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- Communiqué de presse -
L'histoire des pilotes de Loire par Pierre Guillou
Geste éditions publie un gros livre sur la grande histoire des pilotes de Loire. On doit ce travail au Nazairien Pierre Guillou qui suivit la voie de son père, capitaine au long cours, en exerçant la profession de pilote de 1960 à 1991. Par la continuité de la filiation familiale, l'auteur a pu côtoyer d'anciens pilotes
Hubert Chémereau Par CREDIB le 21/01/09 9:11

Geste éditions publie un gros livre sur la grande histoire des pilotes de Loire. On doit ce travail au Nazairien Pierre Guillou qui suivit la voie de son père, capitaine au long cours, en exerçant la profession de pilote de 1960 à 1991. Par la continuité de la filiation familiale, l'auteur a pu côtoyer d'anciens pilotes qui lui ont confié leurs souvenirs.

Ce livre participe à la meilleure connaissance de la Bretagne maritime à travers une profession indispensable à la vie portuaire, le pilote maritime. La « Rivière de Nantes », comme l'appelaient les marins bretons pour parler de l'estuaire de la Loire, a été depuis la plus haute Antiquité une des portes d'entrée maritime de la péninsule armoricaine. Les pilotes qui étaient chargés de guider les navires ont contribué, bien avant la réglementation de leur profession par Colbert en 1681, à l'Âge d'or de la Bretagne qui était fondé à l'apogée de l'État breton, sur le commerce maritime. En montrant l'importance du Rocher de Saint-Nazaire où est apparu le bourg des pilotes au XVe siècle, ce livre, après les travaux du géographe nazairien André Daniel, tord définitivement le cou à cette légende du « petit village de pécheurs », qualificatif qu'on trouve encore dans certaines publications. Le site de Saint-Nazaire est indiqué sur les plus anciennes cartes de Bretagne, en particulier sur les fameuses cartes du Conquet, centre de cartographie marine réputé au XVIe siècle dans toute l'Europe.

Les Bretons étaient alors passés maîtres dans la science de la navigation comme le souligne l'historien Ronan Leprohon (1) : « Le Traité de navigation ou Manuel de pilotage à l'usage des marins bretons (1548) comporte les côtes depuis la Baltique jusqu'en Afrique. Il cite 23 ports irlandais, 44 ports anglais, 25 ports écossais et … 19 ports africains ! » La première attestation au Moyen Âge de pilotes nazairiens est parvenue jusqu'à nous à travers les écrits de l'historien Henri Moret qui nous parle de la Pénitence de Dieu, navire breton armé en avril 1270 pour le compte du roi de France, qui contrairement à la Bretagne, n'avait pas de marine. Ce vaisseau nantais en partance pour les croisades « prend sur la rade un laman pour lui faire franchir la passe des Charpentiers. »

L'approche de l'estuaire de la Loire est loin de mener le marin vers un long fleuve tranquille comme en témoigne la longue liste d'épaves qui tapissent les fonds estuariens. Dans son introduction, l'auteur dit fort à propos que pour le marin « l'approche de la terre fascine autant qu'elle le menace. L'idée de recourir à un guide pour franchir ce mauvais pas est née de cette angoisse… »

Pour répondre à la demande croissante liée au développement du grand port de Nantes à partir du XVIIe siècle, les pilotes sont issus de trois pépinières : Belle-Île, Saint-Nazaire et Basse Indre. Nous découvrons ainsi « Belle-Île, l'avant poste », « Saint-Nazaire, les guetteurs de l'estuaire » et « Indre, les hommes du fleuve ».

Pour les pilotes, il n'y a pas moins de 70.000 miles de côtes à mémoriser entre le nord de Belle-Île et le sud de Noirmoutier, cette île longtemps disputée entre Bretagne et Poitou. Ils devaient aussi s'approprier les 30.000 miles de rivière, nom familier de l'estuaire pour la confrérie des pilotes.

On a parfois dit que Saint-Nazaire a été la plus grande ville belliloise dans les années 1930-1950, en raison de la présence d'une forte communauté insulaire. On n'est pas alors étonné de découvrir la proximité des pilotes de Belle-Île et du port de Saint-Nazaire, qui après avoir été longtemps concurrents, au fil des relations de cousinage entre les hommes des deux stations, allaient unir leurs forces par un accord mémorable, signé en septembre 1910. À partir de 1933 les deux stations n'allèrent plus faire qu'une. Ce n'était pas rien pour des hommes farouchement attachés à leur indépendance.

Un long chapitre est consacré aux événements de mer qui nous rappellent le rôle et les lourdes responsabilités inhérentes au métier de pilote maritime. Dans le chapitre sur la seconde guerre mondiale, le lecteur ne peut qu'être marqué par la tragédie du Lancastria. La plus grande catastrophe maritime britannique survenue le 17 juin 1940, flirte avec le légendaire breton quand, à l'hiver 1941 le paquebot apparaît tel un vaisseau fantôme à l'équipage du bateau pilote la Lambarde : « Immobile, gîté, le grand corps inerte du Lancastria a été redressé dans la nuit par l'action conjuguée du vent et du grand flot. » Le liner de la Cunard Line va alors chavirer à nouveau pour reposer définitivement dans l'estuaire. Les cinq marins marqués par cette scène garderont toujours beaucoup de réticence à en parler. Comme l'écrit avec sensibilité Pierre Guillou « Le Lancastria et les braves qu'il garde en ses flancs demeurent sous la garde d'honneur vigilante et intemporelle des pilotes de Loire. »

Au fil des pages le lecteur découvre aussi l'évolution de ce métier, des années 1930 aux années 1990. De nos jours, la tradition du pilotage chez les Bretons reste encore bien ancrée, comme avec la compagnie Brittany Ferries, qui fait passer à ses commandants le brevet de pilotage britannique pour pouvoir entrer par eux mêmes dans les ports de Plymouth et Portsmouth.

Le fonds iconographique du livre est particulièrement riche en photographies et cartes marines. En bon marin, Pierre Guillou boucle son livre par cette expression typiquement bretonne (2) : « Bonne manœuvre. À Dieu-Vat ! »

Hubert Chémereau

Pilote de Loire, Pierre Guillou, 336 pages, Geste Éditions, 22 €

Notes :
1- Ronan Leprohon « Quand le Conquet était un centre de cartographie marine… », Le Peuple Breton de janvier 2009.
2- En 2008, le journaliste breton Patrick Poivre d'Arvor a utilisé cette même expression en signe d'adieu aux téléspectateurs de TF1 « Et comme on dit en Bretagne. Adieu Vat ! »

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