Donc on saura dimanche qui de la France ou de la Nouvelle-Zélande est championne du monde de Rugby. Accrochez vos ceintures : d'ici l'heure du coup d'envoi vous allez avoir droit à un tsunami médiatique sur le sujet. Accrochez-là encore plus fort au coup de sifflet final si d'aventure, mais c'est peu probable, les All Blacks sont mis au tapis. La presse de l'Hexagone va alors en faire des tonnes. Et atteindre des sommets dans la dithyrambe.
Ce n'est pas un scoop : le manque de mesure est l'un des défauts majeurs des médias contemporains.
Et quand il s'agit de sport de haut niveau, les bornes sont souvent dépassées.
Comme le sont aussi parfois les règles du fair-play et le comportement des sportifs sur les terrains, celui des spectateurs autour. Tout le monde a en mémoire la main « baladeuse » de Thierry Henry, le « coup de boule » de Zidane, les terribles scènes d'hooliganisme en Belgique, en Grande-Bretagne…
Pour autant la triche, la violence ne sont pas le privilège, si l'on ose dire, des clubs huppés, des grands stades.
Me revient à l'esprit ces images de la rencontre de notre club trégorrois contre une équipe de la région briochine. La guerre était derrière nous depuis quelques années déjà. On ne sait trop comment le bruit courut avant la fin de la rencontre que nous allions perdre : l'un des meilleurs joueurs d'en face était… un prisonnier allemand adopté par la population locale.
Le malheureux, au coup de sifflet final, regagna le vestiaire sous un jet de pierres et d'insultes.
Je ne me rends plus, malgré les sollicitations de mes amis, aux rencontres dominicales de mon dernier club. Explication. J'y étais un jour de rencontre importante contre l'équipe du chef-lieu. Le malheureux Noir qui jouait dans l'équipe d'en face a eu droit à toutes les insultes racistes de la planète.
Je traîne aussi les pieds pour, invité par des amis, supporter ce club professionnel intéressant à divers titres, du Morbihan. Dans un froid glacial, un animateur (on appelle ça un chauffeur de salle ou de stade), jugea bon un soir, hurlant au micro son message, d'inciter les spectateurs à supporter l'équipe locale sans défaillir. Il y allait, en quelque sorte, du résultat du match. Étonnant, non ?
Dernier exemple de débordement inadmissible et incompréhensible (voire !) à l'échelon local. Cette rencontre de Coupe de Bretagne entre notre équipe et celle de la ville voisine (on appelle cela un derby) était particulièrement rude, son résultat incertain. Soudain une décision de l'arbitre mécontenta fortement le député-maire de notre commune. Il bondit sur l'arbitre et nous assistâmes alors à un surprenant combat de boxe qu'il fallut interrompre… avec l'aide de nos adversaires et dont ni l'élu, ni l'arbitre ne sortirent vainqueurs mais couverts de bleus.
Un peu moins de passion, de violence et de chauvinisme sur et dans les stades, dans les bureaux rédactionnels aussi, est-ce trop demander ?
D'autant que c'est possible. En déplacement à Cardiff il n'y a pas très longtemps avec des amis pour un France-Pays de Galles de rugby, nous avons assisté à un spectacle étonnant.
Tout au long de la rencontre, nos voisins gallois de la tribune ont salué les beaux mouvements de l'équipe tricolore. Et… son succès final.
Une soirée de rêve, comme celle qui vit dans la capitale, Guingamp battre Rennes en finale de coupe de France. Dans une ambiance conviviale assez exceptionnelle que les médias ne jugèrent pas trop nécessaire de souligner.
Allez savoir pourquoi.