Samedi 16 novembre a eu lieu à Ti ar Vro Kemper une table ronde sur la culture à Quimper organisée par l'association Sevenadur e Breizh 21 (Cultures en Bretagne 21) et animée par Soaz Jolivet. Une cinquantaine de personnes y ont assisté et ont débattu avec la dizaine de participants, à la fois acteurs et observateurs de la vie culturelle de Quimper.
A l'approche des Municipales, on a pu regretter l'absence d'élus de la majorité municipale, sur cette question pourtant centrale pour la vie des Quimpérois. Naïg Le Gars, conseillère régionale, Ludovic Jolivet conseiller municipal de l'opposition (UMP), des membres de la Gauche Bretonne ont pu donner leurs points de vue dans la deuxième partie de la soirée. Ils ont dit partager l'essentiel des constats des intervenants. Dommage aussi que les responsables des structures publiques quimpéroises (à part le directeur de la MPT de Kerfeunteun invité de la Table Ronde) ne se soient pas déplacés. Ils auraient peut-être pu apporter des réponses à certaines questions posées.
Les photos projetées en préambule à l'assistance, montrant l'esplanade François-Mitterrand déserte aux abords du théâtre de Cornouaille et de la Médiathèque, ont introduit d'emblée le débat sur l'urbanisme et l'espace public. Selon Soaz Jolivet ayant étudié le rôle de l'urbanisme dans les pratiques culturelles, cet aménagement est typique d'un espace excluant les habitants.
Gilbert Le Guillou, directeur de la MJC de Kerfeunteun, a évoqué l'origine du Ministère de la Culture, qui fut spécialement créé, non en réponse à un besoin spécifique de la société française, mais pour offrir un ministère à André Malraux. De ce Ministère a découlé au fil des années une culture institutionnelle, centralisée et pyramidale. Ce qui, selon lui, explique l'échec des politiques culturelles successives, la confiscation de la culture par les classes moyennes supérieures et l'exclusion de la majorité de la population. Les scènes nationales, les centres d'art contemporain, les FRAC en sont les derniers avatars. Ce fonctionnement centralisé et pyramidal se retrouve désormais à tous les niveaux, comme à Quimper. Gilbert Le Guillou serait favorable à la disparition de ce ministère qui est un obstacle à une politique culturelle démocratique.
Il a été aussi question du pôle Max Jacob, qui inclut les espaces du théâtre, la maison des jardiniers, le Greta et les locaux actuels de Ti ar Vro. Le futur outil est apprécié par le responsable du Bagad Kemper. Des inquiétudes ont cependant pointé sur son futur fonctionnement et sur la place des associations dans cet équipement.
Il est aussi apparu que Quimper n'a plus de troupe de théâtre. Par manque de locaux, elles ont toutes déserté la ville. Maïwenn Le Nédéleg a fait part de son expérience, en tant que chargée de production et de diffusion au Teatr Piba. La seule réponse de la Ville en matière de spectacle, mise à part la Scène Nationale, consiste en des appels d'offres, solutions aléatoires et précaires qui mettent les troupes en concurrence.
Marie-Claire Pirot, présidente de l'antenne finistérienne de l'association « Chiens-guides d'aveugle » de l'Ouest, a déploré le peu de prise en compte des publics handicapés à Quimper, auquel s'ajoute le manque d'information : le seul film mensuel en audio-description n'est pas annoncé à l'avance.
Yann Pérennou a parlé de la maison de famille du poète et peintre Max Jacob que ses parents ont achetée et rénovée pendant plusieurs années pour en faire le restaurant Chez Max, rapidement devenu un haut-lieu de la vie culturelle quimpéroise. Expositions, rencontres avec des auteurs, lectures de poètes, conférences sur Quimper, concerts y ont régulièrement lieu. Un autre lieu quimpérois est en cours de rénovation par la famille Pérennou.
Confirmation par Marie-Josée Christien, auteur et critique, qui a évoqué « Les rendez-vous de Max » , rencontres-lectures avec des auteurs qu'elle organise avec Louis Bertholom et Gérard Cléry Chez Max, accueillant chaque mois un public de 35 à 50 personnes, sans autre moyen que le prêt du lieu par ses propriétaires. Elle a aussi précisé que la Ville de Quimper fait surtout appel pour ses animations littéraires à des offres « clés en main » qui ne font pas participer les énergies locales et régionales. Ainsi l'opération « L'Odyssée des mots » (d'un coût de 70 000 ¤ d'après le Télégramme) de la médiathèque. Il est difficile pour les auteurs vivant à Quimper et dans les environs de participer à la vie culturelle de leur lieu de vie.
Iiria Sauri, musicienne d'origine finlandaise vivant à Quimper, a évoqué l'éducation en Finlande où l'art occupe une place importante. Tous les élèves d'âge primaire ont ainsi 6 heures de musique par semaine, si bien que les jeunes Finlandais font partie de groupes ou d'orchestres et ont une vie associative riche.
Gilles Simon, chargé d'enseignement en sciences politiques, a tenté une synthèse de la première partie, pointant un hiatus entre une offre culturelle élitiste concernant une petite fraction de la population et une attente forte d'une prise en compte citoyenne.
Parmi les sujets évoqués par le public en deuxième partie :
- Le manque criant de locaux adaptés pour les associations, obligées de louer des salles dans les communes périphériques pour leurs manifestations.
- Pourquoi doit-on aller à Brest pour voir certains spectacles grand public (Bartabas par exemple) ?
- Le système de réservations au Théâtre de Cornouaille.
- Le manque de vie culturelle en général, qui puisse créer du lien entre les générations. Quelqu'un rappelle avec nostalgie les cabarets quimpérois des années 70-80 Chez Paul et Chez Michou et leurs soirées et concerts.
- Où seront accueillies les fêtes du type « fest-noz » , après la transformation du Chapeau Rouge en salle de congrès ?
- Constat est fait que nombre de manifestations, festivals et salons ont quitté Quimper pour d'autres villes plus accueillantes.
L'ensemble de ces questions sera naturellement au c½ur de la campagne des prochaines municipales. L'association «Cultures en Bretagne 21 » ne manquera pas de les poser à nouveau aux différentes listes candidates.