Le PS qui avait conquis de nombreuses villes en plusieurs vagues depuis 1995 a du en céder une partie, mais, il résiste dans un certain nombre d'entre elles, dont les trois plus grandes et il est reconduit à Lorient, Saint-Nazaire, Fougères, Lamballe, Lannion et Guingamp, ainsi que dans les couronnes des grandes villes.
Plusieurs défaites lui font très mal : Quimper, Cesson-Sévigné, Pontivy, Plabennec, Pont-l'Abbé, Ploërmel, Ploemeur, Quéven, Bruz, Sainte-Luce-sur-Loire, Rosporden, Scaër, Pontivy, Lannilis, Mordelles, Moëlan-sur-Mer, Saint-Quay-Portrieux.
Cependant, il ne s'agit pas d'une vague d'opposition emportant tout, car cela n'a tenu, parfois, qu'à une pincée de voix et quelques rares petites villes sont conquises, à contre-courant : Pontchâteau, Quimperlé, Lesneven, Préfailles, Plomelin, Plobannalec-Lesconil. Des climats locaux inspirés par des projets controversés ou des élus trop rigides peuvent être la cause des chutes les plus graves, mais, le pessismisme engendré par la crise est l'explication de ce reflux, qui est constaté pour tous les partis au pouvoir lors des élections dites "intermédiaires", car, entre deux présidentielles. Cela entraînera une perte pour les présidences de communautés de communes et des défaites aux élections sénatoriales de cet automne.
Les seuls alliés fidèles qu'ait pu avoir le PS ont été le Mouvement radical de gauche, l'Union démocratique bretonne et le Mouvement républicain citoyen. Les autres, écologistes (EELV), Front de Gauche ou NPA ont souvent fait bande à part au premier tour et n'ont pas toujours fusionné au second tour, quand ils ne sont pas maintenus, car beaucoup ont franchi le seuil des 10%. Dans quelques cas, ils ont devancé le PS (Morlaix, Douarnenez) et celui-ci s'est maintenu ou a refusé la fusion qui lui était proposée.
La perte de mairies, d'intercommunalités et, pire encore, de régions est une catastrophe à venir pour les PS et pour les milliers d'emplois qu'il procure à ses futurs élus.
Le socialisme municipal est fondé sur les contrats dans les cabinets ou dans les collectivités publiques offerts aux meilleurs de ses militants, qui se présenteront dans les scrutins locaux ou non. L'échec du PS est aussi à relier au manque de capacité de ces « cadres» , élevés en cocon, à parler aux couches populaires.
En gardant les trois plus grandes villes de Bretagne, le PS a sauvé le plus gros, mais la perte éventuelle des Régions Bretagne et Pays-de-la-Loire l'engagerait sur la voie d'un effacement, sans qu'on en distingue encore les conséquences : nouvelles offres ou renforcement des offres de gauches alternatives?
L'opposition parlementaire espérait une vague bleue, mais, si elle bien eu lieu, elle est montée un peu moins haut en Bretagne. La conquête de Quimper, qui polarise l'attention, est due, non seulement à un climat général, mais aussi à des erreurs du PS qui n'a pas su renouveler son candidat (la section locale l'a désigné à 70% !) et au plan Transports qui, perçu comme anti-voiture et trop écologiste, a été mal reçu, la proximité de Bernard Poignant avec François Hollande n'étant qu'un des facteur négatifs.
L'abstention semble avoir beaucoup concerné les électeurs de gauche, ce qui a rehaussé l'offre de la droite parlementaire et on remarque que l'opposition n'a pris qu'une poignée de communes de plus de 15 000 habitants. Celles qui ont été conquises dans la banlieue de Rennes (Bruz, Cesson-Sévigné, Pacé) et de Nantes (Thouaré, Le Pellerin, vont peser sur le leadership socialiste des agglomérations correspondantes, offrant ainsi des tribunes aux opposants.
Un maintien du centrisme est à noter, car, l'UDI garde ses villes (par ex. : Ancenis, Dinan, Orvault, Vitré et Saint-Brieuc) et la réélection d'un Pierre Méhaignerie à un score presque soviétique est emblématique. Le Modem l'emporte à Pontivy et Bruno Chavanat, UDI, a brillamment challengé Nathalie Appéré, dont la jeunesse (39 ans) n'exclut pas un grand conformisme dans les attitudes politiques.
La Bretagne étant pour lui une zone où il n'a pas d'implantation sérieuse et encore moins de cadres informés des dossiers locaux, le Front national y a fait une campagne qui ne prenait pas en compte la réalité locale.
Surfant sur les thèmes généraux, il n'a pu présenter que 15 listes dans toute la Bretagne et n'a obtenu qu'un nombre limité de sièges dans 5 communes, après avoir enregistré des scores élevés qui lui ont permis de concourir au second tour à Fougères (16,94%), à Lorient (14,78%) et à Saint-Nazaire (13,53%).
Certains analystes mettent en relation le vote FN avec les perdants de la mondialisation, mais, si les villes bretonnes de traditions ouvrière lui ont donné plus de voix, ce n'est pas avec cette clé que l'on peut analyser le vote FN en Bretagne.
Les municipales n'ont jamais permis aux formations politiques purement bretonnes de briller et aucune n'a jamais remporté une élection, même si on se souvient de maires, souvent centristes, affichant leur esprit breton (ex. : Édouard Ollivro, à, Guingamp). Naig Le Gars, pourtant conseillère régionale de l'UDB, a fait liste à part du PS, à Quimper, avec une étiquette Gauche bretonne, avec 6,06% , elle obtient l'un des meilleurs résultats, tandis que Gwened 2014, à Vannes, ne reste qu'à 2%.
Or l'UDB a une politique constante d'union de la gauche, mais, le discours républicain beaucoup trop rhétorique de Bernard Poignant l'empêchait de faire alliance avec une gauche trop bretonne. Il n'a pas retenu la leçon de son échec de 2001, car, sur ordre de Solférino, relayé par le premier fédéral, Jean-Jacques Urvoas, il n'avait pas voulu, déjà, s'allier avec une gauche jugée trop peu orthodoxe. Rien d'étonnant au fait que la Gauche bretonne, qui a de la mémoire, ait refusé d'appeler à voter pour lui.
Breizh Europa, nouveau venu sur la scène politique bretonne n'obtient que 3,82% à Rennes, avec Caroline Ollivro comme chef de file.
Il est donc temps d'avouer un secret bien gardé : dans nombre d'élections en Bretagne, la mouvance bretonne est un passager clandestin, une sorte de main invisible qui peut influencer le résultat. Voilà qui permet de comprendre qu'un David Robo, maire de Vannes puisse tenir à distance une liste suscitée par le Parti Breton, car, il ne cesse de donner des gages de bretonnité.
Beaucoup de listes d'Union de la Gauche ont embarqué des membres de l'UDB et ceux-ci ont été élus et réélus, tandis que le Parti Breton place son président, Yves Pelle, comme conseiller municipal d'opposition à Rennes. Breizhistance (socialisme indépendantiste et révolutionnaire) a placé un candidat (non élu) sur la liste alternative de Saint-Herblain.
Un des événements le plus importants a été la chute relative d'Europe Écologie-Les Verts (EELV) en Bretagne-Ouest (seulement 7,5% à Quimper), alors qu'ils gardent des niveaux raisonnables (10-15%) dans le grandes villes de l'Est, sachant qu'ils ont présenté peu de listes indépendantes. C'est, peut-être, un "effet Bonnets rouges" qui sont plus actifs en Bretagne-Ouest et dans les petites villes. Ils se sont parfois alliés avec le Front de Gauche et ont obtenu des scores partagés élevés à Rennes, Morlaix et à Douarnenez.
Pascal Chiron (EELV) obtient 14,54% et 1 siège de plus, mais, contrairement à ce qui est dit, l'effet sur le dossier de l'aéroport sera nul, car, on voit pas comment les écologistes pourraient en faire plus dans la contestation. Le maire de Nort-sur-Erdre, commune la plus importante de la Communauté de communes dans laquelle est située Notre-Dame-des-Landes est le successeur désigné d'un socialiste, qui a appelé à l'évacuation manu militari de la ZAD.
Autre phénomène remarquable, l'apparition de listes alternatives de gauche qui obtiennent des scores plus élevés que d'habitude et qui sont même passés devant les liste PS et alliés à Douarnenez (23,44%) et à Morlaix. dans les deux cas, les socialistes se sont retirés sans les soutenir, ce qui a eu pour effet de consolider les maires UMP sortants (Agnès Lebrun, ne gagne à Morlaix que de 241 voix). A Plouguerneau, une liste "Plouguerneau, Ensemble et solidaire" prend la mairie à la droite dans une triangulaire. A Lanester, le Front de Gauche conserve 17,63% au second tour et à Saint-Jacques-de-la-Lande, Lutte ouvrière passe les 10% et a pu être présente au second tour.