouvements Fédéralistes (UMF), il défend le concept de fédéralisme contractuel dans le cadre des institutions et celui du fédéralisme intégral dans le cadre de la société. LE MFB n'adhère pas à l'idée d'une fédération d'états-nations qui n'est qu'une forme de confédération conduisant aux mêmes échecs que l'actuel état-nation dont nous allons prochainement porter le deuil. C'est ce qui justifie un fédéralisme inspiré de la doctrine contractualiste en opposition avec la doctrine étatiste. Ce qui est bon pour le tout, l'est aussi pour les parties. Il ne saurait exister de fédéralisme européen sans un fédéralisme local, d
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