On savait déjà que les services de renseignements français et turcs avaient de bonnes relations et s'échangeaient quelques "tuyaux" et on savait aussi que la justice turque sollicitait le ministère des Affaires Étrangères, jusqu'à lors sans succès, pour venir enquêter sur le sol français, mais qu'une délégation turque composée de 8 membres du parquet, de la police et des services de renseignements (M.I.T.) soit venue à Paris, le 15 septembre 2007 interroger des membres présumés du PKK, "c'est une première", comme dit le journal Sabah, ("le matin", quotidien populaire pro-gouvernemental tirant à 600 000 ex.) dans son édition du 17 septembre 2007.
Un des membres de la délégation turque, qui a refusé de divulguer son identité, précise Sabah, a même confirmé que "pour obtenir de meilleurs résultats" ils liaient maintenant "des contacts directs". L'autorisation, venue de Rachida Dati, ministre de la Justice, l'une des proches du président de la République, a surpris les défenseurs des Kurdes : "C'est l'application de la convention européenne d'entraide judiciaire signée par la Turquie, admet Me Malterre, mais c'était, jusqu'à lors du jamais vu ; c'est, en fait, la suite logique d'une commission rogatoire du juge français qui s'était lui-même rendu en Turquie au printemps pour "étoffer" son dossier et qui a manifestement transmis aux Turcs des informations leur permettant de diligenter, à leur tour, leur propre commission rogatoire".
Sabah révèle encore que la délégation turque a interrogé Canan Kurtyilmaz, "la nouvelle responsable européenne du PKK", Haci Karakoyun, " financeur", Cemal Aslan, "le courrier", Kazim Ergun, "un des cadres de montagne", et Nihat Aslan, "un parent de Cemal Aslan", tous présentés comme des "affreux, sales, et méchants" et "a remis en main propre tous les documents et informations nécessaires aux autorités françaises", "obtenus lors des aveux des terroristes attrapés ", sauf que les avocats nient en avoir eu connaissance.
Par contre, Sabah omet de rapporter que Kazim Ergun a déclaré, au grand dam des juges français, reconnaître, parmi ses "interrogateurs" l'un de ses tortionnaires, en la personne du directeur de la Sûreté d'Istanbul. "La délégation turque a demandé aux autorités judiciaires françaises la copie des 100 mille pages de documents ainsi que celle des disques durs des ordinateurs saisis " insiste Sabah et les avocats ont toutes raisons de craindre que la chancellerie s'apprête à s'exécuter. C'est pourquoi ils ont saisi la Chambre de l'Instruction d'une requête en nullité et demandé au Garde des Sceaux de bloquer la procédure dans l'attente du résultat de la requête.
Cette affaire est évidemment d'une extrême gravité tant du point de vue du droit que de la morale, et heurte profondément les consciences.