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- Interview -
ABP interviewe Christian Guyonvarc'h
Christian Guyonvarc'h est depuis 2004 vice-président du Conseil régional de Bretagne chargé des affaires européennes et internationales. Il fut conseiller municipal puis adjoint au maire de Lorient de 1995 à 2004. Il est membre depuis 1983 de l'UDB dont il fut le porte-parole de 1994 à 2004. Il est membre fondateur et vice-président de la fédération Régions et Peuples Solidaires.
Par Philippe Argouarch pour ABP le 13/02/09 13:11

Christian Guyonvarc'h est depuis 2004 vice-président du Conseil régional de Bretagne chargé des affaires européennes et internationales. Il fut conseiller municipal puis adjoint au maire de Lorient de 1995 à 2004. Il est membre depuis 1983 de l'Union Démocratique Bretonne (UDB) dont il fut le porte-parole de 1994 à 2004. Il est membre fondateur et vice-président de la fédération Régions et Peuples Solidaires.


ABP : - Quel est le bilan de l'UDB comme composante de la majorité régionale ?

C. Guyonvarc'h : - Il est positif en ce sens que l'UDB considère que l'action conduite par la nouvelle majorité élue en 2004 a permis des progrès dans tous les domaines. Aucun de nos interlocuteurs économiques, syndicaux ou associatifs ne nous dit le contraire. Les reproches (et ce débat existe aussi au sein même de la majorité) portent parfois sur l'insuffisance ou le rythme trop lent du changement, pas sur l'effectivité du changement. En ce sens l'UDB ne regrette en rien le choix qu'elle a fait en 2004, en alliance avec les Verts et certaines composantes de la gauche alternative, de contribuer à la victoire de la gauche contre l'équipe sortante de Josselin de Rohan.


ABP : - La coopération avec le PS et les Verts est-elle une réussite ?

C. G. : - Avec les Verts la proximité d'idées est grande. Les divergences sont rares et, quand elles existent, sur le futur aéroport de Notre-Dame-des-Landes ou sur le projet d'écotaxe du gouvernement, elles ne sont pas d'ordre idéologique mais portent plutôt sur l'appréciation du contexte. Un exemple : les Verts comme l'UDB sont d'accord pour considérer qu'il faut préférer le train à l'avion et organiser l'offre de transports en conséquence. C'est la raison pour laquelle l'UDB a pris une position très nette au Conseil régional de Bretagne, exprimée plusieurs fois en séance publique : nous considérons que la mise en service de Notre-Dame-des-Landes (dont nous espérons qu'il s'appellera l'aéroport Jules Verne), qui doit avoir une vocation internationale en tant qu'alternative à Roissy et Orly pour les populations de la Bretagne mais aussi de l'ouest de la France, et la réalisation de Bretagne Grande Vitesse (Brest et Quimper à 3 heures de Paris et 5 h 30 de Strasbourg) doivent s'accompagner en Bretagne de la fermeture de plusieurs aéroports au trafic commercial. Neuf aéroports, qui desservent principalement Paris, et bientôt un dixième, ce n'est plus possible ! Ce serait une gabegie de tous les maintenir et ce serait néfaste pour la planète. Pour l'UDB, à l'horizon 2015, seul l'aéroport de Brest-Bretagne, pour des raisons évidentes d'aménagement du territoire, restera incontournable : tout le reste doit se discuter sans tabou et dès maintenant. Certains de nos collègues Verts ne sont pas loin de penser la même chose même s'ils l'expriment différemment.

Autre exemple : l'écotaxe. L'UDB pense comme les Verts que le principe est bon. Mais l'UDB considère qu'il n'est pas juste de traiter un territoire périphérique comme un territoire de transit telle que la région parisienne, surtout quand les alternatives à la route (fret ferroviaire ou maritime) n'ont pas été réalisées faute d'une autonomie politique et financière de la Bretagne. Il n'est pas juste qu'un territoire (la Bretagne administrative) qui pèse 5 % de la population française et 4,5 % du PIB finance 12 % de l'écotaxe. Donc oui au principe de l'écotaxe mais à condition qu'elle soit équitablement répartie et que son produit soit intégralement reversé au financement des alternatives maritimes et ferroviaires. Ce point de vue, je l'ai exprimé dès le 12 octobre dernier (le site de l'ABP en témoigne ( voir notre article ) ); j'étais d'ailleurs un des premiers élus à prendre position sur le projet gouvernemental.

Le PS et l'UDB sont deux partis différents, ce n'est pas une découverte. L'UDB est un parti autonomiste, le PS ne l'est pas. Pour autant notre travail côte à côte au Conseil régional a grandement contribué à révéler à tous les élus le gouffre en terme de moyens qui sépare une région française de droit commun comme la Bretagne (qui a même le plus petit budget par habitant de toutes les régions métropolitaines) et des régions à pouvoir législatif comme la Galice ou le Pays de Galles. Jean-Yves Le Drian dénonce d'ailleurs le centralisme jacobin et réclame une évolution du statut de la Bretagne vers celui des régions autonomes d'Europe.

Mais il n'y a pas que les questions institutionnelles. Les conseillers régionaux de l'UDB sont fiers de participer à une majorité qui prend des mesures de justice sociale comme la suppression du caractère payant des formations d'aide-soignant, lesquelles concernent, on le sait bien, des jeunes issus de milieux modestes. Nous n'attendons pas que la Bretagne accède à l'autonomie pour faire avancer les solidarités entre les personnes comme entre les territoires : les aides de la Région aux « pays » ont été portées de 160 à 260 millions d'euros sur six ans et modulées selon la richesse fiscale des populations, au bénéfice de territoires comme le pays de Guingamp ou le centre-ouest Bretagne.


ABP :- Quelles sont les alliances envisagées de l'UDB pour les européennes ?

C. G. : - Depuis 1989 l'UDB a abordé toutes les élections européennes dans le cadre d'une alliance des partis régionalistes, autonomistes ou nationalistes démocratiques, opposés à l'action clandestine dans le contexte français. À ce titre j'ai été amené à travailler aux côtés de Max Simeoni au Parlement européen entre 1989 et 1994, à l'époque dans le cadre d'un partenariat entre l'UPC (devenue PNC) et l'UDB. En 1994 cette alliance a donné naissance à un parti constitué en fédération de partis, Régions et Peuples Solidaires (R&PS), dont le président est Gustave Alirol, président du Parti occitan et maire d'une commune du sud de l'Auvergne, et dont je suis le vice-président. Sa secrétaire générale est une militante de l'UDB, Nicole Logeais, très engagée sur le terrain des droits de l'homme et des solidarités internationales.

Depuis plus de 20 ans cette alliance a conclu des accords électoraux mais aussi plus stratégiques avec les Verts. D'ailleurs cette connivence avec les Verts s'exprime au niveau européen puisque depuis 15 ans les députés européens du Scottish National Party, du Plaid Cymru (Pays de Galles), du PNB basque ou du parti catalan ERC siègent dans le même groupe que les Verts, ce qui traduit une proximité d'idées sur des questions comme l'écologie, l'économie (par une approche territoriale) ou la diversité linguistique et culturelle.

C'est donc assez naturellement que l'UDB et R&PS seront présents le 7 juin 2009 sur les listes Europe Écologie emmenées par Daniel Cohn-Bendit et soutenues par les Verts et des personnalités représentatives de l'altermondialisme comme José Bové, de l'écologie associative comme Yannick Jadot (ancien responsable de Greenpeace) ou de la lutte contre la corruption comme la magistrate franco-norvégienne Eva Joly, bien connue du côté de Groix. La fédération R&PS aura un candidat éligible, choisi par elle, François Alfonsi, maire d'Osani en Corse, qui sera numéro 2 sur la liste de la circonscription sud-est. L'UDB et les autres partis membres de R&PS seront représentés de façon visible sur les listes Europe Écologie, à des places qui seront prochainement définies avec les Verts.


ABP :- Quelles sont les alliances de l'UDB envisagées pour les régionales?

C. G. : L'objectif politique de l'UDB aux prochaines régionales sera de placer au centre du débat électoral la question du renforcement du pouvoir régional par l'accession à un pouvoir normatif et une augmentation substantielle des moyens budgétaires. On ne peut pas se contenter de dire que le statut de la Bretagne, Loire-Atlantique comprise, doit être revu nettement à la hausse, il faut agir en conséquence pour que cela se réalise et pour ce faire il faut que ce soit un thème fort de la prochaine campagne électorale afin que nous obtenions le soutien des Bretons. L'autonomie politique de la Bretagne n'est possible que si les Bretons le veulent et expriment clairement cette volonté au moment de voter. L'UDB souhaite mener ce combat nécessaire avec les Verts et la gauche alternative mais aussi avec l'ensemble de la gauche. Le choix des alliances au premier et au second tour des prochaines régionales sera fonction de la capacité de nos partenaires à tenir ce cap avec nous. Les militants de l'UDB décideront de ces alliances lors d'une convention extraordinaire.


ABP: - Quels sont les sujets où l'UDB est prête a entrer dans un mouvement unitaire avec les autres partis bretons ?

C. G. : - Il y a des questions qui dépassent le clivage droite-gauche parce qu'elles touchent aux fondamentaux de l'identité du peuple breton. Pour la réunification administrative de la Bretagne ou l'obtention d'un statut officiel pour nos langues spécifiques (breton et gallo), l'union doit être la plus large possible, à l'exception des partis ou groupements prônant la violence ou la xénophobie... mais de toute façon chacun connaît l'hostilité du Front national à la reconnaissance officielle du breton.

Donc, sur des questions comme celles-là il n'y a aucune difficulté à ce que l'UDB participe à des actions dont Emgann ou le Parti breton seraient aussi partie prenante. Chacun sait que l'ancien porte-parole de l'UDB que j'étais se retrouvait sans problème aux côtés de Jean-Yves Cozan dans ces combats-là, en dépit de nos divergences parfois fortes sur d'autre sujets comme le nucléaire ou les luttes sociales. Il faut savoir faire la part des choses. C'est également ce qu'a fait notre porte-parole Mona Bras en participant au « petit-déjeuner  pour la réunification » du 10 février chez le grand chef Le Divellec à Paris, avec Jean-Yves Le Drian et le député vert François de Rugy et aux côtés des députés UMP Marc Le Fur et Jacques Le Guen et du conseiller régional Modem Fabrice Loher. Certains sujets permettent et requièrent des alliances de circonstance car c'est une condition nécessaire pour gagner.


ABP : - Que pouvez-vous nous dire de la rencontre de Le Drian avec M. Balladur et le Président, qui a eu lieu récemment et où la réunification aurait été abordée. Les choses avancent ou c'est toujours coincé ?

C. G. : - Lors de ces deux rencontres Jean-Yves Le Drian a plaidé pour la réunification administrative de la Bretagne (il leur a remis les motions adoptées par le Conseil régional de Bretagne depuis 2004). Il a marqué son opposition à l'hypothèse d'un « grand ouest mou » et s'est dit prêt à favoriser l'organisation d'une consultation populaire en Bretagne si le législateur (gouvernement ou Parlement) la jugeait nécessaire. Il leur a également remis le dossier qui plaide pour une réorganisation de l'ouest de la France en quatre régions fortes, équilibrées démographiquement et économiquement : Bretagne réunifiée, Normandie réunifiée, Vendée-Poitou-Charentes et Val de Loire.

Auprès d'Édouard Balladur il a ressenti une écoute attentive. Ce dernier n'a pas caché qu'au sein du comité qu'il préside certaines voix s'exprimaient en faveur d'une fusion de la Bretagne administrative et des Pays de la Loire. Édouard Balladur n'avait jamais eu connaissance du scénario de réorganisation de l'ouest de la France en 4 régions et a trouvé cette réflexion intéressante.

De la part de Nicolas Sarkozy, le président du Conseil régional de Bretagne a d'abord entendu une opposition nette à l'hypothèse d'une fusion B4 – PDL. En revanche il est resté très évasif sur l'hypothèse d'une réunification administrative de la Bretagne. Je n'ai pas manqué de dire à Jean-Yves Le Drian qu'après son discours devant le congrès des maires le 27 novembre dernier et après avoir fait recevoir Bretagne Réunie à l'Élysée par son conseiller en communication Franck Louvrier, deux actes qui ont créé de l'espoir, une absence d'ouverture du président de la République susciterait une forte incompréhension et sans doute de la colère.

Philippe Argouarch

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logo Philippe Argouarch est un reporter multi-média ABP pour la Cornouaille. Il a lancé ABP en octobre 2003. Auparavant, il a été le webmaster de l'International Herald Tribune à Paris et avant ça, un des trois webmasters de la Wells Fargo Bank à San Francisco. Il a aussi travaillé dans des start-up et dans un laboratoire de recherche de l'université de Stanford.
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