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ArMen n° 161 : L' Identité bretonne dans la résistance
Oublier, se souvenir : c'est par cette recommandation que Mona Ozouf aborde sa préface à l'ouvrage de l'historien Jean-Jacques Monnier sur la conscience bretonne dans la Résistance, dont il développe, dans ce n° d'ArMen un aspect particulier, à savoir les marques d'une présence significative de l'identité bretonne parmi les Résistants.
Par Yann Rivallain pour ARMEN le 16/11/07 23:30

Oublier, se souvenir... et avancer

Oublier, se souvenir : c'est par cette recommandation que Mona Ozouf aborde sa préface à l'ouvrage de l'historien Jean-Jacques Monnier sur la conscience bretonne dans la Résistance, dont il développe, dans ce n° d'ArMen un aspect particulier, à savoir les marques d'une présence significative de l'identité bretonne parmi les Résistants.

"Oublier", ou encore accepter de remettre en question l'anathème né de l'équation "militant breton = collaborateur" , forgée à l'époque de l'Occupation et qu'aucune recherche sérieuse n'avait encore remise en question, jusqu'à ce que Jean-Jacques Monnier mène ce travail.

"Se souvenir" en effet d'une époque où les idéaux et les idées les plus extrêmes circulaient comme lave en fusion dans une Europe déchirée, mais aussi du "piège tendu par l'occupant aux militants culturels bretons", comme le rappelle Mona Ozouf, piège dans lequel certains devaient consciemment s'empêtrer, condamnant à l'opprobre au moins deux générations de militants culturels et politiques.

On ne compte plus les ouvrages consacrés à l'étude des militants bretons compromis dans la collaboration. On comprend aisément pourquoi. Combien de Bretons ont lu ces ouvrages, non pour condamner, non pour juger, mais pour chercher à comprendre pourquoi on les assimilait à ces hommes. Ce qu'on disait d'eux, des actes qu'on leur prêtait, d'être passionnés par le destin politique de son pays, par le combat pour sa langue et sa culture, signifiait-il réellement, comme beaucoup le prétendaient, qu'on ressemblait à ces jusqu'au-boutistes, que l'on partageait forcément leurs idéaux ?

" Non ! ", ont répondu la plupart des militants des générations suivantes, en fondant notamment des mouvements comme l'Union démocratique bretonne, affirmant clairement sa rupture idéologique avec les mouvements des années 1940.

" Oui ! ", répondaient et répondent encore celles et ceux qui continuent à souffler sur les braises pour qu'elles prennent et découragent ceux qui, le temps aidant, retrouvent courage et renouent avec des engagements culturels et politiques démocratiques que de plus en plus d'Européens approuvent, tant ils contribuent à conserver une diversité menacée.

Un regard renouvelé

Pour en finir avec les sentences catégoriques très XXe siècle et dépasser d'épuisants conflits, hier nécessaires, mais devenus stériles, il fallait ouvrir une autre voie.

Remercions Jean-Jacques Monnier d'avoir fait ce premier pas en s'intéressant aux militants bretons qui se sont opposés au fascisme dès les années 1930, puis ont rejoint la France libre, gonflant les rangs de la Résistance.

En montrant aussi que certains grands résistants ont par la suite et au nom des mêmes idéaux, soutenu les militants bretons, à l'instar du général de Bollardière.

Ce livre est d'une importance capitale car il permettra à bien des Bretons de se réconcilier avec une partie de leurs convictions profondes. Important aussi car il sera certainement contesté et contribuera à renouveler les débats sur ces questions en leur donnant un caractère nouveau.

II était presque trop tard pour donner la parole à celles et ceux que la tragédie de la collaboration avait relégués au second plan, et qui furent eux aussi des oubliés de 39-45.

Il est encore temps de questionner, de réviser ses jugements - sans pour autant tomber dans l'excès inverse - et de découvrir le destin de ces militants bretons qui n'ont cessé d'être guidés par un idéal de liberté, dont la Bretagne n'était pas dissociable.

Yann Rivallain, rédacteur en chef d'ArMen

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