Chroniques de 2015 à la lumière de 1905
Quand le ton a monté sur la question du voile et du menu de substitution, il m'a suffi de me retourner pour revoir dans mon enfance ce geste des femmes se couvrant la tête d'un fichu avant de sortir. Nous étions en Loire-Inférieure et la loi de 1905 était suffisamment accommodante pour accorder un jour férié aux fêtes religieuses et servir du poisson le vendredi dans les cantines, et pas seulement celles des écoles libres.
Loi de séparation des Églises et de l'État, mais en réalité de l'Église catholique et de l'État, les autres faisant de la figuration, et l'Islam n'existant pas puisque les musulmans d'Algérie n'avaient pas le statut de citoyen. De même, il a fallu la tragédie de Charlie pour nous rappeler qu'on avait longtemps débattu avant d'autoriser la représentation des figures sacrées. Ce qui n'allait pas de soi tant le monothéisme se méfiait de l'idolâtrie en souvenir du veau d'or. Les conciliaires réunis à Nicée tranchèrent en faveur de la représentation. C'était en 843.
Notre monde envahi d'images vient de là. Ce qui n'en fait pas un modèle universel.
Né à Campbon, Jean Rouaud obtient le prix Goncourt pour son premier roman, "Les Champs d'honneur" (éd. de Minuit, 1990).
Il est l'auteur, chez Grasset, d'"Un peu la guerre" (2014), "Être un écrivain" (2015), et "Misère du roman" (2015) et dernièrement de "Tout paradis n'est pas perdu" (2016).
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