Alors que la presse belge est sortie volontairement des pages de Google Actualités, et que l'Agence France Presse poursuit en justice Google aux USA, l'ABP se bat depuis plusieurs mois afin d' être indexée à nouveau par le moteur de recherche favori des français.
A la suite de modifications de la page d'accueil de l'ABP, Google avait stoppé l'indexation des articles de notre site. La page était par ailleurs devenue trop complexe dans sa présentation et donc particulièrement difficile à analyser par le spider.
Pour faciliter la tâche de Google, ABP a donc du mettre au point récemment une page d'accueil juste pour Google (voir le site) . La page est formatée le plus simplement possible, exactement comme une page de résultats Google.
Toutes les dépêches et les communiqués publiés sur ABP sont à nouveau indexés par Google Actualités. Pour plus de précisions : les partis politiques, les associations et les entreprises qui publient des communiqués via ABP sont également indexés de la même manière et bénéficient de cette promotion.
Que la promotion d'articles de presse via leur indexation puisse faire l'objet de litiges est incompréhensible de notre part et reflète l'état de panique des médias traditionnels devant le «brave new world» de l’Internet.
A ce sujet un extrait du jugement montre le niveau du délire paranoiaque qui s'est emparé de la presse quotidienne: il est possible d’en obtenir le contenu [de l'artcile] via l’hyperlien « en cache » qui renvoie vers le contenu de l’article que Google a enregistré dans la mémoire « cache » qui se trouve dans la gigantesque base de données que Google maintient dans son énorme parc de serveurs ; Attendu enfin qu’il se déduit du rapport de l’expert que : - le mode de fonctionnement actuel de Google News fait perdre aux éditeurs de presse quotidienne le contrôle de leurs sites web et de leur contenu [...]
Le mot indexation n'apparaît nulle part dans le texte complet du jugement que l'on peut lire (voir le site) sur le site de google Belgique, ce qui en dit long sur l'objectivité de cette décision et l'illettrisme Internet des juges belges. D'autre part, s'il y a des articles que Le Soir ou un autre journal belge francophone (cette décision ne concerne que la presse francophone et allemande de Belgique, la presse flamande na pas porté plainte contre google) ne veut pas diffuser plus de quelques jours, il est très facile de les retirer de leur serveur ou de les reclasser automatiquement vers le serveur d'archives payantes comme le font le Washington Post ou le Télégramme et bon nombre de journaux.
Certes, les agences comme l'AFP sont dans une situation différente car elles se positionnent dans le secteur B2B. Leur contenu est exclusivement réservé a des abonnés. AFP prétend que le listing et l'indexation des titres et des chapeaux, voire la miniaturisation des photos est un vol de propriété intellectuelle. Ce qui est un comble puisque l'AFP, en mettant sur son site certaines de ces dépêches les rend publiques. AFP a même menacé l’année dernière ABP de poursuites judiciaires pour mettre des liens vers leurs pages. Voire par exemple une dépêche AFP publique sur (voir le site) ou le flux RSS de l’AFP que tout le monde peut capter (voir le site)
Google a négocié un accord avec Associated Press, l’agence de presse américaine, mais refuse de négocier avec AFP. AFP est en fait elle-même dans l’illégalité. Ce n’est qu’une question de temps avant que la Commission Européenne ne se penche sur son cas. L’agence Havas qui fut nationalisée par le gouvernement de Vichy pour devenir l’agence France Presse, est en grande partie subventionnée par l’Etat à raison de 110 millions d’euros par an déguisés en abonnements. ABP a déjà signalé cette fraude -- mais autant le répéter. Si les contribuables français payent pour les dépêches AFP, la moindre des choses seraient qu’ils puissent au minimum voir les titres des dépêches sur Google ou sur le site même de l’AFP !
Avoir le beurre et l'argent du beurre
Si le tribunal belge a donné raison à la presse contre Google, le tribunal de commerce international et les cours de justice américaines où se joueront les décisions finales, ne peuvent remettre en cause le principe fondamental sur lequel est construit l'Internet. Tout ce qui est mis en ligne peut légalement être lu par le public (Il existe des moyens techniques pour protéger par des mots de passe les contenus). Les pages non protégées peuvent certes être copyrightées mais leur existence ne peut être cachée au public . Des pages web, donc publiques, ne peuvent pas ne pas être indexées par un moteur de recherche ou même linkées par un autre site. C’est le fonctionnement même du World Wide Web tel qu’il fut inventé, et généreusement mis au service de l’humanité, par Tim Berners Lee. Rien ne pourra y changer car les protocoles eux-mêmes sont dans le domaine public et n'appartiennent plus à personne.
Ce qui est incroyable dans cette histoire c’est qu’un journaliste aujourd’hui utilise Google plusieurs fois par heure pour écrire un article et ceci tout à fait gratuitement. Le journaliste y puise des informations qui vont certifier, complèter et enrichir son article. Cet apport de Google fera gagner plus d’argent à l'éditeur du journal grâce à la publicité qui accompagne le journal ou le site. Certes, Google fait son beurre en indexant les titres des autres, via la publicité de ses produits addsense et addword, mais le journal bénéficie d’une augmentation du trafic, voire des ventes, grâce à Google.
Nous sommes plutôt face à une crise des médias qui voient leur monde et leurs privilèges, voire leur monopole dans certains cas, disparaître. La presse quotidienne décroit à la vitesse de 7 % par an (seulement 3% en europe toutefois, et 2% en France).
Comme le rapporte Fogel et Patino dans Une presse sans Gutemberg, dans les années 30 la presse américaine complètement paniquée après l’apparition de la radio, avait réussi à interdire les actualités sur les chaînes de radios. L’accord Biltmore de 1933 entre les journaux américains et les stations de radio prévoyait que les radios ne diffuseraient que deux bulletins d’informations par jour et de deux minutes seulement et cela bien après la sortie des journaux du matin ou du soir ! Ça n’a pas duré longtemps. A noter que les quotidiens ont survécu à la radio et à la télévision et qu'ils survivront sans doute aussi à l'internet.
Les radios font un peu la même chose que Google, elles reprennent les gros titres. Elles achètent les journaux du matin, lisent les articles de la Une et les diffusent. C’est bien pire, car les sources ne sont pas citées comme cela est fait par Google et Yahoo.
A noter que France 3 et certaines rédactions de journaux "régionaux" lisent régulièrement ABP. S'ils reprennent parfois nos informations, ils ne nous donnent jamais crédit. Ils ne parlent jamais de nous. Pensent-ils qu'ABP représente une compétition dangereuse pour leur media ou que montrer le courage politique des uns ne ferait que révèler la lâcheté des autres? L'avenir nous le dira, mais on serait enclin à penser que c'est "les deux mon capitaine".
Philippe Argouarch