Dol-de-Bretagne, le 6 juin 2025 — À l’approche de l’inauguration de la nouvelle place de la cathédrale, prévue le 5 juillet prochain, l’association Koun Breizh tire la sonnette d’alarme : la statue de Nominoë, premier souverain d’une Bretagne unifiée et indépendante, n’y figure plus.
Dans une lettre ouverte adressée au maire de Dol-de-Bretagne, l’association de défense du patrimoine breton déplore la disparition de la statue de celui qu’on surnomme Tad ar Vro ( « le père de la patrie » ). Pour Koun Breizh, il est inconcevable que la ville de Dol, profondément marquée par l’héritage de Nominoë, puisse inaugurer un espace public aussi symbolique sans rendre hommage à cette figure fondatrice de l’histoire bretonne.
« Les Bretons ne veulent pas croire qu’une cité aussi étroitement liée à l’histoire de leur pays [...] perde tout lien avec son passé » , écrit Yvon Ollivier, président de l’association.
Il dénonce également un phénomène plus large de « débretonnisation » observé dans plusieurs communes, où l’on assiste à un effacement progressif de la toponymie bretonne ou de symboles historiques. Il cite notamment les cas de Plouezoc’h et de Bouvron, où des noms liés à l’histoire locale sont remis en question ou supprimés.
Pour Koun Breizh, cette tendance est préoccupante. « Un peuple qui perd ses racines n’a aucun avenir. Il devient le jouet de la volonté des autres » , affirme encore Yvon Ollivier.
L’association appelle donc le maire de Dol-de-Bretagne à clarifier ses intentions et à faire réinstaller la statue de Nominoë avant l’inauguration. Car selon elle, sans cette figure emblématique, la ville renierait une part essentielle de son identité.
Nominoë (v. 800 – 851) est l’une des grandes figures de l’histoire bretonne. Représentant de l’empereur carolingien Louis le Pieux, il devient, après la mort de ce dernier, le véritable souverain d’un territoire breton en voie d’unification.
En 845, sa victoire contre les Francs à la bataille de Ballon marque une rupture politique décisive avec l’Empire. Nominoë pose les bases d’un pouvoir souverain breton, étend son autorité à plusieurs évêchés et mène une réforme religieuse ambitieuse.
Il choisit Dol comme centre spirituel de son pouvoir et y installe un archevêché indépendant, défiant ainsi l’autorité de l’archevêque de Tours. Ce geste affirme la singularité religieuse et politique de la Bretagne.
L’existence de l’évêché de Dol est attestée dès le VIe siècle, la tradition attribuant sa fondation à saint Samson. Mais c’est en 848 que Nominoë élève Dol au rang d’archevêché, avec le titre de primat de Bretagne. Il y rassemble sous son autorité les évêchés de Saint-Pol-de-Léon, Saint-Malo, Saint-Brieuc et Tréguier.
Ce nouvel ordre ecclésiastique n’est jamais pleinement reconnu par l’archevêché de Tours, ni durablement par Rome. En 1209, le pape Innocent III supprime le statut métropolitain de Dol, qui redevient un simple évêché.
L’évêché subsiste jusqu’au Concordat de 1801, date à laquelle il est définitivement supprimé. Son territoire est alors rattaché aux diocèses de Saint-Brieuc et de Rennes.