L'Unvaniezh Sant Erwan se réjouit de voir que deux personnalités politiques éminentes de Bretagne, messieurs Le Drian et Maréchal, invitent les Bretons de la diaspora, à l'occasion de la Saint-Yves, à renforcer leurs liens et à marquer leur solidarité avec l'ensemble de leurs compatriotes.
Malheureusement, au moment où le résident du Conseil régional de Bretagne et le président du Conseil général de Loire-Atlantique témoignent de leur intérêt pour une fête si hautement symbolique de l'existence d'une communauté bretonne, force est de constater avec une infinie tristesse que, cette année, la fête religieuse de la Saint Yves n'a pas revêtu un caractère particulièrement breton. Mis à part le cantique célèbre "Nan n'eus ket en Breizh" que provisoirement l'évêque de Saint-Brieuc et Tréguier ne saurait supprimer sans provoquer quelques vives réactions, nous n'avons eu droit qu'à des cantiques en langue française. Les litanies en breton qui touchaient si profondément le cœur des bretonnants ont été supprimées.
L'Unvaniezh Sant Erwan se demande quels sont les motifs d'une telle attitude.
- Est-ce parce que certaines personnes auraient été choquées par la bretonnisation de la procession ? Nous écartons d'emblée cette hypothèse. La grande majorité des pèlerins de Saint-Yves sont des bretonnants trégorrois d'un certain âge ; on conçoit mal qu'ils interviennent auprès de l'évêché pour demander la suppression de quelques modestes marqueurs de l'identité bretonne.
- Est-ce parce que la politique de "l'Église apostolique de l'Ouest" consiste à nier la spécificité bretonne et consent sans vergogne au déracinement des Bretons et à l'éradication de leur culture ? Cette idée n'est pas à exclure. L'attitude régulière des DDEC de chaque diocèse vis-à-vis des écoles bilingues catholiques est tout simplement scandaleuse. Yannig Baron, le président de Dihun n'était-il pas récemment obligé de faire une grève de la faim illimitée pour obtenir l'ouverture de quelques écoles ? Face à cela, les évêques, dont dépendent pourtant les directions diocésaines de l'enseignement catholique, ont manifesté, comme à l'accoutumée, une grande indifférence. Le problème de l'enseignement de la langue bretonne semble être le cadet de leur souci. Rien n'indique qu'ils aient voulu infléchir quelque peu les choix et les orientations de leurs subordonnés.
- Est-ce parce que les évêques de "l'Église apostolique de l'Ouest" sont particulièrement sensibles aux souhaits et aux desiderata de l'appareil d'État ? Nous savons bien que, depuis quelque temps, le gouvernement martèle le thème de l'identité nationale prétendument menacée par un communautarisme ethnique. Nous savons aussi qu'aux yeux de nos dirigeants politiques toute émergence d'une culture dite régionale dans la sphère publique est perçue comme un danger pour l'unité nationale. Nos évêques accèderaient-ils allègrement à de telles requêtes ? Cela fait déjà fort longtemps que notre barde Glenmor dénonçait cette connivence et cette forfaiture.
À vrai dire, peu importent les motifs et mobiles de tels agissements. Peu importe qu'ils soient dictés par un républicanisme idéologique, variante moderne d'un longue tradition gallicane, ou qu'ils résultent d'une complaisante soumission à la volonté de l'État. Tout ce que nous pouvons affirmer, c'est que la première mission des évêques de Bretagne, (et nous pensons ici à Mgr Fruchaud, évêque de Saint-Brieuc et Tréguier), ne consiste pas dans la négation de l'identité bretonne. L'évangélisation ne doit pas être assujettie à une idéologie politique. Le principe fondamental qui doit régir toute action humaine, c'est le respect de la dignité de la personne. Et le respect de la dignité de la personne passe notamment par la reconnaissance de ses droits culturels.
Notre association n'a certes pas pour but de nuire à l'Église, mais elle observera régulièrement sa pratique et exercera à son encontre une grande vigilance.