Carhaix, le 6 juin 2025 – La Château Rouge à Carhaix a été le théâtre d’un moment historique : l’inauguration de la statue d’Alan Stivell, figure majeure de la renaissance musicale et culturelle bretonne. En présence de l’artiste, du maire Christian Troadec, de la sculptrice Elisabeth Cibot et d’un public nombreux et ému, la cérémonie a rendu hommage à celui qui, depuis plus de 50 ans, incarne l’espoir, la dignité et la résurgence bretonne.
C’est par un discours fort, lyrique et sans détour que le maire de Carhaix, Christian Troadec, a salué Alan Stivell, qualifié d’ « éveilleur de conscience » et de « porteur de fierté retrouvée » pour tout un peuple.
« Vous avez relevé la tête des milliers de soldats bretons du camp de Conlie, redonné confiance aux millions d’enfants condamnés par Jules Ferry à renoncer à leur langue, la langue bretonne » , a-t-il lancé sous les applaudissements.
Évoquant tour à tour les heures de gloire de la Bretagne médiévale, les souffrances du peuple breton, et la force d’un combat culturel sans relâche, Troadec a inscrit Stivell aux côtés des plus grandes figures bretonnes : Raymond Kéruzoré, les sœurs Goadec, Bernard Hinault, Louison Bobet, Angela Duval, Sébastien Le Balp…
« Après des siècles de honte, vous avez fait rejaillir la dignité. Vous représentez tout cela, Alan Stivell, par votre musique, vos mots, votre militantisme, votre poésie » , a-t-il conclu avec émotion.
Le discours d’Alan Stivell, très personnel et chargé d’émotion, a profondément touché l’assemblée. Visiblement ému, il a avoué avoir d’abord été « abasourdi » par l’idée d’une statue de son vivant.
« C’est un honneur si grand… J’ai pensé aux sportifs, à la musique… et finalement je me suis dit : c’est peut-être bien aussi d’honorer la musique. »
Il est revenu sur les origines de sa vocation : un petit garçon de 9 ans tombant en admiration devant la harpe celtique fabriquée par son père. Ce fut le début d’un engagement total, artistique et militant, qu’il qualifie lui-même d’ « obsession pour la Bretagne et la Celtie » .
« J’ai juré de contribuer à sauver mon pays. Il y avait urgence. Il fallait aller très vite. Cela a voulu dire : communiquer, organiser… parfois au détriment de la création. »
Il a évoqué aussi les sacrifices : le temps manqué pour ses proches, son niveau imparfait en breton, mais aussi le soutien constant du public, qu’il qualifie de « réservoir d’énergie » indispensable.
Alan a fini son intervention par un vibrant Bro Gozh ma Zadoù.
La sculptrice Elisabeth Cibot, auteure de la statue, a pris la parole à son tour, soulignant le travail d’échange et d’écoute mené avec Alan Stivell pour capter au plus juste son énergie et son univers.
« L’œuvre restitue à la fois la force de conviction et la fragilité de la recherche artistique. La branche tenant la harpe est une métaphore de la transmission. »
Elle a détaillé l’inspiration celtique, aquatique et spirituelle de la sculpture, avec l’usage du verre pour symboliser la transparence et le lien entre le ciel, la terre et la mer.
Christian Troadec a révélé pour conclure un détail symbolique : la sculptrice est également cousine de Gweltaz Ar Fur, autre figure de la culture bretonne. « On ne vient jamais de nulle part » , a-t-il souligné.
Cette statue s’ajoute au parcours mémoriel de Carhaix qui rend hommage à de grandes personnalités bretonnes. Avec Alan Stivell, c’est tout un pan de la mémoire contemporaine qui prend forme dans l’espace public : celle d’un homme qui a redonné à la Bretagne confiance, dignité et voix.