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«Egalité & Réconciliation» vs «anti-fascistes». Que s'est-il réellement passé samedi à Rennes ?
Rennes, Bretagne, le mouvement Parousia lié à l'organisation «Egalité et Réconciliation» fondée et présidée par Alain Soral tenait conférence samedi à 15h au Fleurt Café, 47 rue Guéhenno, à deux
F. Lécuyer pour ABP le 24/05/11 17:05

Rennes, Bretagne, le mouvement Parousia lié à l'organisation «Egalité et Réconciliation» fondée et présidée par Alain Soral tenait conférence samedi à 15h au Fleurt Café, 47 rue Guéhenno, à deux pas de la fac de Droit. Conférence, le mot est un peu fort, «performance artistique» mêlant lectures d'oeuvres diverses et commentaires méthaphysiques serait plus approprié au regard du profil de l'intervenant. L'évènement annoncé notamment par la pose de 250 autocollants en centre-ville de Rennes était organisé par Parousia mais des membres d'Egalité et Réconciliation étaient présents dans la salle dont Guytan Casteits, son responsable pour la Bretagne (4 départements sic!). Cette organisation, classée par les anti-fascistes à l'extrême-droite se réclame pêle-mêle des idées «du président iranien Mahmoud Ahmadinejad à Che Guevara en passant pas le dirigeant du Hezbollah Hassan Nasrallah» (voir paragraphe de présentation de E&R plus bas).

En face, une cinquantaine de personnes à l'appel du collectif anti-fasciste rennais protestait contre la venue de Laurent James. Soutien d'Alain Soral, militant proche du parti anti-sioniste de Dieudonné, chrétien orthodoxe, admirateur de l'islam notamment chiite censée être non moins que « la force religieuse qui émergea en fin du premier cycle de l'ère des Poissons pour contrebalancer la Bête qui surgit du second cycle » Laurent James est animé d'une pensée pour le moins tortueuse. A l'image du thème de la conférence de Rennes, «l'ésotérisme révolutionnaire», les écrits du fondateur de Parousia embrassent la géo-politique, la théologie, l'astrologie, l'Histoire, l'ésotérisme et surtout une grosse part de science-fiction.

Bataille rangée

Au regard des thèmes abordés par Laurent James, la conférence ne devait pas s'adresser qu'à un public très averti or c'est un cortège d'anti-fascistes que les organisateurs ont vu s'inviter au débat. Que s'est-il réellement passé ensuite, les avis divergent. «une cinquantaine "d'antifascistes" s'est massée devant le bar. Certains étaient masqués, d'autres équipés de matraques télescopiques et de bombes lacrymogènes. Tout en barrant l'accès à l'établissement, ils entendaient, en distribuant des tracts, "dénoncer la venue de l'ancien dirigeant du FN Alain Soral" et "du groupuscule d'extrême-droite Egalité & Réconciliation"» selon le communiqué d'Egalité et Réconciliation publié lundi 23 mai en fin d'après-midi sur leur site internet. Contacté par nos soins, le porte-parole d'E&R Julien Mimault, confirma en ces termes «apparemment c'était du grand n'importe quoi, les mecs ont voulu se la jouer et les gens du bar ont été agressés». Une version totalement contredite par Pierre un des manifestants, membre de Breizhistance, du SLB et de 44BZH. «On avait prévenu le patron sur le pédigré des gens qu'il accueillait mais il n'en a pas tenu compte. Sitôt notre arrivée, le patron a commencé à s'énerver. Pendant ce temps-là les gens qui voulaient assister à la conférence passaient par derrière. L'un d'eux est sorti et à crié «maintenant vous vous cassez !» et ils ont sorti les flash-balls et les gazeuses. Ils ont tiré dans le tas, des malades ! On s'est barré en courant et des types sont montés sur des quads. En tout, ils devaient être une dizaine». Interrogé, le patron de l'établissement soutien une toute autre version. Surprise ! Celui-ci est bien éloigné des canons de l'extrême-droite classique. Suthan Yogasudram est en effet d'origine sri-lankaise et a repris ce bar en 2009. Une partie de l'établissement est dévolue à l'organisation de réunions ou des séminaires. «Les organisateurs m'ont payé, je n'avais pas à leur refuser le droit à se réunir malgré les pressions. Si l'extrême-gauche veut tenir une réunion publique dans mon bar aucun problème, je n'ai pas de couleur politique». Concernant les quads, pour lui c'est «une invention pure et simple, pareil pour les flash-balls, il n'y en a jamais eu !» le propos est cependant nuancé par Guytan Casteits d'Egalité et Réconciliation qui, pour sa part, a bien vu des quads mais «ceux-ci sont partis un quart d'heure avant que ça dégénère et ils appartenaient à des habitués du bar que les manifestants ont voulu empêcher de rentrer, c'était des gars de Maurepas mais absolument pas des gens de chez nous. Ils ont dû parlementer 10 bonnes minutes avec les anti-fas pour avoir le droit de rentrer boire leurs bières et sont partis à cause du bruit et de l'ambiance, mais ils ne sont absolument pas revenus pour casser du manifestant, ça c'est du délire !». Paul, un manifestant n'est pas de cet avis: «j'ai vu le gazage et les tirs de flashball. Etant parti avec un petit groupe dans l'autre sens je n'ai pas pu voir la course poursuite des quads et de la voiture» car après les quads, c'est une voiture qui est entré dans l'action. «Une twingo de couleur foncée m'a foncé dessus» affirme Pierre «j'étais de l'autre côté de la route et le mec voulait clairement «s'en faire un» ! Il a foncé dans le groupe. C'est volontaire, il a bien vu qu'il avait blessé quelqu'un et il s'est barré.» Le comité anti-fasciste rennais, à l'initiative du rassemblement, parle dans un communiqué de «tentative d'assassinat». Propos légèrement nuancé par l'assassiné en question qui affirme que «je ne sais pas s'il y a eu volonté délibérée de sa part de me buter mais il aurait pu le faire». Quand à l'identité du chauffard, les avis divergent le comité anti-fasciste accuse le patron d'être au volant alors que Pierre penche plutôt pour «le frère du patron». Version démentie catégoriquement par l'intéressé qui affirme être resté lui et son frère dans son bar tout au long de l'altercation. «De plus je n'ai pas de Twingo et mon frère non plus !» Version qui sera aisé aux policiers de vérifier ou d'infirmer le cas échéant.

Je t'accuse moi non plus

L'identité des protagonistes et la question de l'armement sont également des sujets de controverse. En effet le patron du Fleurt café parle d'une «cinquantaine de jeunes blancs cagoulés et armés ayant amenés tous les punks à chiens et cas sociaux de la place Sainte-Anne» faisant face aux habitués de son bistrot au profil plutôt différent : «des sri-lankais, des gitans, des rebeus et des jeunes du quartier» selon un des protagonistes. Version confirmée par Jacques, un des anti-fascistes présents que la question des armes fait, par contre, bondir, «on est venu quasiment les mains dans les poches, pas d'armes, ni de lacrymos, rien que des bouteilles d'eau parce qu'il faisait chaud. On distribuait des tracts sans agressivité. Eux, par contre, ont rapidement dégainé et ils n'ont pas fait dans la dentelle».

On l'a compris on n'est pas ici dans le face à face classique entre militants anti-fas et crânes rasés. Mais comment des anti-fascistes dénoncant l'extrême-droite on pu se retrouver en face de personnes n'ayant, à priori, peu de chose à voir avec leurs adversaires habituels ? «c'était des clients, des voisins, des habitués et l'un d'entre eux a été blessé» affirme le patron du bar, version corroborée par Guytan Casteits qui parle «de gens de Maurepas excédés par les anti-fascistes qui les empêchaient de venir fréquenter leur bar favori, les mecs étaient collés à la vitrine et les insultaient». De l'autre côté de la vitrine, l'analyse est différente «Les pseudos clients du bar sont certainement des sympathisants d'E&R» selon Paul « D'après ce que l'on a pu entendre de leur discours je dirais que c'est l'antisémitisme qui les lie avant tout». Un des manifestants précise qu'«il y avait chez eux une part de motivation idéologique mais aussi, c'est vrai, une part de «je défends mes potes»». Jacques enfonce le clou en parlant «d'insultes antisémites et homophobes, on s'est fait traiter de sales youps, de gros pédés, etc...». Guytan Casteits d'E&R se défend, pour sa part, de toute collusion avec les cogneurs «nous étions 8 en tout et nous sommes restés dans le bar, ce sont les clients qui se sont défendus et ils n'ont aucun rapport avec nous.»

Discrétion policière

Le rôle de la police pose aussi question. Alors que du côté manifestants on les accuse de magnanimité, voir de collusion avec les quadistes et maniaques de la bombe lacrymogène, «les mecs ont même eu le temps de ramasser les balles des flash-balls» selon un manifestant, les organisateurs parlent, quant à eux, de multiples coups de téléphone passés avant de voir arriver le moindre fonctionnaire «on a appelé, au bas mot, 10 fois les flics pour qu'ils se déplace, et ce pendant 1h30 et ils ont fini par arriver à deux camions remplis de policiers casqués».

Un manifestant n'a pas vu tout à fait la même chose «Les flics ont surtout refusé de prendre les plaintes alors qu'ils ont dû assister à tout, il y avait deux camions de CRS garés pas loin».

Plaintes à gogo

Chaque partie assure avoir été agressé et annonce chacune de son côté le dépôt d'une volée de plaintes pour des prétextes parfois curieux «Egalité & Réconciliation n'était pas organisateur de la conférence et les manifestants soutenaient le contraire, nos avocats étudient la possibilité de porter plainte pour ça notamment» pas sûr qu'en droit français cela constitue un mobile valable cependant.

Du côté des manifestants on parle de photos montrant les exactions, photos qui à ce jour n'ont pas été diffusée. Quoiqu'il en soit, la confrontation ne risque pas de se renouveler car le dirigeant d'Egalité et Réconciliation en Bretagne (4 départements) assure que les prochaines activités de la trentaine de militants essentiellement rennais seront axés sur le «développement personnel, la marche à pied, le sport, la culture et ce à destination exclusive du groupe».

La marche et le «développement personnel» quoi de mieux pour calmer les esprits ?

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Qui est Egalité & Réconciliation ?

Mouvement fondé par Alain Soral, ancien cadre FN, ancien membre du parti Communiste Français et frère de l'actrice Agnès Soral. Ecrivain, instructeur de boxe, Alain Soral défend des thèses prônant l'alliance des «français de souche» et des peuples du Tiers-monde contre «l'Empire américano-sioniste» et pour un nouveau nationalisme français. «Gauche du travail et droite des valeurs», le mouvement Egalité et Réconciliation s'efforce de trouver une sorte de «troisième voie» (rien à voir avec le mouvement du même nom) sur les bases du «Solidarisme», une des branches de l'extrème-droite issue des années 70.

L'organisation se réclame du combat mené par Mahmoud Ahmadinejad («le président iranien est un président courageux» selon Guytan Casteits), par les dirigeants syriens, le Hezbollah, le président vénézuelien Chavez, le russe Vladimir Poutine et tout un florilège d'autres personnages généralement réprouvés mais parés pour Egalité et Réconciliation de l'auréole de «forces de résistance à l'Empire».

E&R, qui entretient une certaine fascination pour l'Islam surtout s'il est radical, est souvent décrit comme une organisation proche des thèses antisémites, qualificatif dénoncé par l'organisation. Concernant la Bretagne, Guytan Casteits qui se décrit lui-même comme «gascon», avoue se moquer totalement des revendications bretonnes, «la Loire-Atlantique en Bretagne ou pas, la langue, le régionalisme tout ça, c'est pas ma tasse de thé». Propos qui ne manqueront pas de laisser les bretons dubitatifs.

Prénoms changés par nos soins à la demande des personnes interrogées

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Fabien Lécuyer est spécialisé dans l'enquête journalistique, les mouvements "en marge" du bipartisme et les mouvements indépendantistes .
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Vos 7 commentaires :
Georges Brush Le Mercredi 25 mai 2011 07:58
A se demander qui sont les réels fascistes au fond...
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S. Bouzid Le Mercredi 25 mai 2011 13:20
Georges retourne manger ton Bretzel, on sait que le fascisme n'est pas l'apanage des blancs. Le fascisme et le racisme sont deux choses différentes bien que souvent liées. E&R est une organisation fasciste au sens propre du terme, "rouge brune", elle revendique ses proximités avec les pires régimes que l'on puisse trouver et s'entoure d'argumentaires prédigérés que seuls les neuneus absorbent à grandes bouchées. Un exemple: se revendiquer de Poutine et soutenir les musulmans... le grand écart est hallucinant, il suffit pour s'en rendre compte de regarder le sort réservé aux Tchétchènes par le gouvernement russe et la place laissée aux musulmans dans la grande Russie blanche de ce cher Vladimir. E&R est à l'engagement politique, ce que la margarine est à la cuisine bretonne !
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Pierre BZH Le Mercredi 25 mai 2011 15:30
E&R est un mouvement qui part dans tous les sens, c'est assez risible au final !
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Bruno Le Mercredi 25 mai 2011 21:03
Ces raccourcis sont insupportables, E&R n'est pas antisémite mais antisioniste (l'exact opposé pour qui fait un mimimum de politique sérieuse).
Il ne s'agit en aucun cas de "neuneus", l'adhésion à E&R étant par définition anti-conformiste et diabolisatrice donc nécessitant de franches convictions.
Par ailleurs E&R ne soutient pas unilatéralement Poutine ou Chavez, sa logique est davantage de montrer du doigt des contre-pouvoirs réels dans un monde unipolaire, encore faut-il avoir conscience des réels rapports de force qui agitent le monde d'aujourd'hui.
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S. Bouzid Le Jeudi 26 mai 2011 11:29
Ah tiens c'est surprenant, pourquoi Soral a t'il entamé des négociations (avortées par les Russes devant le sérieux de la structure) pour se faire financer par Poutine?
Concernant votre définition à l'emporte pièce de l'antiosionisme, il suffit de lire vos déclarations pour vous comprendre antisémites. Vos propos sont ambigües contrairement à la ceux tenus par la grande majorité du mouvement pro palestinien français. La plate forme nationale pour la Palestine on ne peut plus clair sur cette question, plateforme avec lequel vous ne travaillez pas, ce n'est pas le fait du hasard... Du reste à part brasser du vent vous ne faites pas grand chose.
"Anticonformiste et diabolisatrice"? c'est intéressant de voir comment vous reprenez la dialectique du Front National, chassez le naturel, il revient au galop !
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marc patay Le Vendredi 27 mai 2011 08:10
Je ne vois pas l'interêt de passer autant de temps à décrypter un mouvement aussi nul que celui de ce Soral qui ne mérite pas de pub, d'autant que Rennes est une bien belle ville, patrie des Lanjuinais, Le Chapelier, Toullier et du célèbre Club Breton initiateur de la nuit du 4 août, devenu ensuite ce funeste club Jacobin ou oeuvra ce vilain complexé de Robespierre. Marc Patay
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Yann ar stourmer Le Dimanche 29 mai 2011 20:03
Brittophone et militant de la cause bretonne, il me serait difficile d'être en accord avec E&R qui garantirait une mort certaine à mon peuple s'il devait avoir les rênes du pouvoir mais pourtant : j'en ai vraiment plein le cul de ces pseudo-anti-fascistes ! Leurs méthodes sont tous sauf démocratiques, leurs capacités de réflexions s'arrêtent aux quelques slogans appris faisant appels à la plus stupides des biens-pensances. L'anti-fascisme sans fasciste est une escroquerie qui ne convainc que les sots.
"Dialectique frontiste" me répondra Bouzid : peut-être, mais les mots n'appartiennent à personne et la réflexion (constructive) s'interdit toute censure dans sa mise en place.
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